«Notre poésie est notre politique» Eyadou Ag Lech. Bassiste du groupe Tinariwen

-Vos premières impressions sur le public de ce soir '
Nous sommes vraiment très contents d'être là, je ne trouve pas les mots pour dire toute notre joie de venir chanter ici à Alger. L'Algérie pour nous c'est comme notre pays. Le public, ce soir, nous a très bien accueillis, nous avons donné un très bon concert, je pense, grâce à ce formidable public.
-Avec la situation qui prévaut aujourd'hui au Mali, qu'est-ce que cela représente pour vous de pouvoir donner une voix au peuple touareg et chanter le Ténéré et la liberté '
On vit actuellement des moments très durs, on essaye de surmonter cela comme nous avons l'habitude dans le désert de supporter les difficultés, avec ou sans Etat. On a vraiment besoin actuellement d'un discours qui passe. Nos populations ont trouvé refuge un peu partout en Algérie, en Mauritanie, au Burkina Faso, il faut qu'on puisse faire entendre les appels des ces populations. La situation est très compliquée, on n'arrive pas à comprendre ce qui se passe exactement. Et on souhaite vraiment que la paix revienne chez nous.
-Si vous avez un message à lancer au nom des Touareg pour que la situation change et s'améliore, quel serait-il '
C'est compliqué, parce que Bamako ne représente plus un Etat. Le Mali pour moi, et je suis désolé de dire ça, n'est plus un Etat, c'est un problème qui dure depuis très longtemps. Le Mali n'a jamais rien fait pour les Touareg. Les Touareg sont un peuple qui ne demande pas grand-chose, mais il est inadmissible qu'il soit privé même d'un paracétamol, c'est difficile à vivre. On nous dit de supporter, mais la situation est très difficile, même avec le réchauffement climatique, le thermomètre va monter à 60 degrés, comment va-t-on continuer à vivre dans les mêmes conditions ' Il faut qu'il y ait quelque chose qui puisse nous rafraîchir un peu (rire). On est vraiment choqués de la tournure que la situation a prise, et voir nos familles dispersées comme ça aux quatre vents, c'est insupportable. Une solution doit être trouvée, car il y a trop de désordre qui peut toucher même les pays voisins, je pense que c'est le moment de réfléchir ensemble à une solution.
-Vous avez évoqué dans une de vos chansons le mouvement Azawad, et nous vous rappelons que Tinariwen a été partie prenante du mouvement insurrectionnel pour la liberté du peuple touareg. Le mouvement Azawad semble dépassé par la situation actuelle, qu'en pensez-vous '
Nous sommes un peuple guerrier qui n'aime pas qu'on le réduise à un état de non existence. La situation actuelle étant très compliquée, nous estimons que notre arme est d'abord politique. Notre poésie est notre politique et la guerre passe par la politique. La force de la poésie est dans le fait qu'elle touche les c'urs et c'est ce qui nous importe. Notre souci majeur actuellement ce sont les populations qui souffrent. Le plus important aujourd'hui c'est de trouver une solution à ces populations qui vivent sous la terreur.