Alger - Revue de Presse

Dans l'attente de Godot !



Vaste est l'Algérie des mécontents. Cela va des professeurs d'université aux personnels paramédicaux, enpassant par les harraga avérés ou en instance. Ilfaudra, après les considérations désabusées entendues lors de la dernièrerencontre du Forum des chefs d'entreprises (FCE), y ajouter les capitalistesnationaux.Ils ne sont pas contents du tout. Comme des jeunes sansemploi ou des travailleurs aux salaires étiques, ils constatent avec amertumeque la prospérité financière ne les concerne pas. Ils ont été mécontents autemps de la devise rare, à cette époque lointaine où un comité ad-hoc avait été imaginé pour l'allocation de la précieuseressource et où l'actuel patron du FCE était ministre des PME. Ils sontmécontents aujourd'hui que l'on est confortablement allongé sur un matelas dedevises.Le capitalisme national, en temps de crise comme en tempsd'abondance, reste ce qu'il a toujours été: embryonnaire, incapable de trouverl'élan productif nécessaire. Et pour cause, les grandes affaires lui échappent.A une époque révolue, celle des usines clés en main, les patrons locaux voyaient les étrangers rafler la mise tandis qu'ils devaientdémontrer qu'ils ne dirigeaient pas des entreprises «exploiteuses». Aujourd'hui,on ne les attaque plus sur ce terrain, mais on leur signifie qu'ils n'ont nil'envergure ni les capacités de prendre en charge les grands investissementsd'infrastructures.Observation première: dans le socialisme spécifique commedans le capitalisme spécifique, les entreprises doivent attendre Godot pour grandir. Pour atteindre la taille critique, ellesdoivent obtenir des marchés; mais comme elles sont petites, l'Etat ne les jugepas aptes à prendre en charge de grands projets. Et donc, conclusionirrémédiable: ces entreprises resteront petites. L'économie de marché couleurlocale, à la différence de ce qui se passe ailleurs, n'est pas le faitd'entreprises privées dynamiques qui investissent des marchés et créent del'emploi, mais d'un Etat qui a de l'argent et qui établit des listes de grandsprojets au profit de grandes entreprises qui ne sont pas algériennes. C'estpour cela qu'en 2008, des entrepreneurs algériens regardent, avec envie etdépit, ces étrangers qui prospèrent sous nos cieux - main-d'oeuvre importée àl'appui - en livrant contre les milliards de l'aisance des infrastructures«clés en main».Seconde conclusion, très problématique: patrons et salariés,unissez-vous ! On en est loin, bien sûr... Mais il est difficile de ne pasentendre le lamento du patron du FCE regrettant que l'on s'installeconfortablement dans l'économie de rente, que l'on s'accommode de l'informel etde la léthargie. Les chefs d'entreprises voient le train de la prospéritépétrolière leur passer sous le nez, eux restant désespérément en panne sur lequai de la croissance.Mais n'est-ce pas dans la nature particulière de notresystème irréductiblement spécifique ? Une classe d'entrepreneurs créatifs peut-elleémerger dans un système politique recroquevillé sur la gestion de la rente, quine veut ni ne peut se réformer ? Hamid Temmar, représentant qualifié de ce système, a trouvé uneréponse intéressante: le gouvernement fait son travail, mais si ça ne marchepas, c'est la faute à l'administration et aux banques publiques ! Reda Hamiani lui répond presque: lessalaires des banquiers sont dérisoires et les patrons attendent toujours ladépénalisation des actes de gestion. A l'aveu d'impuissance ministérielle, répondune supplique corporatiste: on a le dialogue social et la politique économiquequ'on peut...
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