Porte de la Mer
Il fut un temps où Alger regardait la mer sans crainte. Par cette ouverture majestueuse, l’ancienne Régence ottomane recevait les richesses du monde connu : esclaves libérés ou capturés, ambassades des rois d’Europe, marchands juifs, chrétiens, musulmans, tout un peuple qui faisait vibrer la ville au rythme des vents d’Orient.
Aujourd’hui, cette porte est muette. Le port la contourne, l’État l’ignore, les touristes ne la voient pas. Elle est là, comme un vieux sage que l’on a relégué en silence, parce qu’il en sait trop.
Porte Neuve
C’est par elle qu’est arrivé le désastre. 1830. Alger, jusqu’alors inviolée, tombe par cette brèche. Ironie du sort : cette « porte neuve » signe la fin d’un monde ancien. Depuis, la ville est restée ouverte, trop ouverte, à tout vent, à toutes les violences. Les barques sont devenues des frégates coloniales. Les bazars ont cédé la place aux comptoirs.
Et nous, que reste-t-il de nous après la conquête ? Rien que des rues où nos pas hésitent, et des noms de portes qu’on ne lit plus.
Bab El Oued
Elle était la porte du peuple. Celle des pêcheurs, des dockers, des enfants en sandales. Elle ne sentait pas le pouvoir, mais le pain chaud, l’iode, les palabres et les bagarres du quotidien.
Aujourd’hui encore, elle frémit d’une authenticité que nul lifting urbain ne peut gommer. Pourtant, même ici, on a dressé des murs invisibles. Le burkini y côtoie la pauvreté, les narguilés masquent la colère. On se baigne, mais on n’oublie pas. Car sous chaque vague, il y a une mémoire battue par l’indifférence.
Bab Azzoun
La plus marchande. La plus ouverte. La plus cosmopolite. On y venait d’Oran, de Constantine, de Laghouat. Bab Azzoun était le ventre d’Alger : là où s’échangeaient les épices, les rumeurs, les idées.
Mais les temps ont changé. Aujourd’hui, on y vend du faux cuir, des vêtements d’occasion, et des illusions bon marché.
Les caravanes ne passent plus. Les idées non plus.
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Posté par : patrimoinealgerie