Algérie - Revue de Presse


Sur le chemin des troupeaux Le voyage est solennellement entrepris comme le veut la tradition, avec « bismillah », plusieurs fois répété pour invoquer Dieu afin que le voyage se déroule bien. Sur les altitudes fraîches des moussons d?été, le 4x4 s?ébranle droit vers le nord du Hoggar où la température est presque automnale. Car, faut-il savoir, dans l?immense région du Hoggar, l?été s?arrête à la mi-juillet, lorsque les chaleurs baissent pour céder la place aux pluies, voire au froid des nuits du mois d?août. Sur le plateau de l?Assekrem, la température peut descendre jusqu?à 0 C°. N?est-ce pas là que se trouve le toit de l?Algérie, le mont Tahat (3003 m) ! Le massif du Torha et la grande plaine de l?Amadghor, où commence la région de l?Eguére, aux confins nord-est du Hoggar, sont notre destination qui nous fera retrouver les troupeaux de moutons et de chamelles. Dans ces lieux, les pâturages sont, pour l?instant, plus cléments : une échappée habituelle pour Mohamed Rouani, fils du désert que nous suivons et qui s?en va régulièrement s?enquérir de l?état des troupeaux. Une échappée exaltante aussi, pour l?invitée qui se sauve des chaleurs d?Alger afin d?aller trouver beauté et quiétude dans de lointains lieux. En cette matinée du 24 juillet, l?asphalte de la route nord de Tamanrasset est enfin quitté, loin après le village de Tit, « région dont l?histoire est plusieurs fois millénaire », nous dit Mohamed... La piste de Djanet entrouvre, crescendo, pour nous les paysages géologiques chers aux férus du Hoggar, paysages caractéristiques aussi d?une flore rustique et endémique propre au grand Sud... Les rencontres avec les animaux sauvages (gazelles, mouflons, chacals et autres rapaces...) ponctueront sans cesse, de leur côté, notre virée. Très nombreux, les oueds traceront souvent notre chemin. Tandis qu?à l?horizon vers l?est, les nuages denses surplombent la chaîne de l?Atakor, l?air frais confirme, pour nous, les pluies tombées sur ces hauts reliefs. Et ô surprise ! : de grosses flaques d?eau parsèment soudain notre route avant que l?eau ne nous en mette plein les yeux, lorsque nous entamons le grand oued In Téhik que nous traversons neuf fois à bord de notre véhicule : In Téhik est tout seigneur avec sa crue ! : c?est le présage à d?autres pluies abondantes, « Incha Allah ! », tant attendues pour venir reverdir les pâturages du Hoggar. Passés les villages d?Hirafok et d?Idelès très verdoyants, la soudaine plongée dans le monde volcanique est surprenante : c?est la plaine Tafegaq où le volcanisme du quaternaire a eu une activité très intense. Le spectacle est merveilleusement noir avec du basalte à profusion. Même si le socle granitique du début du monde est aussi présent à la surface, c?est pourtant le volcan de Manzaz qui nous entoure en tout sens avec son cratère, ses fumerolles et ses coulées de lave. Derrière celui-ci, Okcem imposante montagne d?où est extrait le natron. Aleksedh, chaîne montagneuse sur le flanc est, nous suivra un long chemin, alors que nous traversons pendant une heure l?oued Telouhet. Depuis ce oued, le domaine de la préhistoire ne nous quittera plus, jusqu?à notre destination de l?Amadghor, point de chute des anciennes caravanes de sel pour ses importantes salines. Les Idébnane (pluriel d?Idébni), tombes préhistoriques et anté-islamiques (en tamhaq, langue des Touareg), joncheront notre route, à côté des foyers, aux cuisines préhistoriques, éparpillées çà et là, au bord des oueds fossiles. Quand un erg accueille un lac ! Le Torha, l?Eguéré, l?Ahélékène, autant de noms de massifs montagneux formant une immense ceinture tassilienne autour de l?Amadghor. Alors que l?Immidir est encore plus au nord, les nombreuses cuvettes qu?abrite cette ceinture montagneuse nous abriteront le temps de nos haltes, autour des troupeaux de moutons et de chamelles. Du puits de Tin Begane (« celle des chacals »), Mohamed s?occupe longuement, avec les bergers, à mettre l?eau dans les fûts, pour la transporter à quelque 15 km plus loin, vers les moutons afin de les abreuver : une opération loin d?être de tout repos pour l?observatrice que je suis, mais qui s?avère comme un travail routinier pour le fils du désert. 26 juillet : en route pour la région de Tihodaïne, frontière nord-est entre le Hoggar et le Tassili n?Ajjer. C?est un immense territoire où la ceinture nord-tassilienne a continué de jaillir des entrailles de la terre, il y a des centaines de millions d?années. C?est là, dans l?erg Teguédit que les chamelles paissent, depuis plusieurs mois. L?eau, survenant parfois miraculeusement, a creusé un grand lac sur le flanc de l?erg, alors que la crue s?ouvrait, l?année passée, une nouvelle voie. Quel meilleur endroit pour les chamelles qui y ont eau et pâturages et qui y font des petits chamelons ! La joie dans le c?ur, Mohamed retrouve les chamelles qui nous abreuvent de leur lait. La halte est exaltante, le lieu est paradisiaque ! Nous sommes dans une immense cuvette, entourés de montagnes aux couleurs accentuées par le soleil qui s?en va se coucher... Dans notre hôtel, sous les milliards d?étoiles, la parole, autour du feu avec les bergers, se fait à voix basse, tandis que le cri des chamelons appelant leur mère constitue notre musique dans le silence de la nuit désertique... Le repos de l?âme est comblé. Nous sommes bien, nous sommes heureux. 28 juillet : Il pleut des trombes sur Tamanrasset. Un autre voyage va commencer : celui d?une longue méharée qui nous mènera sur les traces des anciennes caravanes. Les vacances ne font que commencer dans le Hoggar.
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