Algérie - Revue de Presse

Une crise du foulard en Algérie



Bien que déjà traitée, l'énigme reste entière : pourquoi croyons-nous que le reste du monde en veut à notre religion, à l'Islam et à nos personnes solidement agrippées à la corde ancestrale ? Les économistes répondent que c'est à cause de notre pétrole, les endoctrinés répondent que c'est à cause de la vérité que nous possédons. Est-ce vrai ? Tellement peu. Un bon musulman d'aujourd'hui fonctionne d'abord, sur l'idée que les autres sont mauvais et qu'ils en veulent à son statut de représentant d'une race qui a été la dernière à qui Dieu a parlé, depuis Adam, et a donné un livre. Conséquence ? Tout est interprété dans cet ordre d'idées qui donne le monde comme un complot et qui nous fait collectionner les atteintes à notre foi d'abord comme des actes prémédités.  En Algérie, l'un des correspondant du Q.O a rapporté une petite histoire de foulards qui se serait passée à Blida. Dans l'ordre du complot permanent, l'Occident chrétien répond à l'invasion du foulard chez lui par une contre attaque du foulard chez nous.  A Blida, des commerçants auraient ainsi découvert dans leurs ballots, des foulards à l'effigie de Jean-Paul II, cachés sous des foulards « saints ». « Les motifs, traits noirs sur fond bleu foncé, sont tous en forme de croix. Tout autour, une bande jaune sur laquelle est portée : pontificat de la paix 1978-2005, et au beau milieu, un cercle jaune qui, lui aussi, montre l'effigie du Pape Jean-Paul II, avec tout autour, en noir, son nom et ses dates de naissance et de décès » rapporte notre confrère. Les penseurs peuvent dialoguer sur le dialogue des religions et les grands muftis transnationaux de la planète d'Allah peuvent accueillir ou être accueillis chez le Pape, cela ne change pas la conviction qu'il y a complot et attaques pernicieuses. Ce n'est pas l'image d'homme de paix du pape mort qui est retenue par l'équation Occident-Planète d'Allah, mais l'incursion fourbe des signes ostentatoires des chrétiens en réponse à l'expression des signes ostentatoires de nos croyances dans leurs HLM. Le raisonnement est solide même s'il est primaire : s'ils en sont venus à répondre par les foulards, les films, les livres gratuits et les impressions des noms divins sur des vêtements non-nobles pour nous humilier, c'est qu'il y a guerre, un vaincu, un vainqueur et un enjeu. C'est à dire, qu'il y a complot et sociétés secrètes. Question donc : que possédons-nous, nous qui possédons si peu, comparativement à eux, qui les poussent à vouloir nous convertir, nous éloigner de nous-mêmes et nous attaquer en permanence. Réponse : Allah. Contre réponse : Dieu est partout et est pour tout le monde. Réponse : Le Coran. Contre réponse : il est « descendu » pour tous et pas uniquement pour les Arabes. Le droit chemin ? Il est ouvert pour tous et n'est pas une autoroute payante que nous pouvons interdire aux autres. Notre histoire ? Vaut mieux ne pas trop la raconter.  L'autre question est : pourquoi du 8ème siècle et jusqu'à la chute de Grenade ce genre de problème ne s'est pas posé pour les musulmans d'autrefois qui ne craignaient pas des proximités prosélytes ? Réponse : parce qu'à l'époque nous étions puissants, nous étions le centre du monde et que les têtes des croyants se sentaient mieux protégées par des idées que par des foulards. Inversons : que pensera l'humanité si l'Occident se mettait à interdire et à pourchasser des importations de foulards avec l'effigie d'El-Kardaoui et des croissants tout autour, sur un fond bleu et blanc et des bandes jaunes ornées de calligraphies entortillées ? Rien, sauf qu'il est idiot. L'Occident est-il cependant innocent ? Non. Là où, nous croyons qu'il y a complot, lui, il continue de croire qu'il y a menace. Le détail qui fait la différence est qu'en continuant de réduire comme lui la Grande Question à une question de foulards, nous laissons voir que le reste est nu et qu'il faut donc protéger les croyants en détournant les regards vers les détails affligeants. Peut-on sauver l'Islam avec des foulards ? Peut-on vaincre l'Occident en lui imposant les nôtres ?



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