Algérie - Cuisine traditionnelle, patrimoine culinaire

Pain traditionnel aux Aurès, Le nécessaire tajine




Les mères de familles aurésiennes accordent un soin particulier au choix du tajine qui doit répondre à un nombre de critères dont va dépendre la qualité gustative de leur galette. Durant le reste de l’année, cet ustensile est pratiquement abandonné par la plupart de ces femmes, notamment les travailleuses qui recourent aux fours ou aux boulangers des quartiers.

Le Ramadhan demeure, de ce fait, l’exception car la kesra ou el matloue, comme appelée dans d’autres régions, est le mets irremplaçable pour accompagner la sacro-sainte soupe chorba frik. Artisane spécialisée dans la fabrication du tajine, étalant ses produits à même le sol en face de la mosquée El Atik du centre-ville, El Hadja Noua confirme l’engouement exceptionnel pour le tajine pendant le Ramadhan, estimant qu’il reste presque boudé les onze autres mois de l’année. C’est le tajine grenu qui est le plus demandé car idéal pour le cuisson de la Kesra khmira (galette à la levure) particulièrement consommée durant le mois du jeûne. Le prix de cet ustensile varie de 200 à 350 DA selon la qualité de l’argile et de sa fabrication. Certains tajines exigent une terre spéciale que l’artisane doit parcourir des kilomètres pour trouver. Cela explique la variété des prix qui tient également compte du temps et de l’effort mis dans la fabrication. Plusieurs heures sont, en effet, passées par les artisanes dans la seule étape dite tamlis, qui signifie littéralement polissage et au terme de laquelle, le tajine prend une forme finale. Il est ensuite exposé au soleil pour sécher avant d’être mis dans un four pour lui donner de la rigidité. Les graines en forme de cercles concentriques agrémentant le tajine grenu, lui sont données par l’artisane alors que sa pâte est encore molle. Ce sont ces graines qui empreignent la galette et lui donnent son élégance. La poterie, essentiellement pour la confection du tajine, est une activité exclusivement féminine qui est pratiquée dans la région depuis des temps reculés. Des femmes, munies d’un baluchon capable de contenir leurs produits qu’elles calent soigneusement sur leur dos, vont de villages en villes faire le porte-à-porte afin d’écouler la marchandise. D’autres choisissent d’exposer leurs produits sur les axes routiers fréquentés. Fragile et cassable, le tajine d’argile ne compte pas laisser sa place à son concurrent en métal pourtant plus robuste et résistant aux inévitables chocs dans les cuisines. Le secret réside, selon les ménagères, dans le goût et la qualité des galettes qui y sont cuites. Presque tous les ustensiles des ménages aurésiens étaient à base d’argile, il y a quelques décennies. L’introduction des ustensiles en métaux s’est faite progressivement et a fini aujourd’hui par remplacer les anciennes marmites et plats d’argile. Mais les fins gourmets font appel a « ces vieux objets » pour retrouver les saveurs d’antan « balayées », dit-on, « par les métaux durs de la modernité ». Le tajine en ce mois de Ramadhan reste une occasion qui confirme la prééminence de l’art culinaire ancestral, et l’attachement que lui voue encore la population locale.


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