Algérie - Sujets chauds

Où va la Nation algérienne ?



Où va la Nation algérienne ?




Alors que nous célébrons le 60e anniversaire de notre glorieuse Révolution de Novembre 1954, j’aimerais m’adresser, d’abord, aux citoyennes et citoyens jeunes et âgés, en Algérie et à l’étranger, aux étudiants et universitaires, aux travailleurs et syndicalistes, aux fellahs, aux responsables d’associations de la société civile, aux gens des médias, aux hommes d’affaires nationaux.

Tous ceux qui ont à cœur de sauver l’Algérie doivent faire des années à venir les années du travail ensemble pour la préparation et la réalisation du changement dans le calme et la sérénité. Ils doivent se mobiliser pacifiquement, à travers une transformation graduelle, générée par les citoyens et appuyée sur les compétences nationales. Tous ceux qui ont la capacité de contribuer au changement doivent se mobiliser parce qu’ils auront appartenu à la génération qui aura participé ou qui aura laissé faire la destruction de la nation algérienne en ne prenant pas au sérieux les avertissements, nombreux, dont celui-ci !
Voilà près de deux siècles de violence vécue par les Algériens qui n’ont pas eu une sérieuse opportunité de participer pleinement à la gouvernance de leur pays.

La nation est en danger de l’intérieur par la déliquescence de l’Etat, l’amenuisement de la rente et les maux sociaux. Nous avons eu l’occasion d’en faire la démonstration par des analyses scientifiques rigoureuses à différentes occasions. De l’extérieur, les dangers proviennent de la globalisation et de la nouvelle géostratégie régionale avec le concept de globalisation, à savoir le travail à la disparition de l’Etat-nation et son remplacement par de petits Etats locaux liés en réseau dans un ensemble plus large. Pour notre région, il s’agit du Grand Moyen-Orient. Elle est également en danger par la capacité d’influence des masses par le «village global».

Aujourd’hui, nous faisons face à une question d’existence : avons-nous sacrifié des vies pour l’Algérie d’aujourd’hui ? Est-ce vraiment l’Algérie des espoirs de ceux qui ont pris le fusil pour affronter des forces autrement plus puissantes, avec la perspective évidente du sacrifice suprême ?Nos populations subissent des campagnes frauduleuses sur les bienfaits de la globalisation, sur le travail pour des causes nobles au sein de la «société civile» : dignité personnelle, respect culturel, opportunités économiques et sociales, environnement, entrepreneuriat, création d’emplois, insertion des jeunes dans l’économie, culture, sport, sciences, droits des femmes, etc.

Tout comme la théorie de la spécialisation internationale a servi la colonisation au XIXe siècle, ces campagnes frauduleuses préparent, aujourd’hui, l’accaparement des richesses et l’affaiblissement des pays en développement. Ce ne sont pas les cas qui manquent : Irak, Libye, Soudan, Syrie, Mali… De même, l’erreur de se sentir sécurisé par les «bonnes relations» avec des pays donnés. L’expérience de l’Algérie de 1794 et de 1830 est là pour rappel !

Nous avons besoin d’une prise de conscience nouvelle qui rassemble toute la nation, comme celle qui a fait bouger les Algériens en 1954. C’est ce qui va semer l’espoir et la confiance chez toutes les Algériennes et tous les Algériens et leur permettre de consacrer la stratégie de sortie de crise comme le vrai début d’une solution durable, construite sur une vision claire de l’avenir. Pour ce faire, il semble qu’un partenariat politique à finalité démocratique, qui prône la libération de la société, est inéluctable. Un partenariat fondé sur une stratégie, un organigramme et des tâches planifiées.

Sans curseur, sans boussole et sans aucune volonté d’installer le pays dans une transition démocratique sereine, les pouvoirs en place ont de tout temps tenté d’impliquer toute la société, avec ses partis politiques et ses organisations, aussi divergents soient-ils, dans leur culture de l’échec.

Le temps est venu pour que la société civile s’organise, se définisse une place et des tâches permanentes et devienne une source de visions et de programmes alternatifs. Dans une société tendant vers le changement, il n’est d’autres moyens que de permettre l’émergence de toutes les élites, à condition qu’elles jouent réellement leur rôle d’éclairement et de contrepouvoir et qu’elles s’engagent au respect d’un pacte solennel, préalablement débattu et codifié, ayant pour finalité la primauté de l’intérêt national sur celui des individus.

La liberté d’expression, l’ouverture des médias lourds, en tant que service public, à toute la société dans ses contradictions et ses différences, sont en soi une inscription sérieuse dans un processus de transition aussi bien politique qu’économique et culturelle.

Que les professionnels de l’information et de la communication, les intellectuels, les syndicalistes et tous les autres acteurs, notamment les femmes et les jeunes, se mobilisent et deviennent source de moralisation de la vie publique et de bonne gouvernance.

Que l’administration, à travers sa composante humaine et ses démembrements à tous les niveaux, se mette réellement au service des citoyens et de leur bien-être par une efficacité et une célérité de bonne facture dans le traitement de ses divers besoins. Que la justice, tous magistrats confondus, chacun dans sa spécialité et dans sa circonscription, rendent la justice avec conscience, justesse et équité. Alors seront réunies les conditions pour une Algérie plurielle, démocratique, intelligente, réellement souveraine car non dépendante et géostratégiquement incontournable devant la globalisation déferlante.

Il faut bien considérer que pour redresser la situation, il faudra dégager des ressources importantes pour financer les réformes, nombreuses à entreprendre, et dégager une épargne publique pour financer les investissements productifs. La situation de l’économie algérienne, aujourd’hui, ne permet pas ces financements, sauf à utiliser la rente des hydrocarbures. Et toute la stratégie consistera à sortir la rente de sa situation actuelle, au service de la corruption et de la prébende, pour la mettre au service du développement et de la protection pour une période de 4 à 5 ans, avant que l’économie ne soit redressée.
Je propose d’ailleurs la constitutionnalisation de l’usage des recettes d’hydrocarbures pour l’orienter vers le développement durable du pays et la préservation des intérêts des générations futures.

L’alternative est claire : soit se mobiliser pour faire face à la crise multidimensionnelle par une convergence vertueuse permettant de réussir dans les situations difficiles, soit laisser faire en profitant grassement — ou maigrement ou pas du tout — de la rente et voir la société diverger vers un mélange détonnant de perte de la morale collective, de corruption généralisée et de pauvreté.

La mission est par conséquent de :

- Construire un Etat en phase avec les changements qui s’opèrent en Algérie et dans le monde.
- Promouvoir la population en société civile engagée vers le progrès et la prospérité.
- Développer une économie en phase avec les potentialités de l’Algérie et les aspirations de son peuple.

Ce travail ne peut se réaliser sans le changement du système de gouvernance actuel. Donc la mission essentielle des forces qui appellent et travaillent pour le changement consiste à préparer les conditions pacifiques du départ du pouvoir actuel pour la mise en œuvre des solutions aux différents problèmes décrits dans le diagnostic.

Un travail important et fondamental doit commencer, immédiatement, pour le passage d’une population fataliste et indifférente à une société civile citoyenne.

Je formule donc le vœu que notre peuple, qui a su relever des défis autrement plus difficiles durant sa longue histoire, prenne conscience de la gravité de la situation actuelle et de ses atouts qui ne demandent qu’à être exploités. Alors, il conjurera le mauvais sort afin de tourner le dos au fatalisme, en se mobilisant pour se réapproprier les instruments de conduite de notre destin national par la mise en œuvre d’une transition démocratique.
L’opportunité reste ouverte aux factions saines et patriotes au sein du pouvoir et de l’appareil administratif qui, faisant le constat de la gabegie dans laquelle nous sommes plongés, voudront se joindre à leurs concitoyens pour participer à la réalisation de cet objectif d’une Algérie de paix, de justice et de prospérité.

Les responsables politiques doivent comprendre que ce qui compte pour un homme d’Etat, c’est ce qu’il aura laissé après son départ et non les honneurs protocolaires du poste. Il se présente une dernière opportunité pour sauver l’Algérie par un programme de changement du système de gouvernance, qui doit commencer immédiatement pour lui donner les moyens de réussir avant l’avènement de la catastrophe, parce qu’après ce sera trop tard !

Les tenants du pouvoir verront qu’ils auront appartenu à la dernière équipe qui aurait pu changer le cours des choses, mais qui en aura en toute connaissance décidé autrement ! Ils doivent comprendre qu’il y a une différence entre acheter la paix sociale par le laxisme dans la redistribution de la rente, d’une part, et travailler pour la garantie du maintien de la prospérité, d’autre part !

Le peuple algérien a de nouveau rendez-vous avec son histoire. Il veut inaugurer avec l’ensemble des compétences nationales une nouvelle ère. Une ère de ses valeurs retrouvées, de confiance dans la capacité de notre économie, de liberté, de paix, de travail, de savoir, de respect, de tolérance, de solidarité, de créativité.

Les ressources existent, les compétences nationales sont prêtes à les transformer en programmes avec les capacités pour les mettre en œuvre. Alors, engageons-nous, tous, la main dans la main, pour la construction d’une Algérie gagnante et tournée vers l’avenir.

C’est le moment de penser à nos enfants ! De quelle Algérie vont-ils hériter ?

Aujourd’hui, notre pays ne peut plus continuer à vivre d’espoirs sans cesse reportés. La reprise en main de notre destin ne peut être différée plus longtemps.
Ayons simplement le courage de nos rêves et ayons foi en nous-mêmes.

Vous l’avez compris, la nation algérienne ira là où nous voulons qu’elle aille. Elle ira vers la justice, le progrès et la prospérité, si nous nous mobilisons pour le changement du système de gouvernance et nous travaillons à la mise en œuvre d’un programme ambitieux pour la sauvegarde de la nation algérienne.

Elle ira vers la catastrophe si nous nous enfonçons dans le fatalisme et l’indifférence.

Ahmed Benbitour




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