Mustapha Negro, la voix des opprimés, s'est éteint hier Vieux militant des causes nationale et ouvrière

Par Abdelkrim Ghezali
Les Algériens l'ont découvert lors de l'installation de la première APN pluraliste à la suite des législatives de 1997. Etant le plus âgé parmi les députés, il a coprésidé la séance d'ouverture solennelle de la législature avec le plus jeune élu. Mustapha Ben Mohamed, un vieux routier de la politique, militant du PPA dès 1945, fidèle compagnon de Messali Hadj, il l'avait accompagné dans l'aventure du MNA jusqu'au bout. D'ailleurs Ben Mohamed a toujours assumé ce choix et ne l'a jamais caché. Il a été arrêté en 1955 par l'armée coloniale et fut emprisonné jusqu'en avril 1962, non sans avoir subi les pires atrocités de la torture. Au lendemain de l'indépendance, Ben Mohamed part en France pour adhérer au Parti communiste internationaliste, une tendance de la quatrième internationale et créé avec Simon Ajklouf, le comité de liaison des trotskystes algériens, chargé, entre autres, de faire le bilan de la révolution algérienne, d'en tirer toutes les conclusions et d'analyser la situation politique de l'Algérie à l'époque. A ce propos, Ben Mohamed a été une mémoire de l'extrême gauche algérienne, de sa naissance, son développement, ses déchirements et clivages. Les divisions des trotskystes algériens ne sont pas seulement motivées par les débats sur les questions internationales et les tactiques divergentes à adopter, mais aussi sur la question nationale. Ben Mohamed faisait parti du courant lambertiste qui, déjà en 1954, avait soutenu le MNA contre le FLN, alors que l'aile de Michel Raptis dit Pablo, estimait que le FLN était plus représentatif et plus révolutionnaire dans la lutte et nécessitait, à ce titre le soutien du mouvement internationaliste. Ces divergences expliquent les choix de Ben Mohamed et son itinéraire qui le conduira dans les années soixante-dix à créer en compagnie d'autres militants, l'OST, matrice de l'actuel PT. Ben Mohamed a été un militant actif, dévoué, engagé, fidèle à ses principes et à ses idéaux, mais il a toujours préféré l'ombre aux feux de la rampe. Au-delà de ses positions politiques, de ses choix et de leur justesse ou non, Ben Mohamed a été sincère et intellectuellement honnête car tout ce qu'il a fait a été dicté par sa conscience et ses convictions. Repose en paix camarade !
A. G