Algérie - Autres événements culturels

Les cierges de novembre se consument en silence






Les cierges de novembre se consument en silence …
par farouk Zahi

Les trois s’appelaient Abdelkader. Le premier avait pour nom Zelouf, vieux militant de la cause nationale, il s’éteignait en 2005 en Belgique. Il n’avait revu son pays qu’à l’Indépendance en 1962, pour repartir ensuite et pour toujours. Il entretenait des relations avec le défunt Mohamed Boudiaf, qui lui proposait de rentrer au pays en 1992. Il déclinait l’offre et mourait en exil. Il recommandait à son unique fils, âgé d’une cinquante d’années, de mère belge, de le faire inhumer après sa disparition, dans sa ville natale. Le fils n’accompagnait pas la dépouille, il la confiait à la fratrie du disparu. Il exauçait ainsi le dernier vœu de son père.
Le deuxième, Amrane alias, « Zine Ettala »* mourait en novembre 2006 et le troisième, Delaoui vient de tirer sa révérence en ce début du mois d’août. La journée du Moudjahid de cette année, se passera pour la première fois, de lui !
Il naissait avec le PPA en 1937 et comme tous les algériens des villes traditionalistes, il fréquentait l’école coranique. L’éveil nationaliste, le faisait inscrire à l’école badissienne « El Falah » de hadj Mohamed Zerrouk Lograda. L’illustre Cheikh qui fit un pèlerinage pédestre de près de 3 ans au Machrek, ouvrait à son retour, cette école avant gardiste pour l’époque. Il y enseignait les préceptes de la médersa moderne, aussi bien aux garçons qu’aux filles. Huit de ses élèves mouraient les armes à la main. Dès 1955, Abdelkader Délaoui, intégrait l’organisation politique et administrative (OPA) de Palestro (Lakhdaria). Avec Mohamed Badredine pendu plus tard à Dar Echioukh en 1958 et Amrane, il recrutait pour le maquis naissant du Bouzegza. Il appelait de tous ses vœux, l’ouverture d’un front au Sud. Il assistait au marché hebdomadaire de Bou-Saada, au premier contact entre Ouamrane et Ziane. Ce dernier de taille démesurée, donnait cette caractéristique, comme signe d’identification. Ces hommes de l’ombre ne se connaissaient pas encore.

En décembre 1955, il apprenait que le premier maquis est né à Lougsiat. Le groupe commandé par Achour Ziane comprenait 22 éléments. Il constituait le premier noyau de la future Wilaya VI. Ziane premier chef zonal, le chargeait de la jonction des Houamed pour le ralliement à la nouvelle cause. La première réunion se tenait à Ain Melh, un jour de marché. Cette stratégie de jour de marché, trompait la vigilance de la gendarmerie. A leur retour le soir, ils étaient interceptés par des gendarmes en faction à l’entrée ouest de Bou-Saada. Interrogés sur leur présence à Ain Melh, Abdelkader Délaoui, seul lettré, se faisait passer pour un scribe, qui accompagnait le groupe d’hommes, pour la rédaction d’une transaction. Les gendarmes crurent en ses propos.
Dès 1957 et ne pouvant dissimuler plus longtemps son activisme, il rejoignait le maquis jusqu’au recouvrement de la souveraineté nationale. Membre actif de « Faoudj El Fadila » des Scouts Musulmans, il créait le premier théâtre militant,
Il rejoignait en 1963, l’Ecole normale de Bouzarèa pour une carrière d’enseignant. Créateur littéraire, il écrivait et montait plusieurs pièces de théâtre éducatif. Il était l’auteur de plusieurs chants patriotiques, dont « Min Adjila y a Watani, Qawamtou fi Siri ou A’alani », mis en musique par Mohamed Chemissa en 1983. Après avoir bénéficié de sa mise à la retraite, miné par la maladie, il s’asseyait longuement au seuil de sa porte. Assis à même le sol, à la manière des talebs sur une « haidoura », il ne manquait jamais de proposer un café ou un thé selon le moment aux passants de son voisinage. Il ne ratait aucun vernissage au musée Nasreddine Dinet. Affable et peu prolixe, on le rencontrait de moins en moins, la maladie l’a réduit à la réclusion. La mort a eu raison de lui…qu’il a tant bravée !

Les fils de la Toussaint nous quittent en novembre*
El Watan du 24 /12/2006
Le Quotidien d’Oran du 08/01/2007


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