Algérie - Actualité littéraire

Le romancier Riadh Hadir : « L’idée reçue selon laquelle l’Algérien n’aime pas lire est erronée »



Le romancier Riadh Hadir : « L’idée reçue selon laquelle l’Algérien n’aime pas lire est erronée »
Né en 1982 à Oran et finaliste du prestigieux prix Mohamed Dib, Riadh Hadir est considéré comme l’un des futurs espoirs de la littérature algérienne, voire maghrébine. Justement, le Maghreb et l’Afrique sont deux repères, voire deux constantes d’inspiration pour l’univers littéraire de ce romancier qui vient de publier son premier roman Pupille, chez ANEP Éditions. Pupille est décrit comme une dystopie futuriste doublée d’une satire sociale. L'histoire se déroule dans un futur plus ou moins proche au Nouveau Maghreb, après un grand conflit global qui a enflammé le monde. Dans cet après-guerre régi par l’absurde, l’abrutissement des masses et les lois du marché dominent tous les aspects de la vie quotidienne… Dans cet entretien, l’auteur nous invite à son univers littéraire réel et virtuel, et nous fait partager certains de ses rêves, ambitions et ses projets.

El Moudjahid : Décrivez-nous les circonstances et le contexte qui vous ont inspiré ce roman « Pupille » ?
Riadh Hadir : Pupille » est un roman d’anticipation qui tourne autour de deux thématiques que nous vivons au quotidien. L’une, centrale, est la problématique de la foi et de son dévoiement systématique par les hommes en système organisé. Pratiquer sa foi et croire en la paix, loin de la standardisation de masse est devenu virtuellement impossible.
L’autre thématique, qui m’est plus personnelle, est disséminée tout le long du roman. Il s’agit de l’appartenance indiscutable du Maghreb au continent africain, et du dédain qu’éprouvent les populations du nord pour cette identité si évidente. Ces deux thèmes finiront par se télescoper dans le récit afin d’apporter une ébauche de réponse. L’ensemble baigne dans un univers assez vaste que j’explore par le biais d’interludes venant ponctuer et contextualiser le récit central.

Après une tournée nationale de vente dédicace, comment le public a accueilli votre roman ?
La tournée est loin d’avoir été nationale. J’ai promu ‘’Pupille’’ dans quelques villes d’Algérie, donné des conférences animées par des modérateurs de marque, tels que Kamel Daoud, Bouziane Benachour ou encore Sid-Ali Sekhri, et je travaille en ce moment même à l’organisation d’autres rencontres à travers le pays, notamment à l’est et au sud. Ce qui est dommage, c’est que ces rencontres sont difficiles à organiser. Pourtant, le public est toujours présent, toujours avide de faire la connaissance d’un auteur et de ses idées, et toujours à l’affût de nouvelles lectures. L’idée reçue selon laquelle l’Algérien n’aime pas lire n’est que ‘’foutaise’’. Il est vrai qu’il existe dans notre pays une certaine apathie face au livre, et même un certain dédain envers les auteurs algériens. Mais cela est dû à la manière, souvent rébarbative, de présenter les livres au public. J’ai moi-même reçu des retours très favorables de lectrices et lecteurs occasionnels qui ont repris goût à la lecture régulière grâce à ‘’Pupille’’, et qui ont même découvert d’autres auteurs et une autre manière d’appréhender la lecture en me suivant sur les réseaux sociaux.

Des contacts avec des maisons d'édition pour traduire et éditer votre roman à l’étranger ou sa traduction en d'autres langues à commencer par l’arabe ?
J’ai eu quelques discussions oui, mais tant que rien n’est sur papier, je préfère ne pas en parler.
Ce que je tiens à dire, c’est que je souhaite que ‘’Pupille’’ et mes futurs livres soient diffusés en Afrique aussi largement que possible, et que je travaille activement dans ce sens.

Quel est votre rapport avec la littérature ?
Je pense qu’une personne qui va trouver au fond de son être des émotions complexes, des désirs enfouis, des questionnements anxiogènes et les traduit sous forme de mots et d’idées, pour finir par nous les livrer dans un condensé d’elle-même mérite le respect. J’ai un rapport tout particulier avec la fiction, cette capacité à créer des univers riches et entiers qui, je pense, nous définit en tant qu’humains.

Quelles sont vos références littéraires algériennes et universelles ? Qui aimez-vous lire ?
Pour citer le mensonge de l’un de mes héros, je répondrai : ‘’Je ne lis pas, j’écris ! ». J’aimerais dire que je lis tout ce qui me tombe sous la main, mais ce n’est plus le cas depuis un moment, par manque de temps. J’aime les lectures inhabituelles et non convenues, et je fuis les tendances comme la peste. C’est pour cela que je passe mon temps chez les bouquinistes, à la recherche de culture et d’influences obscures et surprenantes. C’est peut-être pour cela que Pupille échappe aux formats ambiants…
Dernièrement, j’ai entamé le roman historique « Askania Nova », de Lisa Heiss, l’histoire romancée de la réserve naturelle établie en Ukraine par un colon allemand qui souhaitait préserver une nature qu’il savait menacée par l’homme. C’était au dix-neuvième siècle. Un visionnaire inconnu en somme.

Êtes-vous tenté par l'écriture théâtrale ?
Très. J’ai lu énormément de pièces de théâtre à l’adolescence, et cela m’a beaucoup servi dans mes tentatives scénaristiques ultérieures. Si je trouve les bonnes personnes pour développer un projet dans ce sens, je n’hésiterai pas une seconde !

Travaillez-vous en ce moment sur un autre roman ?
Je travaille en parallèle sur deux projets. Un nouveau roman et un recueil de nouvelles. Les nouvelles feront le bonheur des lecteurs de ‘’Pupille’’ qui me réclament une suite. Pour le second roman, j’ai emprunté une autre voie et une méthodologie différente. Il sera plus sombre, plus personnel et, je l’espère, encore plus surprenant.

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