Algérie - Emir Abdel Kader

La vie de l'Emir Abdelkader


La vie de l'Emir Abdelkader

Abd el-Kader (en arabe: ‘Abd al-Kadir b. Muhyi l-Din al-Hasani), né en 1808 à la Guetna de l’oued al-Hammam, à l’ouest de Mascara (ou Mouaskar, Algérie), appartenait à une famille d’origine chérifienne qui dirigeait une zawiya (sorte de couvent) de la confrérie des Kadiriyya.

L’éducation religieuse qu’il reçut fit de lui un musulman mystique et un théologien. Mais les circonstances le transformèrent en guerrier. Devenu soldat pour défendre la terre d’Islam, sa tentative de créer un État indépendant devait laisser un souvenir prestigieux: il est célébré aujourd’hui comme le fondateur de la nation algérienne.

Proclamé "sultan des Arabes" par quelques tribus de l’Oranie le 22 novembre 1832, Abd el-Kader s’imposa par une victoire sur les milices de l’ancien bey turc et mena avec bravoure, pendant quinze ans, la guerre sainte contre les Français. Jusqu’en 1838, toutefois, ceux-ci l’aidèrent à asseoir sa souveraineté sur les deux tiers de l’Algérie. Les généraux français, Desmichels puis Bugeaud, après l’avoir combattu, crurent devoir négocier avec lui dans l’espoir d’instaurer un protectorat.

Abd el-Kader en profita pour étendre son autorité dans les provinces d’Oran, d’Alger, du Titteri et jusque dans le Constantinois et organiser un État arabe. Les fondements en furent essentiellement islamiques et les dirigeants recrutés parmi l’aristocratie religieuse, ce qui entraîna l’opposition de la noblesse d’origine militaire, les jawada , et la méfiance des tribus kabyles, jusque-là quasi indépendantes. Abd el-Kader commença pourtant à unifier son État en supprimant la distinction traditionnelle entre tribus makhzen privilégiées et tribus sujettes exploitées, puis en percevant partout comme impôt la zakkat (dîme coranique). Il le fortifia en le dotant d’une armée de 10 000 volontaires rétribués, d’une ligne de places fortes et d’une capitale, Tagdempt.

Lorsqu’il crut que le temps jouait en faveur des Français, il reprit la lutte en novembre 1839 et envahit la Mitidja, où étaient déjà installés des colons. Une grande guerre s’engagea, au cours de laquelle il tenta par la mobilité de ses troupes de suppléer à leur infériorité numérique. Vaincu au terme de quatre années de combats, affaibli par la soumission de nombreuses tribus, il dut se réfugier au Maroc à la fin de 1843, mais il réussit à entraîner le sultan ‘Abd al-Rahman dans la guerre contre les Français. Après les bombardements de Tanger et de Mogador et la défaite de l’armée marocaine à la bataille de l’Isly (14 août 1844), le sultan se résigna à la paix. Abd el-Kader, déclaré hors la loi au Maroc, se cantonna près de la frontière algérienne puis, profitant de nouveaux mouvements insurrectionnels déclenchés par la confrérie des Taibiyya en 1845, il reparut en Algérie. Ses succès (Sidi Brahim, 23 sept. 1846) firent craindre aux Français son triomphe définitif. L’armée française, forte de 106 000 hommes répartis en dix-huit colonnes opérant simultanément, parvint à le rejeter de nouveau au Maroc. Le sultan, qui redoutait désormais en lui un compétiteur, le fit pourchasser. Alors l’émir des Croyants préféra se rendre aux Français, le 23 décembre 1847.

Manquant à la promesse qui lui avait été faite de le transporter avec les siens à Alexandrie, le gouvernement de Guizot, puis ceux de la IIe République, tout aussi méfiants, le retinrent prisonnier en France. Mais de nombreux Français lui témoignèrent égards et amitié. Le prince-président Louis-Napoléon, homme généreux, fut de ceux-là: le 16 octobre 1852, il vint lui-même annoncer à l’émir sa mise en liberté et un traitement digne de son rang pour s’établir à Brousse en Turquie.

Ces cinq années de séjour forcé en France révélèrent cependant à Abd el-Kader ce qu’étaient la civilisation et la religion chrétiennes et expliquent peut-être qu’il ait pu songer plus tard à un rapprochement islamo-chrétien.

Dans la troisième partie de son existence, qui se déroula tout entière dans le Proche-Orient, de 1852 à 1883, Abd el-Kader se consacra presque exclusivement à l’étude et à la méditation religieuses. Cette orientation répondait à une vocation profonde; dès sa jeunesse, il avait manifesté le goût de l’oraison et de l’exercice mystique. à Brousse, il rédigea un traité de philosophie religieuse à l’usage des chrétiens qu’il intitula Rappel à l’intelligent, avis à l’indifférent. Installé à Damas, où il vécut de 1855 jusqu’à sa mort, il prit figure de maître spirituel: son enseignement y fut recueilli. Une partie de ses propos et de ses commentaires écrits a été publiée sous le titre Le Livre des haltes (mystiques), très partiellement traduit en français. Cet ouvrage, dont la splendeur littéraire frappe, révèle la profondeur du mysticisme de l’émir. Il s’y affirme disciple d’un des plus grands soufis de l’Islam, Ibn ‘Arabi, le Shaykh al-akbar (ce qu’on a pu traduire par Doctor maximus de la gnose islamique). Ainsi s’explique la volonté d’Abd el-Kader d’être inhumé à Damas près de la tombe d’Ibn ‘Arabi.

Bien qu’il se tînt désormais à l’écart des affaires politiques, Abd el-Kader s’occupait activement de la colonie des muhajirin (émigrés pour la foi) algériens qui affluaient à Damas. Cela l’obligea à solliciter parfois l’aide de l’empereur Napoléon III. Mais s’il intervint, en juillet 1860, lors des émeutes antichrétiennes de Damas, ce fut seulement, expliqua-t-il, "par devoir de religion et d’humanité". En prenant sous sa protection et celle de ses Algériens plusieurs milliers de maronites et d’Européens, il leur permit d’échapper aux massacres.

Ce geste, qui eut un grand retentissement en Europe, attira à nouveau l’attention sur lui. Il fut décoré de l’ordre de Pie IX et reçut la grand-croix de la Légion d’honneur. La franc-maçonnerie lui proposa de le compter parmi les siens et l’émir, qui voyait en elle une institution de haute spiritualité religieuse, accepta d’être initié le 18 juin 1864. Lors de l’expédition militaire française en Syrie (août 1860-juin 1861), certains publicistes français, plus ou moins officieux, suggérèrent de le placer à la tête d’un futur empire de nationalité arabe. Une étude anonyme s’intitulait: "Abd el-Kader empereur d’Arabie" (1860). Or Napoléon III rêvait bien de son côté de reconstituer, au sein de l’Empire ottoman ou contre lui, une "nation arabe", et il songeait à Abd el-Kader comme souverain d’une Syrie arabe. Mais l’émir algérien, averti que les troupes françaises voulaient venir à Damas, se déroba. En août 1865, Napoléon III, qui pensait toujours à faire de la Méditerranée une zone d’influence française, le fit à nouveau sonder "au sujet de la constitution en Syrie d’un État arabe indépendant dont il aurait été le souverain". Abd el-Kader répondit que depuis 1847 "sa mission était finie: Dieu lui-même lui avait ordonné de déposer les armes".

Pour les mêmes raisons, malgré les craintes des Français d’Algérie et les espérances de certains Algériens, il ne songea nullement à rentrer en Algérie. Les bruits qui circulèrent en France sur la possibilité de l’introniser comme souverain d’un royaume arabe d’Algérie ne reposaient que sur des malentendus. Enfin, en 1871, Abd el-Kader désavoua publiquement les intrigues antifrançaises de son fils aîné et blâma ceux qui se servaient de son nom pour soulever l’Algérie. Il n’y a pas lieu de supposer que ses lettres de condamnation soient apocryphes ou qu’il fût devenu un agent de la France: Abd el-Kader agissait en mystique que Dieu avait arraché au monde de la politique. Il mourut à Damas le 26 mai 1883. Après l’indépendance de l’Algérie, son corps a été transporté au cimetière des "martyrs" à Alger.

 

GENEALOGIE DE L'EMIR ABDEL KADER :

Dans la plaine d'Eghris, près de Mascara vivait une famille de chorfa, installée dans la tribu des Hachem. Abdelkader a donné la généalogie de cette famille :

"Je suis Abdelkader, fils de Mahieddine, fils de Mustapha, fils de Mohamed, fils de Mokhtar, fils d'Abdelkader, fils d'Ahmed, fils d'Abdelkaoui, fils de Youssef, fils d'Ahmed, fils de Chabân, fils de Mohamed, fils d'Edris ben Edris, fils d'Abdellah, fils de Hassen, fils de Houssein, fils de Fatma, fille de Mohamed le prophôte de Dieu, et épouse de Ali ben Abi Taleb, cousin du prophète.

Nos aïeux deumeuraient à Médine-la-noble et le premier d'entre eux qui émigra fut Edris le Grand, qui devint sultan du Maghreb et construisit Fez. Sa Postérité s'étant augmentée, ses descendants se séparèrent et c'est seulement depuis l'époque de mon grand-père que notre famille vint s'établir à Ghris près de Mascara.

Mes aïeux sont célèbres dans les livres et dans l'Histoire par leur science, leur respect de Dieu."

Dans la région où la vraie noblesse a toujours été la nobless religieuse, cette ascendance auréolait cette famille d'un préstige considérable. Avec l'âge, Abdelkader n'accorda pas autant d'importance à sa généalogie :

"Ne demandez jamais quelle est l'origine d'un homme, interrogez plutôt sa vie, ses actes, son courage, ses qualité et vous saurez ce qu'il est".

C'est le cas de l'Emir, l'oeuvre témoigne de la valeur de l'Homme.

 

ENFANCE DE L'EMIR ABDEL KADER

Le père d'Abdelkader, Si Mahieddine, avait établi sa résidence sur la rive gauche de l'oued El Hammam. C'est là, au commencement de l'année 1223 Hégrite, en 1808, que naquit Abdelkader et qu'il vécut sa première enfance au milieu d'un monde de labeur, de piété etde courage. L'enfant, tout en apprenant la lecture, les subtilités de la grammaire et la science du coran, s'exerçait à la vie rude des chevaliers et pratiquait les sports.
Le cadi d'Arzew, Si Ahmed ben Tahar, fut chargé de l'initier aux sciences modernes : Astronomie, calcul, géographie. Il le mit également au courant des affaires européennes. Abdelkader était apte aussi bien à l'etude qu'à l'art militaire. Cavalier émérite, il était déjà l'objet de l'admiration des hommes de sa tribu.
A quatorze ans, Abdelkader fut envoyé à Oran dans une école dirrigée par Si Ahmed Khodja, pour y compléter son éducation. Il y resta peu de temps, écoeuré par les désordres, les moeurs dissolues de la ville et par les abus de la milice turque. Après un an, il retourna à la Guetna pour parfaire son instruction au milieu des tolbas dont son père Mahieddine était, en même temps que le maître, le mécène.
Il se maria avec Lalla Kheira, la fille de son oncle paternel Sidi Ali Bou Taleb. Mais Abdelkader n'était pas déstiné à goûter longtemps le plaisir et la tranquillité de la vie familiale. Une mission l'attendait.


JEUNESSE DE L'EMIR ABDEL KADER :

En 1926, Si Mahieddine décida d'aller à la Mecque accompagné d'Abdelkader, à qui il voulait voir conférer le titre préstigieux de Hadj. Et ce fut le long et beau voyage dont rêvent tous les fidèles : les hautes plaines Algériennes, la Tunisie, où l'Emir connut le raffinement de la vie citadine dans la capitale Hafcide, l'embarquement pour l'Alexendrie et le Caire, où Abdelkader admira les efforts du pacha d'Egypte, Mohamed Ali, pour moderniser son pays, le doter d'une agriculture moderne et le pouvoir d'une armée puissante, et enfin, les deux villes saintes la Mecque et Médine.

Aprèes avoir accompli les rites du pèlerinage, Mahieddine et son fils gagnèrent Bagdad et rendirent visite au tombeau de Sidi Abdelkader el Djilani. Ils rentrèrent en Algérie vers le milieu de 1929.

Le séjour d'Abdelkader en Orient lui avait permis de visiter de nombreux pays, d'apprécier de nombreux gouvernements et d'avoir une conscience plus nette de la communauté musulmane. Nul doute qu'il en rapporta des idées et des vues qui l'aidèrent dans la mission qui l'attendait en Algérie.

 

ABDEL KADER, L'HOMME :

L'Emir était de taille moyenne, vigoureux, bien musclé. Mais cet homme qui pouvait rester trente-six, voire quarante-huit heures, en selle, qui bravait les boulets de canon et les balles, qui chargeait comme le plus simple de ses cavaliers, avait dans sa physionomie un mélange d'énergie et d'ascétisme qui répandait sur son visage un charme indéfinissable.

Léon Roches qui l'a bien approché fait de lui ce portrait : "Son teint blanc a une pâleur mate : son front est large et élevé. Des sourcils noirs et bien arqués surmontent les grands yeux bleus qui m'ont fasciné. Son nez est fin et légèrement aquilin, ses lèvres minces sans être pincées, sa barbe noire et soyeuse encadre légèrement l'ovale de sa figure expressive. Un petit tatouage entre les deux sourcils fait ressembler la pureté de sont front, sa main maigre et petite est remarquablement blanche, des veines bleues la sillonnent, ses doigts longs et effilés sont terminés par des ongles roses parfaitement taillés, son pied, sur lequel il appuie presque toujours une de ses mains ne lui cède en rien ni en blancheur ni en distinction. Sa taille n'excède pas cinq pieds et quelques lignes (170 cm) mais son système musculaire indique une grande vigueur".

Toustain du Manoir nous fait la même description : "C'est un homme de taille moyenne et qui a bonne tournure. Son teint est blanc, un peu pâle. Sa barbe noire assez bien fournie mais courte. Son front est découvert et un peu bombé. Les yeux d'un gris vert extrêmement clair. Il a le nez aquilin fort bien fait et une jolie bouche. En somme sa figure est agréable et prévient en sa faveur".

Son costume était simple, une chemise en coton, par dessus une gandoura en laine, un chèche de laine fine et blanche fixé par une corde en poils de chameau autour de sa tête et un burnous blanc recouvert quelquefois d'un burnous brun. Pour tout ornement, un chapelet qu'il égrainer tout en murmurant ses prières. Il portait toujours le costume national et avait interdit à ses hommes d'orner leurs vêtements.

Sa tente est grande mais ressemble à celle de toutes les autres tentes. Voyant une fois sa femme vêtue d'un riche caftan dans une tente couverte de tapis et de coussins recouverts d'étoffes en brocard et en soie, l'Emir s'écria : "Cette femme n'est point ma femme, cette tente n'est point ma tente. Ma femme ne revêt que les étoffes qu'elle a tissées". Caftan, tapis, coussins disparurent, remplacés par le costume en laine, les nattes de Mascara et les coussins en peau de gazelle.

Si Kadour ben Rouila, soldat poète qui avait été blessé à Alger en 1830 et qui avait rejoint Abdelkader pour être son secrétaire particulier, fit le meilleur portrait moral de l'Emir : "El Hadj Abdelkader n'aime pas le monde, il s'en éloigne le plus qu'il lui est permis de le faire, il se nourrit très sobrement, il est toujours vêtu simplement, il se lève la nuit pour recommander son âme et l'âme de ses serviteurs au tout-Puissant : il n'aime qu'à prier Dieu et qu'à jeûner, afin de s'absoudre de tout péché. Il craint Dieu, il est poli avec tout le monde, il n'aime pas faire le grand avec les esclaves de Dieu : il est noble et ne le fait pas paraître : il est très honnête et ne veut jamais rien prendre pour son compte dans le trésor public : il rend la justice au plus humble des musulmans, il ne quitte presque jamais la mosquée…Il ne doit, il ne mange, il ne s'habille que selon ce qui est ordonné par la religion… Sa justice est tout à la foi douce et rigoureuse, ses décisions sont conformes aux paroles des meilleurs livres; il n'est pas indulgent pour celui qui a commis une faute grave, il punirait son fils s'il était mis dans le même cas, il déteste l'homme qui ne suit pas le droit chemin, mais il aime celui qui pratique sa religion et qui ne fait tort à personne, il l'aime pour Dieu et non pour lui; il détesterait son plus proche parent, s'il commettait une faute contre Dieu".


ABDEL KADER, LE GUERRIER :

Abdelkader était déja connu non seulement comme un homme d'une piété fervente, d'une grande culture, à la parole entraînante, mais aussi comme un cavalier accompli.
Les premiers combats auxquels il participa comme simple moudjahid révélèrent le guerrier et consacrèrent son courage millitaire. Chargeant au milieu des lignes françaises, il avait failli être prisonier, son cheval ayant reçu sept coups de baïonnette; une autre fois il était allé sous un feu terrible ramener son neveu blessé. Donnant l'exemple, il avançait jusqu'aux postes français, allant jusqu'à rester au milieu du champs de bataille défiant les canons ennemis afin d'habituer les combattants à ne pas craindre l'artillerie française.


ABDEL KADER, EMIR :

L'absence d'autorité temporelle, les chefs des tribus makhzen, les Douairs et les Zmala traitaient avec l'envahisseur, les garnisons turques retirées dans la citadelle du Méchouar de Tlemcen refusaient de combattre. L'Oranie étant privée de tout pouvoir régulier, amena les tribus réunies le 21 novembre 1832 à Ersebia, dans la plaine d'Eghris, à offrir le pouvoir à Si Mahieddine. Touché jusqu'aux larmes, Si Mahieddine refusa :

"Si tu ne veux pas nous commander, donne-nous pour sultan le fils de Zohra (Abdelkader), qui est un homme de poudre", lui dit l'Assemblée.
Si Mahieddine refusa de nouveau. Mais, le 22 novembre, sollicité avec plus d'insistance, ayant sondé son fils sur la manière de gouverner s'il était appelé à commander et ayant eu la réponse suivante :
"Je gouvernerais, le livre de la loi à la main et si la loi me l'ordonnait, je ferais moi-même une saignée derrière le cou de mon frère".
Si Mahieddine s'inclina et présenta au peuple le vouveau chef :
"Voilà le sultan annoncé par le prophète. C'est le fils de Zohra. Obéissez-lui comme vous m'obéissez à moi-même. Que Dieu vienne en aide au sultan".
La résistance avait trouvé un chef. Il sera digne d'elle.


Bugeaud et l'Emir
Le général bugeaud nommé à Oran négocie un nouveau traité avec l'Emir, le traité de Tafna est signé le 3 Mai 1837. L'Emir contrôle désormais l'Oest, le tetteri et une partie de l'Algérois. Il consolide l'état, bâtit des villes fortifiées, fonde des ateliers militaires, soumet les rebelles et les collaborateurs. Le traité donne lieu à des contestations avec le gouverneur Vallée et la guerre reprend en novembre 1839. Bugeaud nommé gouverneur, veut occuper tout le pays, il pratrice la méthode de la " terre brûlée ", détruisant toutes les villes, les récoltes, les troupeaux...L'Emir résiste avec énergie, remporte de brillants succès comme celui de Sidi Brahim ( 23 Septembre 1845 ). Mais le pays est ruiné, les tribus sont épuisées, le soutien du Maroc fait défaut. L'Emir décide d'arrêter la guerre et choisit l'exil ( décembre 1847). Le gouvernement français accepte de le transporter en Orient.


La prison et l'exil
L'engagement français n'est pas respecté. L'Emir est conduit à Toulon , puis à Pau et Amboise. Il est considéré comme prisonnier d'état jusqu'à octobre 1852, date à laquelle Napoléan III vient enfin le libérer. Il s'embarque pour la Turquie et s'installe à Brousse, puis se fixe définitivement à Damas où il reçoit un accueil triomphal. En dehors de quelques voyages et d'un nouveau pèlerinage, il ne quitte plus la Syrie et consacre son temps à la méditation, à la prière, à l'enseignement et aux oeuvres de bienfaisance.

Le 16 septembre 1852, Napoléon III rend la liberté à celui qui vient de passer plusieurs années en résidence surveillée à Toulon, à Pau et Amboise. Avant de prendre le chemin de l’exil, richement pensionné par un empereur devenu son ami, Abd el-Kader arrive à Paris et devient « le lion de nos réjouissances publiques », pour reprendre les termes d’un journaliste de l’époque. Dans la loge impériale de l’Opéra où l’on donne le Moïse de Rossini, Napoléon III embrasse le « Vercingétorix algérien ». Le Tout-Paris s’émeut, applaudit à tout rompre. Pendant deux semaines, nimbé d’une extraordinaire popularité, l’émir est véritablement la coqueluche des Parisiens. Pour montrer la tolérance de l’islam, il se rend à Notre-Dame, à la Madeleine et à Saint-louis des Invalides. Reçu par tout ce que Paris compte de sociétés savantes et par le Grand Orient de France, il estime que religion et raison ne sont pas antinomiques. En 1867, sur l’invitation de l’empereur, il retrouve le Paris de l’Exposition universelle et est reçu avec faste par les autorités françaises. à‚gé et fatigué, il décline alors l’offre de Napoléon III qui lui propose d’être le monarque d’un « Royaume arabe » de Syrie.

En 1860, les émeutes de Damas lui fournissent l'occasion de l'illustrer comme un personnage hors série. Il sauve des milliers de chrétiens du massacre et fait reculer les émeutiers. Plusieurs chefs d'état lui adressent des félicitations et des décorations, notamment ceux d'Angleterre, de Russie, de France... Célèbre et honoré , il s'éteint à Damas le 26 Mai 1883. Une foule considérable assiste à ses funérailles.


Abd el-Kader en Turquie (1853 - 1855)

Abd el-Kader et sa suite débarquent à Istanbul le 7 janvier 1853. 10 jours plus tard, ils se rendent à Brousse (Bursa), au sud de la mer de Marmara, qui sera pour deux ans leur lieu de résidence. Jusqu’à sa mort, Abd el-Kader restera en rapport avec les autorités consulaires françaises dans l’empire turc, chargées de lui transmettre la pension de 150 000 F. que lui accordait le gouvernement français, mais aussi de surveiller ses moindres faits et gestes, par l’intermédiaire d’un interprète chargé de l’espionner jusqu’en 1857.

Durant le reste de son existence, Abd el-Kader se consacra à une activité intellectuelle et religieuse, prolongeant l’éducation de ses enfants par un enseignement qui fit de lui un maître spirituel renommé dans le monde musulman. Un certain nombre de ses élèves devinrent des penseurs importants, mystiques ou politiques, précurseurs du nationalisme arabe.


Abd el-Kader à Damas

Il se consacre à la religion et à la littérature. La protection qu’il accorde à des chrétiens menacés lui vaut une très grande popularité en Occident.

En décembre 1852, Abd el-Kader quitte la France après avoir fait le serment de ne jamais retourner en Algérie. Jusqu’à la fin de sa vie, il recevra une pension du gouvernement français. Accompagné de toute sa famille, il s’embarque à Marseille pour la Turquie. Il vit d’abord à Bursa. En 1855, il s’installe définitivement à Damas [1] où se trouve le tombeau du grand mystique musulman Ibn `Arabi [2]. Des Algériens le rejoindront, constituant autour de lui une petite colonie d’exilés.

Abd el-Kader se consacre alors à la religion et à la littérature. Il réunit des livres précieux, fait rechercher les manuscrits d’Ibn Arabi qu’il entreprend d’éditer. Il écrit des ouvrages, des poèmes, enseigne et commente les grands textes coraniques à la mosquée ou dans les confréries.

L’enseignement de l’émir est un modèle de tolérance : tout individu en prière, qu’il soit juif, musulman, chrétien ou même idolâtre prie un seul et même Dieu unique. C’est la théorie du wahdat al-wujud, de l’unicité absolue de l’essence divine, qu’il développe notamment dans son œeuvre majeure, Kitâb al-mawâqif (Le Livre des haltes, des stases, des états et des étapes) : "Dieu est l’essence de tout adoré et tout adorateur n’adore que Lui." Mais il va plus loin encore qu’aucun homme de foi ou de religion avant lui : toutes les prières, enseigne-t-il, s’adressent au Dieu unique, seule la forme diverge car chaque peuple a reçu la parole divine selon le mode spécifique qui lui correspondait :

Pour qui le veut le Coran [...]
Pour qui le veut la Torah
Pour tel autre l’Évangile
Pour qui le veut mosquée où prier son Seigneur
Pour qui le veut synagogue
Pour qui le veut cloche ou crucifix
Pour qui le veut Kaaba dont on baise pieusement la pierre
Pour qui le veut images
Pour qui le veut idoles
Pour qui le veut retraite ou vie solitaire
Pour qui le veut guinguette où lutiner la biche.

 

Les émeutes de Damas

En 1856, l’empire ottoman instaure une sorte de citoyenneté sans référence à la religion, assurant aux chrétiens les mêmes droits qu’aux musulmans. Cette clause entraîne des émeutes au Liban et en Syrie. En 1860, des chrétiens maronites sont massacrés ; Abd el-Kader, aidé de ses fils et de ses compagnons, s’emploie à les protéger et leur offre l’asile. Ce geste lui vaut une immense popularité en Occident.

Abd el-Kader arrive au secours des chrétiens à Damas, en 1860

Sous le Second Empire, Abd el-Kader revient trois fois en France, en 1855, en 1865 et en 1867 à l’occasion de l’Exposition universelle de Paris. Napoléon III lui propose de prendre la tête de l’État arabe qu’il envisage de créer en Syrie à la suite du démembrement de l’empire ottoman. Abd el-Kader refuse catégoriquement la proposition de l’empereur.

Abd el-Kader et le canal de Suez (1864 - 1869)

Parmi les amitiés communes à Abd el-Kader et à Napoléon III figuraient des disciples du comtedeSaint-Simon(1760 - 1825), adepte d’un socialisme non étatique accordant une large place à l’entreprise privée. Le projet de percement du canal de Suez, de l’ingénieur Ferdinand de Lesseps, saint-simonien fervent, a séduit Abd el-Kader qui espérait un apport réciproque entre la technologie européenne et l’esprit de l’Islam. Ainsi fut-il associé au projet initial, qui englobait la mise en valeur agricole des terrains proches du canal par la main d’oeuvre que souhaitait recruter Lesseps en Syrie, avec l’aide d’Abd el-Kader. Cet aspect du projet n’aboutit pas, mais il permit à Abd el-Kader de figurer parmi les invités officiels de la France lors de l’inauguration du canal, le 17 novembre 1869.

La défaite de la France en 1870 et l’effondrement du second empire, suivis de la révolte sévèrement réprimée de Mokrani en Algérie en 1871, furent douloureux pour Abd el-Kader et contribuèrent à l’écarter de la vie politique pour ne plus s’occuper que d’oeuvres pieuses et de recherches personnelles jusqu’à sa mort, à Damas, le 26 mai 1883.

De janvier 1863 à juillet 1864, il effectue un long pèlerinage à La Mecque et Médine, occasion d’approfondir sa foi.

Abd el-Kader s’éteint à Damas, le 26 mai 1883. Il est inhumé à côté de la tombe d’Ibn `Arabi, dans une mosquée de Damas.

1966 : Transfert des cendres d’Abd el-Kader de Damas à Alger. Au lendemain de son indépendance (1962), l’Algérie élève Abd el-Kader au rang de héros fondateur de la nation.

Le 5 juillet 1966, un avion en provenance de Damas en Syrie rapportait à Alger les cendres de l’émir, décédé à Damas en 1883. Ce retour fut accueilli triomphalement par la population.




assalamou âlaykoum
kiredine lala - pour mon compte - souk-ahras, Algérie

15/08/2015 - 273012

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