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L'apport de la chanson engagée dans le combat démocratique



«Les conditions sociopolitiques et l'ostracisme du régime font que les chanteurs dénoncent l'injustice et le déni identitaire», a déclaré l'artiste Karim Abranis.L'apport de la chanson engagée dans le combat démocratique a été au centre des débats, à l'occasion de la 2e édition du festival «L'été en poésie et en musique» (Anevdu s tmedyezt d uzawan) organisé fin septembre au village Tadert Oufella. Ramdane Lasheb, auteur-chercheur, a abordé dans son exposé la poésie de guerre des femmes kabyles. Selon lui, «ces poèmes sont utilisés pour galvaniser les moudjahidine, lors de leurs passages dans les villages. Les poèmes se créaient dans l'action des événements».
Et d'ajouter : «La gent féminine sera alors, avec ces poèmes, un segment très profitable à la Révolution. Ces poèmes war isem, inconnus, seront finalement des documents qui auront deux fonctions, historique et linguistique.» L'historien Younès Adli a animé une conférence ayant pour thème «70e anniversaire de la crise berbériste de 1949».
Il a expliqué les deux facteurs qui ont présidé à son déclenchement. «Vu la divergence de projet de société, très tôt, des hommes ont pensé à l'Algérie de demain, une fois libérée, le cas de Ismaïl Hamet en 1906 et Hocine Lehmak en 1931 qui proposèrent l'algérianité, l'africanité et l'universalité. Dans la même année, les oulémas vont les contrer avec arabité et islamité, 1949 cristallisera ces différences en une crise.» Selon lui, «Messali voulait l'action politique et les autres l'action armée, surtout après décembre 1948.
L'Organisation spéciale (OS) allait prendre en main les opérations. Mais en 1949, les jeunes fougueux, comme les Benaï et autres seront chassés et même tués. Quatre cents éléments de l'OS seront arrêtés. Après, on remettait toujours à plus tard le sujet de l'identité, même en 1962».
Le dramaturge Omar Fetmouche s'est intéressé à l'apport de la chanson engagée dans le théâtre algérien, citant Kateb Yacine et Alloula. Pour l'ex- directeur du TR de Béjaïa, la chanson engagée a toujours accompagné le théâtre depuis son existence en Algérie et plus particulièrement en Afrique du nord et au Maghreb central.
«Depuis les années 20', la chanson engagée dans toutes ses formes d'expression thématique a toujours accompagné le théâtre de Mahieddine Bachetarzi et Rachid Ksentini, Allalou, Bachdjarrah Djelloul ainsi que les pièces du théâtre radiophonique animées par Mohamed Hilmi et Cheikh Noureddine.»
Il a fait savoir que la chanson engagée sera plus présente dans le théâtre de la Révolution et reprendra généralement tous les chants patriotiques repris notamment dans la troupe artistique nationale durant la lutte de Libération.
«A partir des années 70', Kateb Yacine et Alloula feront de la chanson engagée un élément fondateur de leur théâtre avec la présence permanente du musicien, à l'exemple de Smaïl Habbar dans la troupe de Kateb Yacine et Himour Mohamed dans le théâtre de Alloula. Fidèle au théâtre de combat et de lutte pour les libertés démocratiques, le théâtre amateur fera sien aussi l'appropriation de la chanson engagée qui fera organe naturel dans les pièces du jeune théâtre.»
La chanson engagée a été également abordée lors d'une table ronde animée par Karim Abranis, Belaïd Tagrawla, Malik Kazeoui, Ali Sayad, Ferroudja Saidani. Pour Karim Abranis, «logiquement, le chanteur doit chanter selon son inspiration. Les conditions sociopolitiques et l'ostracisme du régime font que les chanteurs dénoncent l'injustice et le déni identitaire».
Belaïd Tagrawla a parlé des raisons personnelles qui l'ont poussé à faire son premier poème. «C'est le mauvais comportement d'un enseignant oriental, qui a parlé de la future disparition de la langue kabyle qui a fait réagir l'enfant que j'étais.» Tout en rappelant l'engagement des artistes auprès du FLN, pour soutenir la Révolution, il a fait la genèse de la chanson engagée des années 1960, en citant les précurseurs.
Ferroudja Saïdani a retracé l'engagement des premières femmes en allant braver tous les interdits pour chanter. Malik Kazoui : «L'engagement est un apport artistique qui accompagne la voix du peuple avec ferveur. Avec l'évolution du temps, les jeunes artistes se distinguent par leur soutien aux causes humanitaires et écologiques.
Ils sont aussi impliqués dans le processus révol ?Art.» La chanson kabyle dans les supports audio-visuel est l'intitulé d'une autre communication présentée par Belaïd Tagrawla qui en a fait la rétrospective depuis l'année 1910.
Les artistes engagés dans la Révolution, la vague des chanteurs des années fin 60 qui ont défendu tamazight, à l'image du groupe Abranis, Ferhat, Idir étaient parmi les points évoqués. Keltoum Defous a axé son sujet sur la place de la poésie dans l'expression populaire. Hacene Helouane, universitaire a cité Si Muhend U Mhand pour souligner la pérennité du travail culturel.
«Le poète n'est poète respecté que s'il crée et voit ce que n'ont pas créé ou vu les autres. Il doit être visionnaire, sinon rien, à l'exemple de Slimane Azem, celui dont les vues sont encore d'actualité». Hamid Bilek, chercheur, a mis en relief la place de la poésie dans la société.
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