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Gouvernance et citoyenneté: Déchéance de la vie publique



Le gouvernement continue de gérer les ordures dans les collectivités locales à coup de campagnes d'assainissement même si la dégradation de l'environnement emporte des vies humaines.Hier, le ministère de l'Intérieur, des Collectivités locales et de l'Aménagement du territoire (MICLA) a lancé une campagne d'assainissement à travers tout le territoire national. Le pays tout entier croule sous les ordures. Vieux, jeunes, femmes, hommes et enfants ne sont pas gênés de côtoyer les ordures dans leur quotidien. L'on voit dans l'ensemble des quartiers des quatre régions du pays des vieux jouer aux dominos au milieu d'un espace jonché d'ordures. La saleté est entrée dans les m?urs. Elle en est une partie intégrale et intégrante. Les pouvoirs publics pensent éradiquer ce fléau social, économique et environnemental par des campagnes d'assainissement et de nettoiement qu'ils lancent de temps en temps, en général quand la situation politique va mal. C'est exactement le cas.
Le mot «campagne» est par définition «une opération de durée déterminée ayant un but de propagande». Définition qui résume bien la situation dans laquelle se trouve l'Algérie. Le déroulement des épreuves de la CAN est tombé à point nommé pour occuper les foules loin de la politique. Autorités militaires et civiles s'en occupent avec grand intérêt. Ceci, même si «trouhou gaa» lancé par les supporters contre les équipes en compétition avec les Verts est un slogan phare du «hirak». C'est dire que tous les événements sont enchevêtrés les uns dans les autres jusqu'à confondre libertés individuelles et collectives avec rigueur de la gouvernance et de l'Etat. Gérer la saleté à coup de campagnes «à durée déterminée» est un non-sens pour un gouvernement qui a eu déjà à mesurer ses conséquences dramatiques sur l'environnement des collectivités locales et sur les citoyens. En sillonnant le pays en tant que ministre de l'Intérieur, l'actuel 1er ministre a dû se rendre compte de l'état de délabrement dans lequel se trouvent des cités entières nouvellement habitées. Les nouvelles villes comme Sidi Abdallah à l'ouest de la capitale ou Ali Mendjeli au sud de Constantine sont l'exemple d'une conception architecturale moderniste erronée.
Des mouroirs à ciel ouvert
Jeter ses ordures en dehors des heures de passage des camions d'hygiène n'est pas un geste sous-développé mais une nature «citoyenne». Il est donc absurde de vouloir la changer par des mesures de pure propagande. Au regard des vies humaines qui s'en vont à cause de la dégradation des conditions de vie dans les collectivités locales, cette manière de gouverner est synonyme de «non-assistance à personne en danger». Le dragage du port de Sidi Fredj en pleine saison estivale est un crime duquel les autorités locales doivent répondre pour avoir provoqué la pollution de toute une région. Les urgences des hôpitaux avoisinants et autres plus loin sont débordées par l'affluence des parents qui ramènent leurs enfants malades parce qu'ils ont barboté dans l'eau des plages. Le phénomène est récurrent et beaucoup de médecins recommandent aux familles de ne pas aller en bord de mer. En essayant de planter leur parasol, des citoyens ont vu jaillir les eaux des égouts dans une plage de Zéralda. Des enfants ramenés du Sud vers le Nord pour profiter des plages sont sortis de l'eau avec des éruptions de boutons sur le corps... Les plages ne sont pas les seuls mouroirs à ciel ouvert. Des enfants sont morts à Oran et ailleurs parce qu'ils ont été mordus par des chiens errants. De nombreux citoyens souffrent de fièvre, diarrhée et de vomissements à Blida parce qu'ils ont bu d'une canalisation d'eau potable qui s'est mélangée à une autre d'égouts. Les exemples de mauvaise gouvernance sont légion. Il faut compter avec d'autres, de coupures intempestives d'eau potable qui obligent les citoyens à se rabattre sur les citernes ambulantes dont l'hygiène est à méditer…
Les pouvoirs publics sont seuls responsables de cet état de déchéance de la vie publique. Ce sont les démembrements de l'Etat qui, eux seuls, peuvent et doivent obliger au respect des lois, des règlements et des mécanises de gestion des services publics à commencer par les heures de passage de Netcom.
Rigueur de l'Etat contre manque de civisme
Les autorités locales doivent obliger les citoyens à se conformer aux règles imposées par la commune pour la gestion des ordures. Il est clair qu'elles ne peuvent le faire que par des mesures répressives notamment celles obligeant les familles à payer de lourdes amendes en cas d'infraction à «l'ordre public».
Il fut un temps où le gouvernement devait créer une police communale pour régenter la cité. «Ce corps nécessite beaucoup de moyens pour le créer, l'organiser et le faire fonctionner», nous avait répondu Bedoui à ce sujet, il a plus de deux ans. L'on interroge si une police communale coûterait plus cher que des prises en charge quotidiennes de citoyens au niveau des hôpitaux parce qu'ils ont bu de l'eau contaminée ou sont allés à la plage ou la vie d'enfants morts parce que mordus par des chiens errants. La rigueur manque atrocement au niveau des collectivités locales. Les citoyens vivent en dehors de tout règlement civique, dans une anarchie affligeante. En ces temps où les Algériens pensent qu'ils ont été «libérés» par le «hirak», le civisme est devenu synonyme de liberté totale d'action, sans limites de devoirs ni obligations. Il faut avouer qu'il a de tout temps était perçu ainsi tant il a manqué. Un état d'être encouragé par des discours de ministres qui produisent et propagent des illusions. Rien n'a changé depuis la chute des Bouteflika. Les membres du gouvernement, bien qu'ils ne sortent que rarement sur le terrain, continuent de mentir en promettant de garantir des solutions aux nombreux problèmes sociaux qui minent le pays. Seul un Etat de droit pourra s'imposer au nom de la loi pour obliger la collectivité locale (citoyens) à respecter les règles de gestion de la cité. Encore faut-il que le pouvoir en place puisse fixer les missions et les prérogatives à des autorités locales qui fonctionnent hors cadre légal en l'absence d'un code communal et d'un code de wilaya soumis depuis de longues années à une révision profonde et transformés en «loi des collectivités locales» mais n'ont jamais vu le jour.
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