Boumerdès

La salinisation fera perdre 30 000 hectares de plaines côtières




« Pour certains puissants de la nomenklatura, les plages et les montagnes de la wilaya de Boumerdès ne sont qu'un territoire où l'on peut se faire des milliards sans le moindre effort et au mépris de l'avenir des populations de la région. On a concassé les ossements de nos chouhadas tombés au champ d'honneur à Bouzegza pour produire du gravier ; qui peut arrêter ces gens qui saccagent les plages ' » C'est un militant écologiste, il a visiblement le c?ur plein de dépit, qui lâche cette observation.
Dans cette région de Boumerdès, un bien précieux, plus précieux, pour la collectivité, que le pétrole, est quotidiennement détruit dans l'impunité. En plus de la destruction massive des montagnes, le pillage du sable des plages détruit des terres des plaines marines. On estime que 20 000 à 30 000 hectares de terres des plaines côtières seront pollués par le sel et perdues à jamais. Cette salinisation a déjà commencé par la pollution de la nappe phréatique
L'héritage de la décennie noire
Ce pillage du sable marin et le saccage des rivages de Boumerdès, estimés à 80 km par le Commissariat national du littoral, ont été instaurés par les terroristes du GSPC (Groupe salafiste pour la prédication et le combat) au milieu des années 1990. À l'époque, l'ex-émir de la katibate El Ansar, Abdelhamid Sadaoui, qui terrorisait la région de l'est de Boumerdès,a installé une véritable entreprise d'extraction de sable des plages.
C'était une véritable entreprise qui a été mise en place avec son organisation, ses agents (chargement) et ses tarifs de chargement. Cette phalange, la plus puissante du GSPC grâce aux financements engrangés du sable, exploitait les plages situées entre Afir en passant par Dellys, Sidi-Daoud jusqu'à Cap-Djinet, et surtout le lit de l'oued Sebaou dans la commune de Baghlia.
Selon les sources sécuritaires de l'époque, l'émir d'El Ansar avait même élaboré une véritable grille de salaires pour les terroristes permanents et ceux qui collaboraient en diverses occasions (attentats à l'explosif, informations, surveillance, approvisionnement, transport,....) Son acolyte et voisin de la katibate El Arkam a suivi pour exploiter les plages Leghata, Zemmouri El Bahri et Seghirat (Thenia).
Le sinistre émir de la redoutable seriate El Fath qui fournissait, au plus fort de sa puissance, les effectifs et la logistique pour l'organisation des attentats à Alger exploitait le filon de Corso-Boudouaou el-Bahri. Des petites localités isolées et des villages situés sur le long de la RN24 dans l'axe Zemmouri/ Dellys, ? on ne peut pas les citer par respect aux gens honnêtes de ces localités ? on les appelait « la bourse du sable. » C'était des lieux où l'on passait commande.
N'oublions pas, par ailleurs, que pour protéger cette immense rente, le GSPC a assassiné des patriotes, des militaires, des gendarmes et des policiers ou de simples citoyens. Des milliards arrivaient de plusieurs wilayas jusqu'aux plages de Boumerdès et remontaient vers les maquis et les montagnes de Djerrah, Bouberak, Sidi-Ali Bounab, Bouzegza,... Des bandes maffieuses, prêtes à faire usage de violence ont pris le relais. Certains chefs de bandes ont collaboré avec les terroristes. Ces bandes suscitent parfois de la crainte mais jouissent de beaucoup de complicités à plusieurs niveaux. Elles ont installé un système de corruption pour se protéger.
Une anecdote vécue pour souligner la peur qu'elles provoquent. Un jour, nous accompagnions le premier magistrat d'une commune de l'ouest de Boumerdès. Le maire en question voulait que l'on constate de visu les problèmes de sa commune et ses réalisations afin d'argumenter un article.
Arrivé à une centaine de mètres d'une villa cossue, construite illicitement dans un lieu, isolé, pas loin de la RN24, le P/APC avait arrêté net le véhicule et dira : «Nous n'irons pas plus loin.» À notre question de savoir pourquoi, sans hésiter, il avait lâché: «Ce sont des pilleurs de sable. Ils sont dangereux.» Le maire faisait allusion aux habitants de cette villa qui, quelques mois plus tard, avaient provoqué un accident de circulation mortel avec l'un de leurs camions. Nous avons effectivement fait demi-tour.
4 000 hectares déjà perdus
le tourisme subira les
destructions
La salinisation avance inexorablement ravageant des terres à haut rendement. La salinisation survient, pour rappel, lorsque le barrage des dunes de sable est affaibli et que l'eau de mer pollue la nappe phréatique. Second cas de figure, la nappe phréatique proche de la mer est surexploitée,dès lors le vide est comblé par l'eau de mer.
Sont touchées par ce phénomène, les terres agricoles des plaines côtières de Boudouaou el-Bahri, Corso, Zemmouri,Leghata, Cap-Djinet,Sidi-Daoud et, surtout, la plaine de l'oued Sebaou. «La salinité de l'oued Sebaou est en train de devenir un problème écologique très sérieux.
Les dégâts sont constatés par les exploitants de terres agricoles. Chaque année, la concentration des sels augmente dans le cours d'eau au détriment de l'eau douce qui recule à une vitesse importante», lit-on dans un document de la DSA (Direction des services agricoles) de la wilaya de Boumerdès.
Dans le même document, on apprend par ailleurs que « plus de 4 000 hectares de vignes sont en situation de détresse. L'activité humaine est largement impliquée dans ce qui se passe dans l'oued Sebaou. Les trafiquants de sable activent tout le long de cet oued». Il y a lieu de noter que la vigne cultivée sur les terres à proximité de la mer est irriguée.
En fait, ce n'est pas uniquement 4 000 hectares de terres agricoles à haut rendement en plaines côtières que la wilaya de Boumerdès va inéluctablement perdre, on peut, en effet, avancer 20 000 ou 30 000 hectares par la faute du pillage qui se poursuit toujours au vu et au su de toutes les autorités politiques, administratives et sécuritaires.
Le tourisme balnéaire est l'autre secteur qui subira les conséquences de cette razzia. En dépit d'opportunités comme à Cap-Djinet, Sidi-Daoud, Dellys et Afir et de la disponibilité de toutes commodités, certains gros investisseurs évitent de s'aventurer loin des centres urbains. Ils se concentrent autour de la ville du chef-lieu de la wilaya et ses environs.
Abachi L.

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