Tlemcen - PATRIMOINE

Tlemcen : Bilan négatif de la situation du patrimoine



Tlemcen :   Bilan négatif  de la situation du patrimoine
L’élan de progrès dans le domaine de la culture a besoin d’une vision claire et pragmatique définissant les objectifs réalisables en termes d’études et de recherches, formation en matière d’ arts , d’animation, de conservation et de protection du patrimoine . Ces dernières années les institutions y relevant étaient plus dans l’animation que dans l’action dans ce domaine où il y a énormément à faire pour le rendre utilement créatif favorisant la connaissance , les goûts, la recherche , la publication . Il est le seul secteur où il n’est pas question de résultats à atteindre dans ce qui peut aider et encourager le progrès et le développement dans notre pays. Les institutions dépendant de ce secteur ne sont-ils redevables de bilans d’action ? La dynamique visant la politique telle prônée celle de ‘’ l’économie de la culture’’ doit être normalement envisagée sous l’angle , en premier lieu , d’une stratégie en action procurant les moyens , des institutions voire , entre autres, les musées . Nos institutions culturelles doivent normalement justifier leur existence par tout le travail nécessaire qui les rend professionnellement autonomes du point de vue de leurs charges jusque là supportées entièrement par l’Etat, tel le cas aujourd’hui . Le facteur production est très important dans leur gestion rentable à l’instar d’institutions du genre , à travers les pays . L’expérience des autres pays dans ce domaine est très utile à connaitre d’autant qu’il présente un élément important de la politique menée par les gouvernants visant , dans un cadre global, le développement économique et culturel de notre pays .
La dynamique de développement dépend de la vision stratégique de progrès qui manque à venir dans ce secteur . Dans le cas de Tlemcen , notre étude tend à mentionner quelques taches qui attendent d’ être réalisées en matière de préservation , de protection allant dans le sens d’une exploitation et d’une mise en valeur des ressources du patrimoine . Des lieux historiques tels entre autres ‘’Dar al Bouhmidi’’ livrée insoucieusement à la destruction , des tombes du vieux cimetière d’el Eubbad soufli jetées au vent avec leurs effets forts regrettables au point de vue de la mémoire historique.
El eubbad est parmi les lieux de mémoire de la ville qui a subi les épreuves du passé .L’histoire d’El Eubbad (Tlemcen) se rattache à deux moments prestigieux marquant le passage au Maghreb des deux plus grandes dynasties maghrébines à savoir les Almoravides (1069-1144) placée, en ce moment, sous l’autorité du gouverneur almoravide Tinemar et les Almohades (1144-1256) avec Yahia Ibn Yaghan leur représentant ,oncle maternel du célèbre savant mystique Mahieddine Ibn Arabi (1165- 1240) . C’est sous le règne des almoravides fondateurs de la nouvelle ville garnison de Tagrart qui deviendra ensuite Tlemcen sous les almohades, que sera construite la grande mosquée de Tlemcen .
Ribât el- eubbad avait une réputation en tant que centre de rayonnement des doctrines sunnite du rite d’el-Achari. Il accueillait les étudiants , les voyageurs et les pélerins . Sidi Abou Madyan ( 1126-1197) fut enterré à l’endroit qu’était avant , le cimetière de Ribât el-Eubbad .
Les historiens ont souligné la valeur à la fois historique et archéologique de ce qui y subsiste , de l’antique village d’el-Eubbad Soufli comme traces de mosquées , mausolées de son existence au moyen âge arabe .C’est à ‘’Ribât el-Eubbad ‘’que Abdelmoumen Ben Ali ben Aloua originaire de Menzel-Tadjra ( Honaine ) répondant à la demande des savants du Ribat Abdelmoun fut chargé d’aller à Bedjaia pour y rencontrer Ibn Toumert (1121-1130) et de l’y inviter au nom des savants de Ribat ‘’el Eubbad ‘’ canton de Tagrart premier embryon de la ville de Tlemcen actuelle , . Ribat l –ubbad avait une vocation établie en tant que centre voué aux études religieuses . Ce lieu fut témoin de la rencontre historique entre Abdelmoumen Ben Ali et
Ibn Toumert qui de retour d’Orient était porteur d’une doctrine nouvelle ‘’ rédemptrice ‘’ libérant l’Islam qu’il partagea un temps avec ses étudiants à Ribat el-Eubbad . Il est peu de temps après fondateur de la dynastie almohade régnante au Maghreb et une partie de l’Andalousie (1130-1269)..
C’était l’époque où les sciences rationnelles connaissaient un essor extraordinaire avec des savants dont Ibn Tofail (1110-1185) auteur de ‘’Hay ibn Yaqdhan ‘’ (Le vivant fils du vigilant) , Ibn Rochd (Avérroès-1126-1198) ) … La doctrine religieuse des Almohades allait ,à partir de cet endroit, se déchainer contre la mentalité des Almoravides jusqu’à sa disparition . La rencontre avait , certes, scellé , le destin de celui qui deviendra l’unificateur du Maghreb sous le nouveau règne almohade (1144-1256). De ce vieux village ‘’béni’’ où s’exerçait le droit d’asile haut lieu de prestige religieux ‘’Achaârie’’ avec , selon les historiens , ses cinq mosquées à minaret il ne reste trace aujourd’hui que de la mosquée dite ‘’SidI Abou Ishak Teyyar’’ et du minaret de l’une d’elle . Ce village fut détruit par les Almohades une fois au pouvoir en réaction de la pensée d’Ibn Toumert contre la doctrine ‘’Achrarie’’ dont il figurait comme le bastion au niveau maghrébin . Le sort fit qu’après sa destruction il devint cimetière dénombrant les tombes des savants réputation sainte ou de descendance royale zianide Abou Ishak et-Tayyar, Maqqari, Okbani, al-Wancharissi , Benyoucel Sanoussi, al – Baka’a, Ameur Termidi ( ce dernier originaire de Bedjaia)…avec également des koubbas honorant la mémoire historique de princesses et de personnalités savantes ou religieuses dont celle, également, de Bensalem fils de Sid Ahmed Tidjani fondateur de la ‘’Tariqa Tidjaniya ‘’ .
Une partie de pierres tumulaires a pu être sauvée se trouvant aujourd’hui au musée de Tlemcen récupérées du temps de la colonisation.. La présence de son passé est resté longtemps ancré dans les mémoires. Le site archéologique du minaret ayant fait également d’ empiétement par l’école de formation était retenu au temps du service des antiquités et des monuments historiques pour abriter des fouilles parallèlement à celles menées sur le site de l’ancienne capitale berbère ifrinide ‘’Agadir ‘’ , ‘’Siga’’, Honaine… dépendant à l’époque de la circonscription archéologique de Tlemcen .El eubbad en raison de sa charge historique en tant que lieu de science et de piété a continué malgré tout d’être honoré par la bénédiction populaire admis au rang des lieux, considérés comme ‘’Horm’’ , frappé d’inviolabilité . Les traces de ce vieux Ribat allaient au fur du temps succomber jusqu’à la dernière opération de terrassement projetant la construction du lycée Yaghmoracen voire, aussi entre les substructions de la mosquée ‘’Diwan salihine’’ à l’emplacement de la source dite ‘’Ain Wazouta’’ englouties ou détruites à la pioche pour laisser place à de nouvelles constructions , les pierres sépulcrales des familles de savants enfin , le mausolée de Bensalem fils de Sid Ahmed fondateur de la târiqa ‘’Tidjaniya ‘’ ce dernier ayant trouvé la mort , peu avant l’occupation française ,lors d’un soulèvement, marquant la période ottomane, combattant à la tête d’une armée forte de près de cinq cents hommes, notent les historiens.
Les spécialistes n’ont eu cesse de se battre à travers les associations aujourd’hui disparue ‘’Les Amis du patrimoine’’, ‘’J.A.S.R’’, ‘’A .D.E.S.C , C.E.R.T ….faute d’aide et d’encouragement au mouvement associatif . Le parti pratiquant l’unicité intégrale, mutilant l’esprit et l’initiative manifestait à leur égard une volonté politique sourde visant leur contrôle jusqu’à, parfois, contraindre à leur dissolution dans une ville qui a vécu l’expérience des ‘’Nadis’’ ,des cercles du progrès et de la connaissance inspiré par les ‘’Jeunes’’ visant la renaissance , libérant l’esprit et la parole politique, au début du XXe siècle . Ces associations avaient en vain recommander la mise en valeur du site d’el Eubbad profitant de son cadre de site historique, archéologique et naturel . Il est de nouveau suggérer par les spécialistes sa prise en charge ,son aménagement et sa mise en valeur dans un ensemble comprenant les vestiges du minaret , de la mosquée ‘’ Abou Ishak Teyyar’’ , la kouba du célèbre théologien Cheikh Benyoucef Sanoussi ( XIV e s.) les mausolées zianides …avec bancs de repos , chemins de promenade, stèles…intégrant le legs de droit privé (habous ) toujours fermé de l’avocat et mécène mais également parmi les figures de proue du nationalisme en Algérie à savoir maitre Omar Boukli Hacène Omar président –fondateur, en exil, du croisant rouge algérien . Ce ‘’habous’’ subi encore , malheureusement, le fléau de l’Impassible bureaucratie qui s’impose toujours comme un frein brisant toute initiative . Pourquoi une telle situation d’abandon de ce Habous ? Personne ne sait . La population s’indigne de la situation aujourd’hui de ce legs . Sa fermeture produit l’ image négative d’une administration en rupture de ban avec la société . D’honorables personnalités ont tenté mais en vain de s’impliquer pour enfin , donner vie à ce ‘habous’’ ( maison de maitre avec grand jardin plus bain traditionnel assurant les ressources à son activité ) . Malheureusement ce habous dont la singularité de l’acte est devenue très rare aujourd’hui fermé depuis n’a pas été sans subir des dilapidations pour ce qui est de ses oeuvres d’art et sa bibliothèque de manuscrits . L’enseigne au nom de son légataire au fronton de son entrée a même fini par être disparaître . Attribué en acte de piété et de charité il reste à ce jour inopérant alors qu’il était , par la volonté de son donataire ( ‘’Waqfiya ‘’) destiné à des oeuvres sociales et éducatives . Le sort de ce ‘’waqf’’ toujours fermé quarante ans après la mort de son donataire n’a cessé de susciter des interrogations mais aussi des critiques mettant à l’index le spectre paralysant de la bureaucratie .
La question concernant la protection des sites et monuments historiques constitue l’aspect d’un problème important en raison de la richesse du patrimoine classé et non classé dans la région . La sauvegarde du site archéologique d’el-Eubbad soufli s’est posée de nombreuses fois en tant qu’espace faisant partie de l’histoire de la cité . Déjà , en 1974, sa protection fut requise lorsque y fut décidée la construction du lycée ‘’Yaghmoracen ‘’ dont l’empiètement n’a , en effet , ménagé ni les ‘’Koubas’’ et ‘’Rawdas’’ ni autre vestiges à défaut d’une bonne capitainerie dans la cité .Ces sites sont partout , aujourd’hui , menacés par un urbanisme échevelé ,sans contrainte à l’origine de squattages avec les constructions défiant les règles élémentaires d’alignement, de visibilité …. Les instruments de traçage et de documents en matière d’urbanisme, de conservation, d’architecture , de traçages restent encore sans maitrise d’où l’état de la vieille médina et des sites archéologiques en péril ….La prise en charge de la vieille médina doit normalement et obligatoirement passer par un bureau spécialisé établi au niveau de l’A .P.C à l’instar des services chargés de la préservation des sites historiques de la vallée du M’zab.
Notons que les années ‘’70’’ furent marquées par d’intéressantes découvertes ( n’ayant fait l’objet malheureusement de publications) enregistré la découverte inédite du trésor constitué de près de 10.000 pièces de monnaie almohade à l’endroit d’un lieu d’un bastion fortifié à Ain Ben Mdjedal , à l’entrée nord de la ville non loin où fut identifié la présence une escale avec une mosquée et d’annexes datant de l’époque almohade dont la disparition sous l’effet des constructions serait une perte archéologique de la ville.La richesse archéologique est constituée par la présence de gisements préhistoriques de très grande importance qui attendent d’être investis par les études et la recherche par l’université à Chigueur , Chigueur- Mouilah , lac Karar ( Remchi) , Ouzidan (Sikkak), Sidi Abdelli sur le promontoire de Ghiran er-Rih Altava (capitale berbère du royaume de Massouna) …figurant à l’atlas des stations préhistoriques de Stéphane Gzell, en Algérie .
La lourde tâche de la direction de la culture reste aussi la signalisation sur le terrain d’endroits portant la mémoire de hauts faits d’arme à l’époque de la lutte de l’émir Abdelkader ou pendant la révolution pour l’indépendance Pour ce qui est de l’épopée de lutte de l’émir Abdelkader rien n’est fait à ce jour pour reconnaitre sur le terrain les lieux de ses grandes batailles à Sidi Yacoub, Sikkak,Tafna … le sauvetage des tableaux du peintre Abdelhalim Hemch …à ce jour , toujours dans les réserves, inaccessibles au public, en attendant la réception du musée dont le Chantier est, depuis plus de dix années, à l’abandon. Il y a aussi ces maisons de mémoire historique rattachées au souvenir de grands hommes ,lieux du vécu de Messali Hadj, Mohamed Bensmail, cadi Choaib … squattées, ou en perte tel le cas de nombreux bains et fondouks en raison de leur état de dégradation , et qui méritent d’être protégées en tant qu’espaces de visites et d’animation . Certaines d’entre elles constituent de précieux spécimens d’architecture de différents âges . Le sort de ces maisons est lié à celui de la médina toute entière à Beni Djemla, Messoufa, Madrès, ouled al-Imam ….la majorité des vieilles demeures de la vieille médina témoin des siècles passés sont en état d’éboulement condamnées à disparaître. La question concernant la protection du patrimoine est loin de figurer parmi les préoccupations des autorités locales d’où la question concernant le rôle des élus .
La politique culturelle a besoin aujourd’hui plus que jamais d’une vision claire , dynamique, participative faisant appel aux spécialistes par rapport à des besoins favorisant la connaissance , la formation, la recherche, la protection, la diffusion, la publication ...Un secteur qui doit répondre à un plan d’action aves des résultats quantifiables au rythme des efforts déployés à l’instar des autres secteurs de préoccupations majeure en matière de progrès et de développement .Si la situation , telle aujourd’hui, est la conséquence de la politique marginalisant la bonne société civile .
Le musée reste comme un lieu sans vie loin de répondre aux exigences en matière de muséologie moderne . A Tlemcen le musée dont le chantier est à l’abandon depuis plus de dix années offre , au cœur de la ville , une image négative de la situation de ce secteur bureaucratisé, en l’absence d’un encadrement spécialisé confiné depuis longtemps à la marge en l’absence d’une réelle politique muséale visant : la recherche, la formation et la diffusion. La politique culturelle définissant l’action des directions de wilaya dans la production et l’animation culturelle et artistique, la recherche et la protection des patrimoines matériels et immatériels. Elle doit définir l’action au niveau des wilayas pour la préservation et le classement des sites et des biens à valeur patrimoniale, faisant partie de la mémoire historique locale ou nationale.
La société civile des artistes et des hommes de culture à l’écart a besoin d’ écoute et d’aides pour l’acquisition de locaux quand on voit au coeur de la cité des espaces à l’abandon ( exemple les minoteries désaffectées qui , aménagées peuvent être mises à au profit du mouvement associatif ..
L’annulation du festival national de la musique ‘’Sana’a- gharnata’’ englobant tous les genres dérivés après une existence de plus de vingt années y a laissé un grand vide. Le festival consacrant le ‘’Haouzi’’ est considéré par plus d’un agissant dans le cadre de la promotion du patrimoine comme une décision hors ligne car n’intégrant en reconnaissance qu’un segment du vaste patrimoine couvert du nom de ‘’Sana’a – gharnata ‘’ ce dont elle sera privée ce qui est considéré comme une véritable inconséquence sachant qu’une grande partie de la mémoire de cette musique s’y trouve avec ses racines lointaines rappelant les liens historiques de l’ancienne capitales avec Cordoue et surtout Grenade sa sœur jumelle au souvenir, au moyen âge, des grands poêtes Lissan eddine Ibn Khatib, Ibn Hadjla, Affif eddine , Abi Djamaa Talalissi et plus tard, Said al-Mandassi, Ibn Triqui , Ben M’saib …dont les œuvres coulent dans les veines de cette musique .
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