Tlemcen - Sidi Belkheir, Mausolée et Hammam	(Commune de Hammam Boughrara, Wilaya de Tlemcen)

Sous les palmiers disparus de Sidi Belkheir — mémoire d’un hammam englouti à Hammam Boughrara (Tlemcen)


Sous les palmiers disparus de Sidi Belkheir — mémoire d’un hammam englouti à Hammam Boughrara (Tlemcen)
Avant que les eaux du barrage de Boughrara ne viennent recouvrir les vallons, il existait là un lieu singulier, à la fois modeste et sacré. Au pied de trois palmiers se trouvait une source d’eau chaude naturelle, surgissant d’une petite grotte recouverte d’une tôle de zinc. C’était le hammam de Sidi Belkheir, un bain de fortune où les habitants trouvaient depuis des générations remède, purification et apaisement.

Les femmes y entraient les premières, dans la pénombre et la vapeur, pendant que les hommes montaient la garde dehors, respectant un rituel transmis par le temps. Puis, lorsque les femmes quittaient la grotte, les hommes prenaient à leur tour le chemin de la source. Rien de monumental, rien d’inscrit dans les registres officiels — seulement un abri, trois palmiers, et une eau brûlante jaillissant de la terre, signe d’une vie ancienne mêlant nature et croyance.

Tout près s’élevait la goubba de Sidi Belkheir, marabout respecté dont le souvenir plane encore sur la région. Ce sanctuaire, lieu de vœux et de recueillement, fut détruit durant les années sombres de la décennie noire. La mémoire populaire raconte que celui qui fit exploser la tombe trouva la mort dans un accident, à peine quelques jours plus tard — un récit transmis avec la gravité et la ferveur propres aux légendes rurales.

Lorsque le barrage de Boughrara fut mis en eau à la fin des années 1990, le site originel — hammam, source, palmiers et mausolée — disparut sous les flots. Les habitants décidèrent alors de reconstruire la goubba plus haut, sur les coteaux qui dominent désormais le lac artificiel. Ainsi, Sidi Belkheir continua de veiller, non plus depuis la vallée, mais depuis les hauteurs, comme pour rappeler que les lieux de mémoire ne meurent pas : ils changent simplement de rive.

Aujourd’hui, seuls quelques anciens se souviennent encore de ce petit hammam fumant sous les palmiers, où l’eau chantait dans la nuit et où l’on croyait que le bien et le mal cohabitaient à la lueur d’une lampe à pétrole. Un souvenir, à la fois intime et collectif, d’un monde rural englouti mais jamais effacé.

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