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Eugénie Buffet

Lorsqu'elle mourut, en 1934, Henri de Curzon écrivit à son propos :

«Elle [était], sur les scènes, dans les cabarets, dans les cours et sur la rue, une sorte de reine populaire, au coeur débordant de sympathie, de bonté, de simplicité dévouée.»

De son vivant, Richepin écrivait, pour sa part :

«Pour ma gloire de poète, je ne souhaiterais qu'une chose, c'est d'écrire beaucoup de chansons naïves et profondes dont elle pût répandre la belle aumône, sans en dire l'auteur, dans cette étrange et affreuse forêt parisienne où les bêtes de proie et les bêtes immondes ont besoin de pleurer parfois, en écoutant pleurer leur âme avec celle du rossignol.»

On sait qu'elle fut décorée de la Légion d'Honneur, qu'elle se dévoua sans réserve pour les pauvres, les malades, les grévistes, les blessés, qu'elle fut royaliste, partisane de la Ligne des patriotes et même sergent chez les Croix-de-Feu (organisation d'anciens combattants nationalistes et anticommunistes).

Son activité, ses entreprises la menèrent souvent au bout de ses forces.

Sa popularité fut telle que, malade, en 1926, on alla jusqu'à lui organiser un gala pour payer ses soins.

Elle est surtout connue pour une chanson qu'elle enregistra plusieurs fois au cours de sa vie, la première fois sur un cylindre Lioret en 1898, la dernière, peu de temps avant de mourir, à l'âge de 66 ans : la Sérénade du pavé (Jean Vanet) dont il suffit d'entamer encore aujourd'hui le refrain pour que la plupart des auditeurs s'exclament : «Oui, oui, je connais !» :

Sois bonne, oh ! ma belle inconnue
Pour qui j'ai souvent chanté
Ton offrande est la bienvenue
Fais-moi la charité
Sois bonne, oh ! ma belle inconnue
Pour qui j'ai souvent chanté
Devant moi, devant moi, sois la bienvenue.

Pas trop certain ? - Alors cliquez sur la note qui suit et écoutez (format MP3) :

(C'est ce passage qu'Édith Piaf chante dans French Cancan (1955) de Jean Renoir. - La version intégrale se trouvera à partir d'un lien sur une page intitulée La chanson française de 1870 à 1945 - Cinquante chansons - à l'année 1894 [numéro 7].)

On la connaît aussi pour son interprétation de Le mouchoir rouge de Cholet de Théodore Botrel et ses interprétations de nombreuses chansons d'Aristide Bruant dont un très émouvant À Saint-Lazare.




Elle est née en 1866 en Algérie et fut d'abord bonne à tout faire puis elle s'essaya au théâtre avant de se rendre à Marseille puis à Paris où, après un séjour en prison pour avoir crier «Vive Boulanger» au passage de Carnot
(en 1889), elle adopte le costume de «pierreuse» et débute dans un tour de chant à la Cigale en 1890.

Son succès fut presque immédiat.

Vite, son répertoire s'agrandit. Ses auteurs sont Bruant, Richepin, Darcier, Botrel, Déroulède qui n'hésitèrent pas à composer directement pour elle.

Avec la Sérénade des pavés (de Varney), elle obtint un succès foudroyant dès 1892.

Dès lors, elle se met à chanter dans les rues, pour les pauvres d'abord, puis pour les grévistes, les soldats, les malades et ne cessera de chanter pour eux jusqu'à la toute fin, en 1934 où, pauvre et malade elle même, elle continuait à s'occuper de plus pauvres et de plus malades qu'elle.

Non sans avoir fait, au cours d'une carrière de plus de 40 ans, des tournées jusqu'en Amérique et aux Antilles, ouvert de nombreux établissements et être revenue, un temps, au théâtre.

Un cas tout à fait exceptionnel dans la chanson française.

Son style se continuera quelque peu avec Fréhel.



Mémoires
Les Mémoires d'Eugénie Buffet, «Ma vie, Mes amours, mes aventures» ou «Confidences recueillies par Maurice Hamel» ont été publiés par Eugène Figuière, éditeur, à Paris, en 1930.


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