Tlemcen - Sidi Ahmed Ben Iça

Biographie de Sidi Ahmed Ben Iça



Originaire des Zekout, fraction des Beni-Ournid, il était connu sous le nom d’Aberkan (le noir, en berbère) et habitait la montagne des Beni-Ournid. Il était le chef d’une postérité vertueuse et enseignait les sciences mystiques et non mystiques, la Ricala (épître) d’Ibn Abou Zeid (1), le Précis de jurisprudence d’Ibn El-Hadjib (2), les Articles de foi du cheikh Es-Senouci, l’Alfiya d’Ibn Malik (3), le poème d’El-Djouzy (4), celui d’Abou Miqra (5) L’échelle brillante (6) :ouvrage sur la logique, et les Sentences d’Ibn Al’aï’ llâh sur le soufisme.
Sidi Abderrahman Ez-Zekouty, Sidi El-Hadjj ben Saïd El-Yebdéry et Sidi Ali , qui demeurait à Agadir (7), furent ses professeurs.
Son fils, Sidi Mohammed, m’a raconté à son sujet, des faits qui prouvent qu’il était favorisé de révélations célestes.
Il donnait des leçons à un groupe de génies. J’allai lui faire visite au temps où déjà il ne pouvait plus marché à cause de son grand âge. Il habitait seul une chambre séparée du reste de sa maison. Je m’arrêtai prés de la porte de la chambre et je l’entendis qui lisait et disait : Avez-vous compris ? A cette question une voix flutte répondit :
« Oui, je ne bougeai pas de ma place et je l’entendis dire :
C’est assez, je n’en puis plus, je vous compléterai cette leçon un autre jour. Puis j’entrai et le saluai. Il me rendit mon salut, me bénit et je m’assis à son côté, après quoi je me retirai.
L’auteur du présent livre dit : Toutes les fois que j’allais lui faire visite, je lui baisais la mains et m’asseyais près de lui .Puis il se retournait et me donnait du pain, des dattes, des figues ou du raisin. Comme j’avais honte de manger, il me disait : Mange !quand ou se réunit on ne se sépare pas sans goûter. Je lui dis un jour : Maître, cette collation a-t-elle un sens symbolique ou non ? Le Mot El-hissi désigné l’action de manger proprement dite, et EL-maanaoui les questions scientifiques – Mon enfant, me répondit-il, elle peut avoir l’un ou l’autre sens, mais il vaut mieux lui donner les deux à la fois ».
Voici entre autres fais, ce qui m’est arrivé au temps de ma jeunesse, alors que je commençais mes études sous sa direction. Je m’étais disputé, dans un lieu désert et sans autre témoin que Dieu, avec un homme de mes voisins. Puis je vins voir Sidi Ahmed et le trouvai assis dans la mosquée. Quand je l’eus salué, il me secoua et dit :
Comment se peut-il que tu te sois disputé avec ton voisin, cet homme m’a offensé. – Dieu répliqua-t-il, a dit : « … et ceux qui maîtrisent leur colère et pardonnent à ceux qui les offensent ».
Quand bien même, ajouta-t-il, la piété ne commanderait pas de maîtriser la colère, qu’on y serait obligé par pudeur, et la pudeur est le vêtement de la piété »(8).
Sidi Ahmed était exaucé dans ces prières. Il était scrupuleux. Voici ce dont je fus témoin et qui montre jusqu’à quel point il poussait ses scrupules : il ne priait jamais avec de la monnaie sur lui : il ne se munissait d’argent que lorsqu’il avait besoin d’acheter quelque chose au marché, mais il s’en débarrait aussitôt qu’il voulait prier, soit en l’enterrant s’il se trouvait dans la campagne, soit en le plaçant sous les nattes s’il était à la mosquée. Je lui demandai la raison de cela. « C’est, me répondit-il, parce que je crains de l’oublier et de le perdre ;or laisser perdre l’argent est une innovation défendue ; en l’enterrant, si je l’oublie, je le retrouverai à l’endroit même où je l’aurai enfoui et en le plaçant sous les nattes, il ne peut se perdre car un autre que moi le trouvera.
Voici ce qui m’arriva après sa mort, quand je mourrai, avait-il recommandé à son fils c’est un tel qui devra laver mon corps. Or, le matin du jour de sa mort, j’étais allé voir son suppléant avec l’intention de passer la nuit chez ce dernier. A mon arrivée, je saluai cet homme et ses enfants, et il m’invita à descendre chez lui sous la tente, je refusai et, mon esprit se troublant, je m’en retournai précipitamment ne me possédant plus. Comme j’entrai dans la Zaouia de Sidi Halouy , un homme se présenta à moi et s’écrira :
Que Dieu t’accorde résignation ! Sidi Ahmed est mort, que Dieu lui fasse miséricorde ! »Puis le fils de Sidi Ahmed me dit : Mon père m’a recommandé de ne faire laver son corps que par toi. » Je le lavai donc pendant que Sidi Mohammed El-Betihy disciple du cheikh, répandait de l’eau sur le cadavre. Lorsque j’eus terminé, je lavai la planche destinée au lavage des morts et je plaçai le cheikh sur cette planche, les bras étendus le long du corps. Un moment après, m’étant retourné, je m’aperçus que le voile qui recouvrerait la nudité de Sidi Ahmed était tombé, et que celui-ci avait étendu la main sur ses parties sexuelles pour les cacher, « Regarde, dis-je alors à Sidi Mohammed El-Betihy, ce qu’a fait le cheikh.
Le date de sa mort est inscrite sur la pierre dressée à la tête de son tombeau.
Citons, parmi ses miracles, les faits suivants : Un de ses disciples entra une fois chez le cheikh en état d’impureté et voulu suivre le cours sans avoir préalablement fait ses ablutions; il craignait que l’eau froide ne lui fit du mal, car on était en hiver. « Ne lis pas, lui dit le cheikh, telles sont les règles fixées par Dieu; ne les transgressez pas ! » (Coran, sour. II. V 229).
Une autre fois, ce même étudiant entama la séance sur l’Alfiya d’Ibn Malik. Le cheikh après avoir prononcé la formule : « Je cherche un refuge auprès de Dieu contre Satan le lapidé », récita ce verset du Coran : « Dieu a ordonné de n’adorer que lui et de tenir une belle conduite envers ses père et mère. » Sour.
Or, l’élève assistait à la leçon malgré la défense de son père, qui la veille au soir, lui avait défendu de poursuivre ses études. Les étudiants, ne sachant à quoi attribuer la citation de ce verset, se regardaient les uns les autres, Conforme-toi aux ordres de ton père, ajouta le cheikh en s’adressant au jeune homme, et suis ses avis dans les choses qui regardent l’un et l’autre monde.
Les vertus de Sidi Ahmed sont innombrables.

Notes

1 Le cheikh Abou Mohammed Abdallah Ben Abou Zeîd, célèbre jurisconsulte de Kairouan, florissait dans le Ive siècle de l’hégire. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages très estimés et qui font autorité chez les musulmans. Le plus célèbre de ses ouvrages est la Riçala ou traité de jurisprudence malékite. Ibn Abou Zeîd mourut l’an 389 de l’hégire (inc 11 avril 979)
Voyez sa biographie dans Dibadj, page 140. cf. el Makkary, 1re partie, pp.500, 619, 918 et Hadji Khalfa, tome III, p.358, n°5931
2 Djemal eddin Abou Amr Othman Ben Omar Ben Abou Bekr de la secte de Malik est plus connu sous le nom d’Ibn El-Hadjib, parce que son père avait été chambellan de l’émir Izz-Eddin Moucek es-Selahy. Il naquit à Asna, petite ville de la province de Qous dans la thébaîde, en l’année 570 de l’hégire (inc. 2 août 1174). Après avoir fait ses études au Caire, il se rendit à Damas où il professa dans la grande mosquée des Omméyades. Il a écrit des ouvrages souvent commentés : la Kafia, court manuel de grammaire ; la Chafia, dans le même genre ; la Maqced el Djalil métrique ; des Amali ou leçons dictées sur le Coran, Motanabbi et d’autres poètes ; montaha es-soual oua’l amal (le terme de la demande et de l’espoir), manuel de droit Malékite. Ibn El Hadjib mourut en Alexandrie, l’an de l’hégire 646 (inc. 26 Avril 1248)
Voyez sa biographie dans Ibn Khallikan, tome I, p563.
3 Djemal Eddin Abou Abdallah Mohammed Ben Abdallah et-Taîy el Djaîany, plus connu sous le nom d’Ibn Malek, était originaire de Jaen, en Espagne, mais né à Damas en 1203 de J-C. Après avoir achevé ses études à Alep, il revint professer la littérature à Damas, où il mourut en 672 de l’Hégire (inc.18 juillet 1273), après s »être acquis la réputation du plus grand philologue de son temps. Il a écrit un grand ouvrage aujourd’hui perdu, El fawaïd (observations utiles), qui traitait de la syntaxe et dont nous avons un extrait dans le teshil el-fawaîd ; l’alfiya, poème didactique sur la grammaire en mille vers, souvent commenté et imprimé dont se sont occupés Silvestre de Sacy, Dieterici, L. Pinto et Goguyer ; le lamiyat el-af’al, autre poéme didactique sur la conjugaison des verbes arabes, autographié par Wallin à Helsingfors, publié par Kellgren, Volck et Goguyer. D’autres ouvrages grammaticaux, d’une moindre renommée, sur la syntaxe, la métrique et la synonymique, se trouvent en manuscrit dans diverses bibliothèques.
(Extrait de la littérature arabe, par Clément Huart, Paris, 1903, page 170)
4 Son nom entier est Mohammed El-Djouzy ben Mohammed ben Mohammed ben Ahmed ben Abou’l Qacim er-Rachidy El-Mezily
Ce poème traite de la constitution du ciel et le mouvement des astres
5 Ce poème traite de la constitution du ciel et le mouvement des astres
6 Es-sollem el-moraouniq fi’ilm el mentiq, l’échelle brillante ou traité de logique, est un poème sur l’Isagoge de phorphyre, composé par le cheikh Abderrahman Ben Mohammed es-seghir el-akhdary, l’an 941 de l’hégire (inc, 13 juillet 1534). Voyez Hadji Khalfa, tome III, p.610, n°7225.
7 Agadir est le nom du vieux Tlemcen. Voyez sur Agadir : Tlemcen ancienne capitale du royaume de ce nom, par l’abbé Bargès, Paris, 1859, chapitre VII
8 « La pudeur est un rameau de la foi » (hadith de Moslim et d’El Bokhary)





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