Tlemcen - Patrimoine Immobilier

ABANDON DES VIEUX QUARTIERS DE TLEMCEN.


ABANDON DES VIEUX QUARTIERS DE TLEMCEN.

Ce sont bien ces vieux quartiers de Tlemcen, millénaires, chargés d'Histoire, qui ont vu se succéder des dizaines et des dizaines de générations, ayant ont fait leur bonheur et qui constituaient la Médina authentique. Chaque ruelle, venelle, impasse, derb, placette possède sa propre histoire, son propre passé, s’intégrant intimement aux autres segments, formant un grand ensemble compact et dense.
Il n’y a pas une place, un coin qui ne recèle des trésors d’un passé glorieux. Des lieux qui ont contribué à former et à faire connaitre, à travers les siècles, de très nombreux érudits personnages illustres, dont la réputation dépasse largement, à ce jour, les contours de la ville...
Des quartiers, que rien ne différenciait et que rien ne séparait en réalité, si ce n’est l’appellation spécifique pour chaque secteur, mais tous convergeaient vers la place d’El-Medress, le véritable poumon de la vieille ville. Aucune "frontière", aucune limite formelle ou informelle, ni matérielle et encore moins psychologique ne divisaient les populations qui y ont toujours vécu dans une parfaite harmonie. Tous, se sentaient appartenir à la même famille, de la plus petite celle du foyer, à celle plus vaste, de l’ensemble de la Médina, en passant par les groupements des maisons mitoyennes au quartier, pour embrasser au final le reste des autres quartiers. Tout le monde connaissant tout le monde, du plus petit au plus grand et au plus âgé. Cela pourrait concerner des dizaines de milliers de personnes.
Des endroits très communs, de rencontres et de retrouvailles fréquentes, contribuaient pour beaucoup à faciliter et raffermir les relations entre les uns et les autres, femmes d’un côté et hommes de l’autre. En effet, ce sont souvent les marchés et les cafés "maures" d’une part, les fours traditionnels (Ferrane) qui servaient à la cuisson du pain de chaque famille d’autre part, ainsi que les bains traditionnels (Hammam) surtout, qui permettaient de créer de nouvelles alliances pour des jeunes filles à marier. Ce qui était d’ailleurs une pratique traditionnelle très courante et même assez recherchée. Il arrivait fréquemment qu’on s’invitait au hammam, entre femmes, pour donner la possibilité aux parentes des prétendants de "jauger" de visu des capacités et des aptitudes de la potentielle future "3aroussa" !
Malheureusement, tous ces hauts lieux se trouvent ainsi aujourd’hui laissés à l'abandon, exposés à leur destruction puis à leur disparition totale, ce qui constitue indéniablement un véritable crime contre notre précieux patrimoine et notre mémoire collective. Le comble, c’est que ces lieux historiques, vestiges d’un passé digne d’une grande civilisation passée, sont livrés à tous les vents et à toutes sortes de déprédations, où les délinquants, les clochards, les drogués, les mauvaises mœurs trouvent leur terrain de prédilection, de nuit comme en plein jour. "La nature a horreur du vide", dit-on. C’est ainsi, qu’une véritable "cour des miracles" s’est progressivement installée, élisant domicile avec toutes les conséquences sur une bonne partie de la Médina, au vu et au su de tous, en particulier des services publics comme des citoyens concernés au plus haut point, qui semblent s’en accommoder de ce nouveau paysage des plus désolant.
La préservation de notre passé est aussi vitale pour consolider notre ancrage au présent afin de mieux nous projeter sur l'avenir. En réalité, nos vieux quartiers, nos us et nos coutumes, comme nos traditions séculaires représentent autant de nos racines dont on n’a pas le droit de négliger au nom d’un certain modernisme. Au fond, l’un n’empêche pas l’autre.
" Faites comme l’arbre ; changez vos feuilles et gardez vos racines … Changez vos idées et gardez vos principes ", disent nos sages.
Malheureusement, par la faute des hommes et de leurs pratiques anarchiques, sans vision lointaine, sans conviction et sans souci d’entretien et de protection de notre patrimoine, des dégâts immenses sont ainsi occasionnés, non seulement au niveau des biens, mais aussi et surtout au plan de nos valeurs authentiques bousculées par d’autres valeurs dites universelles.
Autrement dit : c’est tout un ÉTAT D’ESPRIT qui disparait et s’enfonce dans les grands abîmes…
Pourtant, sous d’autres cieux, pas très loin de chez nous (Maroc, Tunisie), les vieux quartiers des Médina, font l’objet de soins des plus attentionnés de la part des services publics comme des citoyens, les prenant en charge et protégeant jalousement leur patrimoine. En dehors des efforts de préservation, des actions d’entretien et de restauration, engagés régulièrement, bénéfiques pour leur société respective, ces vieux quartiers constituent une réelle source d’entrée d’argent très appréciable pour l’ensemble des populations. C’est ainsi, que ces lieux contribuaient fortement à la stabilité économique, au maintien des traditions artisanales, à la découverte des cultures locales et à la connaissance du patrimoine façonné par des valeurs ancestrales.
Quant à nous !!! A quand le réveil enfin de nos services publics compétents, de nos élites, des amoureux de la ville ou de nos représentants actifs de la société civile ? Plus le temps passe, plus les dégradations avancent et s’accélèrent, plus il deviendra fort coûteux et difficile de rattraper les dégâts et plus grande sera notre désolation dans un monde qui aura fatalement perdu jusqu’à ses repères de base.
En tout cas, Tlemcen ne sera plus Tlemcen, sans ses vieux quartiers.
Car enfin, avec la disparition de nos biens matériels ancestraux, c’est toute une façon de vivre et d’être qui disparait à jamais et avec elle l’ensemble de nos valeurs qui la caractérise. Et c’est ainsi qu’à ce stade, il ne faudra pas s’étonner qu’on finirait par enfanter des générations sans repères et sans valeurs.
إنّما الأمم الأخلاق ما بقيت فإن هم ذهبت أخلا قهم ذهبوا(أحمد شوقي)
NOTRE MAISON TRADITIONNELLE - DERB SENSLA (L’UN DES VIEUX QUARTIERS)
Notre maison familiale traditionnelle est située dans l’un des quartier traditionnels, lequel a été mis en poèmes et chanté par les meilleurs dans le genre (Abdelkrim Dali...) et qui a enfanté et sorti des générations multiples de sages, oulamas, intellectuels, militants et révolutionnaires des premières heures, hauts cadres et fonctionnaires de l’État... Malheureusement, c'est un quartier avec d'autres quartiers de notre ville, aussi chargés d'Histoire, qui sont abandonnés à leur triste sort sans une réelle et effective prise en charge digne de leurs passés riches en évènements et surtout par les bonnes valeurs qui étaient le lot quotidien de tous les résidents tous niveaux et statuts confondus.
Tout au fond de Derb Sensla, se trouve le tombeau de l’un des plus illustres savant et astrologue de Tlemcen : Sid’Ahmed el Habbak.
L’ENTRETIEN DES RUES DE TLEMCEN/VILLE
"D’autres temps, d’autres mœurs"…d’autres pratiques, serait-on tenté de conclure, au constat donné aujourd’hui par l’état de nos rues et avenues et mêmes les ruelles de notre Tlemcen d’antan.
Une tradition qui amusait beaucoup les enfants à l’époque, était l’utilisation de l’arroseuse en période d’été en particulier. Le camion-citerne communal sillonnait en effet systématiquement la ville de partout, arrosant la chaussée ainsi que les trottoirs par des jets d’eau à pression en continu, avec ses deux vitesses, l’une pour la chaussée et l’autre pour les trottoirs. Ce qui avait pour triple effet, celui de nettoyer à grande eau les rues et ruelles, de rafraichir l’atmosphère des grandes chaleurs d’été et de faire couler l’eau en abondance dans les caniveaux pour dégager les égouts. Ce qui avait pour objet d’éviter le bouchage et les inondations qui en résulteraient aux premières pluies d'automne. Ce qui n'est plus la culture aujourd'hui. Et pourtant, c'est si simple !
L’amusement des enfants, était de se mettre sur le trottoir, en face de l’arroseuse, et de sauter par-dessus du jet d’eau sans se mouiller, comme s’il s’agissait d’obstacles à franchir. Le conducteur, entrant dans le jeu et complice depuis longtemps, faisant mine de ne pas remarquer l’intention des enfants, actionnait subitement le levier de vitesse supérieure pour faire surprendre les enfants en les aspergeant jusqu’à la taille, à leur grande joie.
TLEMCEN, VILLE PARTICULIÈRE ET ATYPIQUE ?
Partout dans le monde, existent des localités, des cités, des villes et villages ou sites d'aspect exceptionnel, comme Tlemcen, très exposés par leurs spécificités si particulières et qui ne laissent pas les gens indifférents, et par conséquent entrainent des critiques souvent fondées, mais parfois nettement moins en raison de préjugés tenaces. Cela est toujours le lot de tout ce qui tranche par rapport au standard qui passe inaperçu. On a quelque fois tendance à dire, pour éviter de s'assumer : " pour vivre heureux, vivons cachés "... même si c'est dans la médiocrité ! ?
C’est vrai que Tlemcen reste Tlemcen, avec ses qualités et ses défauts, ses arts et son Histoire, ses générations anciennes et nouvelles, ses traditions, ses us et ses coutumes spécifiques dont certaines rehaussent et authentifient la réputation de la ville tandis que d’autres la desservent et la désavouent.
Mais, Tlemcen d’avant et celle d’aujourd’hui, n’est plus du tout la même, plongée et sombrant dans la médiocrité ambiante comme tout le reste à travers l’ensemble du territoire national. Son cachet spécifique qui faisait tout son charme a perdu de son éclat et de sa splendeur d’antan.
Car, Tlemcen est défigurée physiquement par une urbanisation anarchique et hideuse, une (non)hygiène honteuse et indigne, par des attitudes et des comportements malsains, une population devenue hybride par la force des choses, par une grave et coupable méconnaissance des règles élémentaires du savoir-vivre et du savoir-être d’une citée marquée par une civilisation millénaire…
Mais, Tlemcen reste toujours Tlemcen. Avec ses hauts et ses bas, "dalma wella madloma", auprès de tous ceux et celles qui continuent de l’admirer et de l’aimer, de loin ou de près, malgré tout. Il appartient à ceux-là justement et à d’autres, de la protéger et de la défendre, de redorer son blason et surtout de ne pas la rejeter ou de la fuir. Il y va de la responsabilité et du devoir de tous les Tlemceniens et Tlemceniennes. Que chacun fasse sa part en balayant devant chez soi. "Nettoyer c’est bien, ne pas salir c’est mieux", dit-on.
Malheureusement, le cas de Tlemcen n’est pas unique à l'horizon. D’autres citées aussi prestigieuses qui ont fait une bonne partie de l’histoire de notre pays sont logées à la même enseigne par la faute des hommes et de leur irresponsabilité, leur inconscience voire leur indigence et leur incompétence dans la prise en charge sérieuse et une gestion rigoureuse d’un patrimoine qui n’aurait jamais dû perdre sa splendeur d’antan.
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