
Les Algériens ne sont pas allés voter. C'était prévu. Les analystes avaient prévenu contre le «jeu fermé» pour la présidentielle du 17 avril. A quoi sert de donner sa voix puisque le match, l'arbitre, le stade, le public et les projecteurs ont été déjà vendus '! Le ministère de l'Intérieur, qui a pris tout son temps, a annoncé un taux national de participation de 51%. Il a fallu attendre jusqu'à 23 heures pour avoir ces données. Les partis qui ont appelé au boycott ont remis en cause des chiffres. «Le gouvernement a gonflé le taux», ont-ils relevé. L'opacité entoure depuis des années les mécanismes statistiques utilisés par le ministère de l'Intérieur pour faire le «calcul» de la participation.Le détail disparaît dans le global et on se retrouve avec des chiffres arrondis qui, parfois, ne sont pas le reflet de la réalité. La participation à la cinquième élection présidentielle de l'Algérie pluraliste, post FLN-parti unique, était devenue un enjeu pour le pouvoir. Une campagne était menée par les médias dits publics pour convaincre les Algériens de voter. Le maintien de Bouteflika à la présidence de la République devait passer par une participation «respectable» au vote. Les 51% annoncés sont, pour le gouvernement, assez crédibles pour «valider» le scrutin et le présenter, plus tard, à l'étranger, comme une réussite.Une simple analyse comparative faite à partir des chiffres officiels des élections de 2009 et de 2014 permet de penser que plus de 22% des électeurs inscrits (presque 5 millions d'Algériens) ne sont pas allés voter. Ne sont-ils plus intéressés par le jeu politique ' Veulent-ils sanctionner la gouvernance de Bouteflika qui gère le pays depuis quinze ans, ce que l'on tend à oublier ' A ce niveau-là, c'est un échec. Mais le pouvoir en place refuse de le voir ainsi ou, du moins, d'en prendre la mesure.Le front du boycott constitué notamment du Mouvement de la société pour la paix (MSP), le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) et El Adala peut réclamer victoire. Les boycotteurs sont presque les seuls à pouvoir crier sur les toits de la ville qu'ils avaient raison sur l'issue du scrutin et sur la poursuite du statu quo. Bouteflika 4 débute donc avec une aile brisée puisqu'une grande partie des Algériens n'ont pas cautionné, par l'absence, la reconduction du président sortant ou n'ont pas donné raison à ceux qui disent que «tout» se règle par les élections.Selon le tableau statistique du ministère de l'Intérieur, l'ouest et le sud du pays ont massivement participé au vote comme à Relizane (87%), Tindouf (88%), Sidi Bel Abbes (90%), Mostaganem (81%). Les taux les plus bas ont été enregistrés dans le Centre et l'Est.Alors, faut-il croire à une Algérie noir/blanc, blanc/noir ' Le régionalisme, apparu comme une forme de gouvernance ces dernières années, est un mal sournois. Expliquer les résultats d'une participation au vote, censé concerner tous les Algériens, par les tendances régionalistes qu'aurait le pouvoir en place serait inapproprié. Dans les villes-garnison comme Tindouf, Béchar, Tamanrasset ou Blida, le vote est massif.L'explication est simple : les militaires, les gendarmes et les policiers sont obligés de voter. Le soldat n'a pas droit au boycott. Des militaires qui votent pour le candidat choisi par le pouvoir. Aucun autre avis n'est accepté. D'où la nécessité de réétudier le vote, entièrement contrôlé, des corps militaires et paramilitaires. Une question qui doit être soumise au débat public. Il est bien entendu établi que la sociologie politique de l'Algérie est flouée par les données officielles. Le pouvoir en place, sans aucune contestation, redessine la carte politique du pays comme il le veut, quand il le veut et où il le veut. Rien n'indique que le pouvoir, qui fonctionne avec les mêmes réflexes depuis l'indépendance de l'Algérie, changera pour la présidentielle de 2019 !
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Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Fayçal Métaoui
Source : www.elwatan.com