L'affirmation du soi

Le besoin de contenance humaine est-il donc aussi fort qu'il en a l'air pour qu'une masse infinie de possesseurs de smartphones soit fortement encline à livrer sa nudité ' La discrétion, cette noble qualité des êtres pensants a fini par s'écarter pour laisser place à la manie généralisée d'étaler ce qu'ils ont de profondes intimités. On trouve de tout dans les réseaux sociaux. Du débile, du simplet, jusqu'aux manifestations infantiles dans un entêtement pour marquer une présence presque pour affirmer que l'on existe. Cela s'apparente à une manifestation forcenée de se frayer une place dans ce monde.Les réseaux sociaux ont fini par être terrifiants par la pauvreté culturelle, intellectuelle et morale que permet de déverser un petit appareil qui a révolutionné le monde. Le réflexe incontrôlable de tapoter sur des touches doit relever de l'ordre de la psychanalyse lorsque le besoin de parader dans les réseaux est caractérisé par l'élan aisé d'aller vers les autres sans les connaître et s'introduire dans une virtualité souvent désespérante.
La drôlerie est manifeste quand quelqu'un du fin fond de Souk Ahras ou de Maghnia se prête à une accommodation à présenter ses condoléances les plus attristées à une famille étrangère qu'il ne connaît ni d'Adam ni d'Eve. Il devient donc probable que les signes de compassion s'adressent à lui-même dans un besoin de reconnaissance existentielle.
Tous les prétextes sont bons pour se soumettre à l'esclavage d'une manie qui tout en permettant d'aborder des inconnus offre aussi curieusement un détachement du réel pour se laisser aller à des commentaires et des observations qui n'intéressent personne. Aller à l'abordage des autres, souvent sinon toujours en s'isolant des autres est un bien curieux phénomène. Leur présence physique ou leur proximité n'a plus aucun sens pour que la vieille convivialité n'ait plus la chaleur humaine d'hier. Dans les cafés, dans les espaces publics, et même dans le regroupement familial, on est absent tout en étant présent.
Le danger du virtuel qui s'est définitivement institué perturbe sérieusement le réel pour dénaturer l'existentiel.