«L'autre jour j'ai rêvé que je me trouvais devant les portes du paradis. Et saint Pierre me disait: "Retourne sur Terre, il n'y a pas de bidonville ici".» Mère Teresa
Quand je vous ai parlé hier de l'immonde cité où croupissent trois générations de citoyens abandonnés à leur sort par une administration sans conscience, je vous avais bien dit qu'une crise pouvait engendrer une autre.
D'abord, il faut se mettre dans la tête que quand les grands et géniaux planificateurs, qui ont conçu ces grands et hideux ensembles pour contenir tout le monde que la capitale, qui a rétréci considérablement, ne pouvait contenir et pour accueillir aussi l'incessant flux migratoire d'un exode rural continu et d'une explosion démographique due sans doute à la température clémente propice à la multiplication des cellules ou au décodage de Canal +, (ou de ces deux facteurs conjugués), ils n'avaient pas dû prévoir, certainement mus par cette idée généreuse de fournir un toit à chaque famille et de répondre à une crise de logement qui perdure depuis bientôt cinquante ans, les conséquences désastreuses que pouvait engendrer une telle concentration de population ignorante des méthodes Ogino ou autres recettes de contraception. Plusieurs erreurs sont à mettre au tableau de ces concepteurs qui doivent tous, eux, habiter dans des villas grand standing, en évitant de regarder les désastres qu'ils ont causés ou en souriant à chaque fait divers qui émaille une actualité riche par ailleurs de tant d'actes délictueux que toute la presse à sensations ne pourrait contenir.
La première est que cette cité, comme beaucoup d'autres, est trop vaste: elle occupe un large territoire limité par plusieurs axes à circulation très dense qu'elle partage avec de grandes propriétés privées, une France de petites maisonnettes construites en briques en parpaing et dont le caractère juridique est aussi flou que celui dont jouit une partie de cette cité. La deuxième erreur est que les immeubles sont non seulement proches les uns des autres, mais aussi comportent des tours de dix étages avec trois ou quatre familles à chaque étage. Bien entendu, ces tours à 10 étages étaient toutes équipées d'un ascenseur fonctionnel à l'origine (nous reparlerons plus tard de cet outil indispensable aux sexagénaires).
Nos planificateurs, toujours pressés pour répondre à une demande urgente, n'avaient pas pensé que les êtres vivant à l'intérieur de ces cages allaient faire des petits mais que les immeubles, hélas, ne se multiplieront pas.
L'autre erreur monumentale est d'avoir groupé des populations d'origines sociales diverses: des îlots dénommés administrativement «unités de voisinage» ont été affectés d'abord à des fonctionnaires des divers ministères. Une unité a été réservée à ceux qui dépendent du ministère de la Défense tandis que d'autres ont été affectées aux familles qui ont dû quitter leur quartier originel en raison de la vétusté de leurs habitations.
Les recasés des quartiers de Bab El Oued et de la Casbah occupent deux immenses blocs que sépare un carrefour: ce qui n'empêche pas les délinquants de ces deux quartiers de se livrer une guerre qui se traduit par des descentes musclées d'énergumènes brandissant des armes blanches: cela rappelle celles des quartiers noirs des mégapoles américaines. Enfin, il y a une unité de voisinage qui a un statut particulier et qui abrite des citoyens qui ont épargné des années durant pour bénéficier d'un toit grâce à la conjugaison providentielle de la Cnep et de l'Eplf.
Cette unité, qui aurait dû bénéficier d'un statut privilégié, souffre cependant d'un mal congénital hérité d'une administration dont le principal souci était peut-être d'aligner des chiffres pour pouvoir les offrir à des statistiques qui orneraient les bilans des gestionnaires qui ont l'habitude de claironner leurs réalisations au micro en rythmant de leur poing sur la table, les points qu'ils ont marqués à leurs adversaires.
Les habitations Cnep-Eplf n'ont pas, plus de vingt années après leur réalisation, un acte notarial qui puisse sanctionner une quelconque propriété. Il faut le faire! Ils l'ont fait!
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Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Selim M'SILI
Source : www.lexpressiondz.com