Mers-el-Kébir, dont le nom signifie « le grand port » en arabe (المرسى الكبير), a une histoire riche marquée par des occupations successives. Dès l’Antiquité, le site était un port punique puis romain sous le nom de Portus Divinus. Au XIIe siècle, les Almohades en firent un arsenal naval, avant qu’il ne passe sous le contrôle des Zianides de Tlemcen au XVe siècle. À partir de 1492, il devint un repaire de corsaires, attirant l’attention des puissances européennes.
Occupation espagnole (1505-1792) : En 1505, les Espagnols, dirigés par le cardinal Cisneros, s’emparèrent de Mers-el-Kébir (qu’ils nommèrent Mazalquivir) et en firent une base pour conquérir Oran en 1509. Ils construisirent plusieurs forts pour protéger le port, notamment le Fort de Mers-el-Kébir et des structures satellites comme le Fort des Saints (Fortaleça los Santos). Ces fortifications furent renforcées au fil des siècles pour contrer les assauts ottomans et locaux. Les Espagnols perdirent temporairement le contrôle en 1708 face au bey Mustapha Bouchelaghem, avant de reprendre la ville en 1732 grâce à la victoire du duc de Montemar à Aïn-el-Turk. Cependant, après un long siège et un séisme en 1790, ils cédèrent Mers-el-Kébir et Oran au Dey d’Alger en 1792.
Période française (1830-1962) : Après la conquête française en 1830, Mers-el-Kébir fut transformé en une base navale majeure. Les Français modernisèrent les fortifications existantes et en construisirent de nouvelles, notamment le Fort Saint-André, doté d’un phare (détruit pendant la Seconde Guerre mondiale). En 1937, l’amiral Darlan développa la base pour en faire un pivot stratégique en Méditerranée. Le site devint célèbre lors de l’attaque britannique du 3 juillet 1940 (Opération Catapult), où une grande partie de la flotte française fut détruite pour éviter qu’elle ne tombe aux mains des Allemands après la capitulation de la France.
Post-indépendance (1962-présent) : Après les accords d’Évian en 1962, la France conserva la base jusqu’en 1968, date à laquelle elle fut remise à l’Algérie. Aujourd’hui, Mers-el-Kébir est la principale base navale de la marine algérienne, et certains forts historiques subsistent, bien que leur état varie.
Principaux Forts
Fort de Mers-el-Kébir (Bordj Mers-el-Kébir) :
Construit initialement par les Espagnols, ce fort domine le port et servait à protéger l’entrée de la rade. Il fut renforcé par les Français pour abriter des batteries d’artillerie lourde. En 1940, il joua un rôle défensif lors de l’attaque britannique, bien que son armement (canons côtiers et batteries antiaériennes) ne pût empêcher la destruction de la flotte.
Fort des Saints (Fortaleça los Santos) :
Érigé par les Espagnols au XVIe siècle, ce fort fut un point clé lors des sièges ottomans, notamment en 1563 sous Hassan Pacha. Il fut repris et restauré à plusieurs reprises avant d’être intégré aux défenses françaises.
Fort Saint-André :
Développé par les Français à partir des structures espagnoles, il servait de poste de commandement et de vigie. Son phare, construit en 1868, fut un repère maritime jusqu’à sa destruction pendant la guerre.
Fortifications satellites :
Des forts secondaires, comme le Fort San Miguel (situé entre Mers-el-Kébir et Oran), furent construits pour relier les deux villes et renforcer le système défensif espagnol. Ces structures furent également utilisées lors des conflits ultérieurs.
Rôle Stratégique
La configuration naturelle de Mers-el-Kébir – une rade bien protégée entre le massif du Murdjajo et la mer – en a fait un site idéal pour les fortifications. Les forts contrôlaient l’accès au port, défendaient contre les attaques terrestres et maritimes, et servaient de base logistique pour les opérations navales. Pendant la Seconde Guerre mondiale, la présence de la flotte française (incluant des cuirassés comme le Bretagne et le Dunkerque) souligna son importance, rendant l’attaque britannique inévitable.
État Actuel
Aujourd’hui, certains forts subsistent sous forme de vestiges, intégrés à la base navale algérienne. Le Fort de Mers-el-Kébir reste partiellement visible, bien que l’accès soit restreint en raison de son usage militaire. Le site conserve une valeur historique, témoignant des luttes entre puissances méditerranéennes, mais il nécessite des efforts de préservation pour éviter une dégradation complète.
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Posté par : patrimoinealgerie