Oran - Revue de Presse



Le nettoyage, un credo Le propos peut prêter à sourire. Il risque même de susciter une moue dédaigneuse. Le cadavre « exquis » est aujourd?hui en bien piteux état. Il provoque la compassion, des regrets amers. Et pourtant, du temps de sa splendeur, La Casbah était soumise à un régime de nettoyage scrupuleux, quotidien, pointilleux. Chaque maison était lavée, de fond en comble, dès que le jour se lève. Cette tâche est exécutée par les femmes. Elle rythme leur existence. La bâtisse se compose de deux à trois paliers. On y accède par le hall (sqifa). On débouche sur le patio (wast eddar) et on accède ensuite à la terrasse (s?tah). Tout est nettoyé. Un contrôle minutieux est instauré. Rien n?est laissé au hasard. La négligence, la paresse donnent lieu à des sarcasmes, des réprimandes, des remarques acerbes et discourtoises. Cela peut paraître aujourd?hui inconvenant, dévalorisant mais c?était une façon de juger la femme, de conditionner même son devenir. L?entretien de la maison renforce l?estime de ses occupants. Il y a deux manières d?entretenir la maison. Un nettoyage quotidien que nous venons de décrire succinctement et un badigeonnage systématique qui s?effectue à l?occasion des mariages, d?une circoncision, à l?approche du mois sacré du Ramadhan. On utilise de la chaux (el djir) et une espèce de colorant (nila). Les locataires s?engagent à honorer toutes les dépenses induites. Les indigents en sont exempts. Le règlement était tacitement respecté. Il s?agit de la parole engagée. Pour bien comprendre ce souci de cohabiter avec un maximum de convivialité, rappelons que le nouveau locataire est soumis à une véritable enquête. On cherche des garantis, on prend ses précautions. L?adage populaire est d?ailleurs révélateur à ce titre : on rappelle toujours qu?il faut choisir son voisin avant de choisir sa maison. Habiter, c?est s?astreindre à respecter un code de conduite rigoureux. D?ailleurs, tous les vieux habitants de La Casbah peuvent aisément l?attester. On ne loge plus. On signe un bail à vie. Il n?y a nul excès dans cette affirmation. Après l?indépendance, beaucoup de locataires ont choisi d?habiter la ville européenne. Ils ont su maintenir des liens étroits qui survécurent à leur éparpillement. En bref, parler de maison, c?est évoquer « darna » avec tout ce que cela charrie en termes d?affectivité. La maison est réellement la demeure de l?être. 

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