Durant les années 70, les salles de cinéma, qui étaient au nombre d'une trentaine, attiraient en grand nombre les amateurs du 7ème art, et chacun avait l'embarras du choix...Hormis le Ramadhan, et ses soirées, El Bahia a depuis longtemps tourné le dos à son passé qui a marqué plusieurs générations et ce, dans tous les domaines et par ricochet dans le domaine culturel et sportif où ne subsistent pour le moment que des souvenirs lointains. Oran est devenue, par un tour de passe-passe, un véritable dortoir à ciel ouvert où dès la tombée de la nuit sous la lumière blafarde de certains candélabres qui ont survécu au passage des prédateurs, on aperçoit ça et là des ombres furtives qui pressent le pas afin de ne point rencontrer sur leurs chemins quelques brigands ou marauds des temps modernes.
A partir de 21 h, c'est presque le black-out où seuls quelques téméraires se hasardent à musarder ça et là. L'époque où l'Oranais pouvait se permettre, après un dur labeur pendant la journée, de flâner à sa guise et humer l'air marin sur le fameux balcon du Front de mer et ce, en toute quiétude, même à une heure des plus tardives, est révolue. A cette époque, les spectacles de nuit étaient le dada des Oranaises et Oranais et on pouvait se déplacer en famille sans être importuné par quiconque tant la bonhomie et la convivialité étaient de mise.
Les salles de cinéma, qui étaient au nombre d'une trentaine, attiraient en grand nombre les amateurs du 7ème art, et chacun avait l'embarras du choix entre les films américains, français, italiens, hindous ou égyptiens. Idem pour le théâtre qui lui aussi ne désemplissait pas avec les fameuses pièces de feu Alloula ou les «El Khobza», «Lajoued», «El Litam», «Hammam rabi» ainsi que d'autres représentations nationales comme les «concierges» de Rouiched, «El Hafila Tassir» de Azzedine Medjoubi et tant d'autres plus prestigieuses qui étaient la fierté du temple du 4ème art qui est situé en plein centre-ville, plus précisément à la place du 1er Novembre.
Les récitals et autres concerts de musique étaient l'apanage de la salle Hamou Boutlelis (ex-Palais des Sports) où les plus grandes vedettes de la chanson algérienne se produisaient devant un public connaisseur et mélomane.
Un passé radieux
«Oran by night» grouillait par le biais d'une foule hétéroclite où l'on pouvait apercevoir les cafétérias et autres snacks ouvrir même tard dans la nuit. Même le stade du 19 Juin (actuellement Zabana ) attirait ses férus surtout ceux du fameux Mouloudia des Belkedrouci, feu Freha, Ounès, Medjahed et autres Chaïb ou les matchs étaient programmés à 20 h sous les feux scintillants des projecteurs. A chaque match nocturne, le stade avoisinait les 30 000 spectateurs dans une féerie bon enfant où la trompette et les karkabous y ajoutaient leurs bémols pour mieux épicer la fiesta noctambule.
Le macadam d'El Bahia était d'une propreté impeccable où les enseignes lumineuses rivalisaient entres elles, d'où le fameux sobriquet «Oran, ville lumière». Les années 60,70 et même 80, cette ville était à son summum et était accueillante, charmeuse et attirante à tout point de vue et l'entraide et la solidarité n'étaient point un vain mot. Pour beaucoup de nostalgiques, «tout cela a disparu aujourd'hui, comme par enchantement, et il n'est resté que les souvenirs».
Beaucoup se désolent de voir, dans l'Oran d'aujourd'hui, régner en maître «la roublardise, la saleté, les trottoirs défoncés, des devantures de magasins frisant la saleté même au centre-ville» et pour rajouter à cette mystification des plus incongrues, Oran est un grand chantier perpétuel à ciel ouvert qui n'en finit pas d'exacerber les riverains par le biais d'interminables bouchons où les accrochages entre automobilistes sont devenus monnaie courante. Pour enfoncer encore le clou à cette monotonie récurrente, «certaines venelles, ruelles et impasses dans certains quartiers sont devenues pour les habitants de véritables coupe-gorge». Comme l'a si bien résumé un sexagénaire : «de notre temps, il n'y avait pas cela, on formait tous une famille et gare à celui qui voulait outrepasser les limites, el horma, tu comprends !
Le voisinage était sacré, tout le monde s'entraidait, s'il y avait des différends, c est le doyen du quartier qui s'interposait et tout finissait par un couscous succulent dans la bonne humeur. La vie à Oran n'était pas chère, la sardine était le plat du pauvre, le luxe n'existait pas, c'est cela qui a fini par imploser les familles. M'dina Jdida était le poumon d'Oran et les petites bourses pouvaient se permettre, de temps en temps, de s'offrir un repas pantagruélique qui sera partagé avec les voisins, à l'Esplanade (Tahtaha ), les 45 tours faisaient chauffer l'ambiance dans les cafés maures qui étaient aussi le lieu de rendez-vous des Oranais qui trouvaient là un lieu de détente en écoutant religieusement les mélopées des Farid El Atrach, Abdelwahab et Oum Keltoum tout en sirotant un thé à la menthe ou un café préparé sur les braises».
Selon ce sexagénaire, «aujourd'hui, Oran est livrée à elle-même. Voyez l'incivisme des gens qui jettent à tout venant leurs ordures, confirmant par là que les m'urs ont beaucoup changé. Côté distraction, tout a fichu le camp: pas de cinéma, pas de festivités à part quelques-unes élaborées ça et là et qui n'attirent plus la grande foule tant la monotonie et les agressions perpétuelles sont devenues une seconde nature».
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Posté par : presse-algerie
Ecrit par : B Halim
Source : www.elwatan.com