Naama - 08- La guerre de libération

Ain Sefra : Dzira Le camp de Torture


Ain Sefra : Dzira Le camp de Torture
« L’histoire nous inspire une aversion, une horreur pour le crime, fût-il revêtu de pourpre et placé sur le trône » -Rollin-
A partir du mois d’août 1960, pris de court par la précipitation des évènements : Audience élargie du FLN au sein des populations, succès militaires remportés par l’ALN d’une part, les négociations secrètes entres les autorités officielles de Paris et des représentants du GPRA sur des perspectives d’indépendance de l’Algérie, d’autre part, le pouvoir colonial ne trouve pas mieux que de s’acharner sur des populations civiles, sans défense, en les déportant en masse au lieu dit " la DZIRA".
Lorsque l’on étudie les structures du camp de la DZIRA, la composition humaine chargée de son fonctionnement, l’on comprend mieux que ce camp ne fut pas improvisé mais conçu dans des buts bien précis : démanteler, du moins, bouleverser l’organisation du FLN et son aile armée l’ALN.
Le secteur militaire d’Ain Sefra s’étendait d’Ain Sefra ville, à Hjerat le Meguil ; NON, ce n’était pas Buchenwald ou Auschwitz, en terre d’Allemagne ; C’était la Dzira, en terre algérienne, plus exactement Ain Sefra, ville martyre et porte flambeau du nationalisme dans le sud-ouest oranais. C’est là que fut construit un camp de concentration pour populations civiles.
Si la 2em guerre mondiale n’avait pas pris fin en mai 1945, l’on se serait cru en face d’un authentique camp de déportation hitlérien. En effet, la Dzira était une analogie frappante avec les camps de concentration hitlériens par les cruautés que subissaient les détenus, analogie, aussi, par l’isolement du lieu : 5 k d’Ain-Sefra, à hauteur du Sud-Est du Ksar Sidi Boutkhil.
La Dzira n’était qu’un « cliché » assez réduit d’un système honni qui ne se différenciait, en rien, du système Nazi ni par les conditions de détention, ni par la détermination d’exterminer le plus grand nombre de personnes dont le crime était d’avoir dit non à la colonisation de leur pays.
Beaucoup d’entre ces familles gardent, jusqu’à présent, des séquelles physiques et psychologiques. Humiliés, avilis, des hommes et des femmes étaient parqués sans la moindre considération de leur personne, dans des espaces spécialement aménagés, entourés de fils barbelés et de lignes électrifiées, chef d œuvre digne des conceptions racistes les plus basses.
Les détenus vivaient l’enfer sur place qu’aucune morale ne pouvait tolérer. On y torturait, on y assassinait au non d’un système en déclin. Déjà minés par les conditions de détention inimaginables, les détenus n’avaient, pour visiteurs, que des vautours, rapaces voraces, à l’extrême et qui attendaient, impatiemment, d’intervenir à leur tour.
La détention massive et sans ménagement de civils fait penser à celle pratiquée par le régime hitlérien d’alors, à cela auréolée, par l’extermination de millions d’êtres humains, dans des conditions horribles.
Roger Ikor déclarait « ce qui frappe dans l’extermination raciste hitlérienne, c’est la bestialité de machine »
Dans la Dzira, les détenus n’étaient pas loin de cette théorie diabolique qu’ils enduraient.
L’apogée de l’horreur, les détenus vivaient l’horreur poussée à son apogée extrême.
Entassés les uns sur les autres dans des cellules étroites et sans commodité aucune, ils ne pouvaient même pas marcher. Aussi étaient-ils obligés de se tenir debout en dépit de la fatigue et de la faim. A force de rester dans cette position pénible, les membres inférieurs s’ankylosaient. Ce n’était que le baptême prélude à une incarcération qui allait s’annoncer des plus abominables que l’humanité connut.
Le 2em bureau était chargé des interrogations « préliminaires » dites, aussi, de « sélections » et dont dépendaient la vie et la mort de toute personne. Aux yeux de l’administration, tout le monde était suspect. A la tête du 2em bureau se trouvait, généralement, un capitaine officier de Renseignements de l’armée, aidé de sous-officiers et d’éléments subalternes c’était lui qui conduisait les interrogations lesquelles duraient, parfois, jusque tard, dans la nuit.
Le détenu était placé sur une chaise métallique, les bras liés derrière le dos, une lampe de forte puissance, allumée et braquée sur son visage tiré et ruisselant de sueur.
Les internements ne s’arrêtaient pas, seulement aux interrogations, hélas, il y avait : la baignoire, les électrodes, la suspension par les pieds, l’ingurgitation d’eau mélangée à du savon, la position allongée sur le ventre, les bras et pieds écartés, avec un poids de pierre sur la nuque et j’en passe..
Une horreur inqualifiable que de simples mots ne peuvent décrire. Quel que soit le jugement de valeur que l’on porte sur les conditions de détention de la Dzira, la vérité reste bien en déca de ce que les détenus y vécurent, dans la réalité.
Seuls les survivants peuvent, en connaissance de cause, relater ce vécu infernal.
Aux abois, le pouvoir ne faisait aucune distinction entre les jeunes et les moins jeunes, les hommes et les femmes. Parlant de femme, je cite, ici Zohra Bent El Assel, une femme à la force de caractère et qui, de son temps, s’opposait, aux poings aux légionnaires étrangers.
Le 2em Bureau, sorte de gestapo à la Française, faisait subir à ces femmes le même sort incarcéré que celui réservé aux hommes. Le 2em bureau était appelé ironiquement « bureau psychologique » sans doute pour ne pas effaroucher nos populations.
La liste, ci-dessus, montre, à bien des égards, que des familles entières étaient arbitrairement internées dans ce lieu :
- Gordo Laredj - Brik Miloud - Gordo Hadj Ahmed - Sebti Belkacem - Gordo Brahim - Merine Boutkhil - Alla Belhadj - Benatta Ohammed -Alla Abderrahmane - Benatta Hadj Mahi
Alla Hammani - Beghdadi Miloud - Bouchetata Abdallah - Beghdadi Abdelkader - Bouchetata Miloud -Beghdadi Mustapha - Mechraoui Mohammed - Beghdadi Hadj Cheikh
Bahtou Abdelkader - Choumane Ben Amor - Sadok Abderrahmane - Hamadouq Belkheir dit “le mukadem” - Ziane Hamida - Bouamrane Abdelkader - Zeroual Kaddour
Benmiloud Si Kada - Boudaoud Boutkhil - Benmiloud Mohamed - Bendimia Salem - Achour Abdelkader - Djmiel Brahim - Chikhaoui Mohamed - Bendimia Boudjemaa
- Boughoufala Ahmed -Fellah Boudjemaa - Lessehal Aballah - Chenguitti Boutkhil - Lessehal Tahar - Litim Boudjemaa - Belkacimi Abdelkader - Belkacimi Kaci - Radi Mohamed - Bouchareb Mohamed - Benamara Mansour - Zinai Djillali - Merine Mohamed Boubekeur - Boukhalfa Abderrahmane - Benallal Abdelkader - Fardeheb Belkacem - Gasmi Tayeb - Boukhelif Ahmed - Kassou Abderrahmane et Zineb ( sa femme) - Zeroual Boualem - Medkouk Ahmed - Tabet Kheira - Touamdia Kada - Boughrara Kheira - Abdennebi
Il faut ajouter ceux de Asla de Bousemghoun et les Mjadba. (....et beaucoup d'autres que l'auteur a oublié de mentionner...)
Malgré les sévices distillés avec raffinement et sadisme, les détenus ne dénoncèrent, à aucun moment de leur détention, leurs camarades de lutte qui étaient encore en liberté.
C’était, là, une épreuve évidente de courage et d’abnégation qui venait rehausser, plus, leur idéal patriotique. Englobant les Ksours de Sfissifa, Bousemghoun, Moghrar et Tiout.
Le camp de la Dzira se trouvait sous la responsabilité du colonel DESEZE, commandant de la 2em REI, secondé du commandant MET, chef d’état-major.
Le 2em bureau, dirigé par le capitaine Camus, était composé d’éléments spécialement formés pour les tortures et interrogations de « suspects » et de moudjahidine faits prisonniers au cours d’accrochages. Ces éléments étaient dits « délégués aux tortures", tels :
-Le lieutenant Jutiez, qui, en fait dirigeait le camp. Il avait droit de vie et de mort sur les prisonniers
-Le sergent chef CADARS, ancien collaborateurq de Vichy et intégré dans la légion étrangère en 1945.
-Le lieutenant FOUCHET, de la DST de Saida.
-Le lieutenant Djebbour Abdelkader
-Le sous-lieutenant Martin du 17em RA stationné à Tiout.
-Les gendarmes, détachés au 2em Bureau : Le Floch - Torez Attelyn - Martinez Ferrer Foukier
Il est à noter que des chiens policiers, dressés en la circonstance, prenaient part aux tortures.




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