Khenchela - Site archéologique des tombes funéraires Mégalithiques EL KETFE	(Commune de Baghaï, Wilaya de Khench

Le Site Archéologique des Tombes Funéraires Mégalithiques d’El Ketfe : Un Témoignage de l’Aube de l’Histoire


Le Site Archéologique des Tombes Funéraires Mégalithiques d’El Ketfe : Un Témoignage de l’Aube de l’Histoire
Introduction
Le site archéologique d’El Ketfe, situé en Algérie, est un joyau du patrimoine mégalithique qui remonte à l’aube de l’histoire, période protohistorique marquant les débuts de l’évolution des sociétés humaines en Afrique du Nord. Étendu sur environ 8 hectares, ce site se distingue par ses nombreux monuments funéraires, principalement des dolmens, qui témoignent des pratiques funéraires complexes des communautés anciennes. Divisé en deux secteurs principaux – le côté nord avec des dolmens circulaires et le côté sud avec des dolmens carrés – El Ketfe offre un aperçu unique des traditions culturelles et architecturales de l’époque. Classé au niveau national en 2013, ce site souligne l’importance de préserver ce patrimoine face aux menaces modernes. Cet article explore en détail les caractéristiques du site, son contexte historique, son architecture, et les défis liés à sa conservation.
Contexte Historique et Géographique
Le site d’El Ketfe s’inscrit dans la période protohistorique, souvent associée à la seconde moitié du deuxième millénaire avant J.-C. en Afrique du Nord, une ère où les sociétés locales développaient des pratiques funéraires sophistiquées, reflétant des croyances complexes sur la mort et l’au-delà. Ces pratiques mégalithiques, caractérisées par l’érection de structures en pierre massive, sont similaires à celles observées dans d’autres régions de l’Est algérien, notamment à Roknia (Guelma) et Bou Nouara (Constantine), suggérant l’existence d’un réseau culturel régional.
Situé au pied d’une montagne rocheuse, le site bénéficie d’un environnement riche en calcaire, exploité localement pour la construction des dolmens. La répartition des monuments funéraires est inégale : ils sont plus nombreux et concentrés dans la partie est inférieure du site, tandis qu’ils sont moins fréquents dans la partie ouest supérieure. Cette distribution pourrait refléter des choix liés à la topographie, à des considérations rituelles ou à des différences sociales au sein de la communauté.
Structure et Organisation du Site
Le site d’El Ketfe est organisé en deux secteurs distincts, chacun caractérisé par des types spécifiques de dolmens :
Secteur Nord : Dolmens Circulaires

Le côté nord abrite des dolmens de forme circulaire, composés de grandes dalles de pierre disposées en cercle pour former une chambre funéraire, souvent recouverte d’une dalle horizontale. Ces structures servaient probablement de tombes collectives ou individuelles, selon leur taille.
Les dolmens varient en dimensions, allant de petites structures à des monuments plus imposants, ce qui pourrait indiquer des distinctions sociales ou des fonctions variées (par exemple, tombes pour des élites ou pour des groupes familiaux).
Ces dolmens présentent des similitudes avec ceux de Roknia, où plus de 3 000 monuments funéraires ont été recensés, renforçant l’idée d’une tradition mégalithique partagée dans la région.

Secteur Sud : Dolmens Carrés

Le côté sud est caractérisé par des dolmens de forme carrée ou rectangulaire, construits à partir de dalles verticales formant les parois d’une chambre funéraire, surmontées d’une dalle horizontale.
Comme dans le secteur nord, les dolmens varient en taille, suggérant une diversité dans leur usage ou dans le statut des défunts inhumés.
Ces structures sont souvent entourées de cercles de pierres, une caractéristique commune aux sites mégalithiques de l’Est algérien et de la Tunisie voisine, comme le site d’Ellès.

Distribution Géographique

Les monuments funéraires sont particulièrement abondants dans la partie est inférieure du site, où la densité des dolmens, colonnes et murs est plus élevée. Cette concentration pourrait être liée à la proximité d’une carrière de calcaire ou à des raisons symboliques.
À l’inverse, la partie ouest supérieure présente moins de structures, peut-être en raison de contraintes topographiques ou d’une occupation moins intensive.
La position du site au pied d’une montagne rocheuse a fourni un accès direct aux ressources nécessaires à la construction, tout en offrant un cadre naturel propice aux pratiques funéraires.

Matériaux et Techniques de Construction
Utilisation du Calcaire

Les dolmens et autres structures d’El Ketfe ont été construits à partir de calcaire extrait d’une carrière située sur le site même. Cette exploitation locale des ressources démontre une organisation efficace et une connaissance approfondie de l’environnement par les bâtisseurs.
Les dalles de calcaire, soigneusement taillées et assemblées, témoignent d’un savoir-faire technique avancé, notamment dans la manipulation et l’ajustement de blocs parfois massifs.

Carrière Locale

La présence d’une carrière sur le site a permis de réduire les besoins de transport des matériaux, facilitant la construction des dolmens. Cette proximité suggère une planification minutieuse et une coordination communautaire, nécessaires pour extraire, tailler et ériger les pierres.
L’utilisation d’un matériau local renforce également l’ancrage du site dans son environnement naturel, une caractéristique typique des architectures mégalithiques nord-africaines.

Presse à Huile Inachevée

Un élément intrigant du site est la découverte d’une surface de pierre préparée pour servir de presse à huile, mais laissée inachevée pour des raisons inconnues. Cette structure indique la possibilité d’activités économiques, comme la production d’huile d’olive, un produit clé dans l’économie des sociétés méditerranéennes anciennes.
L’abandon de cette presse pourrait être lié à des bouleversements sociaux, économiques ou environnementaux, bien que les causes exactes restent à élucider.

Importance Archéologique et Culturelle
Pratiques Funéraires

Les dolmens d’El Ketfe sont des témoins majeurs des pratiques funéraires protohistoriques, illustrant l’évolution des rites funéraires en Afrique du Nord. Ces structures servaient de tombes, probablement collectives, où les défunts étaient inhumés avec des offrandes ou dans des positions spécifiques, comme la position fœtale, souvent observée dans les sépultures mégalithiques.
L’utilisation de grandes pierres pour protéger les corps reflète une volonté de préserver les défunts des prédateurs et de marquer leur emplacement dans le paysage, une pratique qui traduit des croyances spirituelles profondes.

Comparaisons Régionales

Les dolmens d’El Ketfe partagent des caractéristiques avec d’autres sites mégalithiques algériens, tels que la nécropole de Sigus (Oum El Bouaghi), qui compte plus de 100 monuments funéraires, et Bou Nouara (Constantine), connue pour ses milliers de dolmens. Ces similitudes suggèrent une tradition funéraire commune dans l’Est algérien.
Des parallèles peuvent également être établis avec des sites tunisiens, comme Ellès, où 71 dolmens ont été recensés sur 8 hectares, et avec des traditions mégalithiques plus lointaines, comme celles des Baléares ou de la Sardaigne.

Classement National

Le site a été classé au niveau national le 7 janvier 2013, suite à une proposition de la Commission nationale des biens culturels, reconnaissant son importance comme patrimoine archéologique algérien. Ce statut vise à protéger le site contre les menaces telles que le vandalisme, l’urbanisation et l’exploitation non contrôlée des ressources.

Défis et Perspectives de Conservation
Menaces Actuelles

Comme de nombreux sites archéologiques en Algérie, El Ketfe est confronté à des risques de dégradation dus à l’érosion naturelle, au vandalisme et à l’expansion urbaine. Par exemple, la nécropole de Bou Nouara a été menacée par des activités minières, un problème qui pourrait également toucher El Ketfe si des mesures ne sont pas prises.
Le manque de fouilles archéologiques approfondies limite la compréhension du site. Sans datations précises ou analyses détaillées, il est difficile d’établir une chronologie exacte ou de documenter pleinement les pratiques associées aux dolmens.

Stratégies de Préservation

La préservation d’El Ketfe nécessite des investissements dans la recherche archéologique, notamment des campagnes de fouilles systématiques pour documenter les structures et les artefacts associés.
La promotion du tourisme archéologique et éducatif, comme suggéré pour des sites similaires comme Sigus, pourrait générer des fonds pour la conservation tout en sensibilisant le public à l’importance du patrimoine mégalithique.
Une collaboration internationale, à l’image des partenariats établis pour les sites tunisiens (par exemple, avec l’Institut de recherche pour le développement), pourrait apporter des ressources techniques et scientifiques pour étudier et protéger le site.

Conclusion
Le site archéologique d’El Ketfe est un témoignage exceptionnel des pratiques funéraires et de l’ingéniosité architecturale des sociétés protohistoriques d’Afrique du Nord. Avec ses dolmens circulaires et carrés, ses colonnes de pierre et sa presse à huile inachevée, il offre une fenêtre sur un passé où les communautés honoraient leurs morts à travers des monuments durables. Son classement national en 2013 marque une reconnaissance officielle de sa valeur, mais des efforts accrus sont nécessaires pour le protéger des menaces modernes et révéler tout son potentiel scientifique. En investissant dans la recherche, la conservation et la valorisation touristique, El Ketfe peut devenir un symbole du riche héritage culturel algérien, reliant le présent à l’aube de l’histoire humaine.


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