Khenchela - Site archéologique Henchir Tebrouri	(Commune d'El Mahmal, Wilaya de Khenchela)

Le site archéologique de Henchir Tabrouri : un témoin de l’ère romaine et byzantine dans l’Aurès


Le site archéologique de Henchir Tabrouri : un témoin de l’ère romaine et byzantine dans l’Aurès
Le site archéologique de Henchir Tabrouri, situé dans la commune d’El Mahmal, wilaya de Khenchela, est l’un des joyaux méconnus de la région de l’Aurès, en Algérie. Reconnu pour son importance historique depuis l’Antiquité, ce site conserve des vestiges des périodes romaine et byzantine, notamment un fort, un puits hydraulique, et une nécropole ornée de pierres funéraires et d’inscriptions. Documenté par des chercheurs tels que M. de Bosredon, Charles Masqueray, et J. Birebent dans Aquae Romanae, Henchir Tabrouri offre un aperçu de la vie dans l’Aurès antique. Cet article explore les caractéristiques du site, son contexte historique, et son potentiel en tant que destination archéologique, tout en soulignant les lacunes dans les recherches.
Localisation géographique et stratégique
Henchir Tabrouri se trouve à environ 8 miles (13 km) de la ville de Khenchela, dans la commune d’El Mahmal, au cœur de la région de l’Aurès. Niché sur le plateau de Sebka, une zone fertile qui fut un centre de peuplement important dans l’Antiquité, le site est bordé au nord et à l’est par les pentes des montagnes Tafraout et Chetaïa. Cette position élevée lui conférait une valeur défensive naturelle, tout en offrant une vue dominante sur les plaines environnantes.
Le site était intégré au réseau des voies romaines reliant les grandes cités de la région, notamment :

La voie Lambaesis-Theveste : passant par Timgad (Thamugadi) et Mascula (Khenchela), un axe essentiel pour les déplacements militaires et commerciaux.
Des chemins locaux : reliant Henchir Tabrouri aux plaines agricoles et aux ressources en eau, facilitant l’approvisionnement et les échanges.

Cette position stratégique en faisait un point de contrôle clé, probablement une statio ou un petit avant-poste dans le système du limes, la frontière fortifiée de l’Empire romain.
Les éléments archéologiques
Selon Charles Masqueray, le site se divise en deux secteurs principaux :

Le fort byzantin :

Datant probablement des Ve-VIIe siècles, ce fort s’inscrit dans le réseau de fortifications byzantines érigées pour contrer les incursions tribales dans l’Aurès.
À l’époque coloniale française (1830-1962), le fort était en grande partie ruiné, mais des vestiges de murs et de fondations étaient encore visibles, suggérant une structure défensive compacte mais robuste.
Situé sur une hauteur, le fort permettait de surveiller le puits et les plaines environnantes, renforçant son rôle de protection.

Le puits et la nécropole :

Le puits romain : Décrit en détail par J. Birebent dans Aquae Romanae, ce puits, situé en bordure d’une voie dégradée, est un exemple de l’ingénierie hydraulique romaine. Il se compose de :
Une partie basse romaine : construite avec des blocs de pierre taillée (pierre de taille), témoignant de la précision technique romaine.
Une partie haute locale : reflétant l’influence des populations locales, peut-être à travers des ajouts décoratifs ou fonctionnels.

Le puits servait à irriguer les plaines voisines, mais l’accumulation de débris dans sa partie basse limitait son débit, le rendant suffisant uniquement pour un petit nombre d’habitants et leur bétail.
Lors d’une opération de réhabilitation, le puits a livré des artefacts significatifs, notamment :
Des blocs de pierre taillée (pierre de taille), utilisés dans la construction ou la décoration.
Des sarcophages, datant probablement de l’époque romaine ou byzantine, indiquant une élite locale ou militaire.
Des inscriptions en latin, dont l’une porte des mentions (noms, dates, ou détails administratifs), offrant des indices sur les occupants du site.

Le nettoyage du puits n’a pas été complet, et sa profondeur est estimée à environ 15 mètres, ce qui limitait son capacité à alimenter directement le fort romain situé au sud.

La nécropole funéraire :

La nécropole contient des pierres funéraires de grande valeur, probablement ornées ou gravées, témoignant de pratiques funéraires élaborées.
Les sarcophages et inscriptions suggèrent que la nécropole était réservée à des individus de haut rang, qu’ils soient Romains ou locaux intégrés au système impérial.

Contexte historique
Henchir Tabrouri s’inscrit dans le système défensif et administratif romain de l’Aurès, une région stratégique pour l’Empire romain. À l’époque romaine (Ier-IVe siècles), l’Aurès était géré à travers des cités majeures comme Thamugadi (Timgad), Mascula (Khenchela), et Lambaesis (Lambèse), centres militaires et commerciaux. Henchir Tabrouri, situé sur la voie Lambaesis-Theveste, servait probablement de point de contrôle ou de relais (statio) dans ce réseau.
À l’époque byzantine, après la chute de l’Empire romain d’Occident (Ve siècle), le site fut réutilisé dans le cadre des fortifications contre les soulèvements tribaux. Le fort byzantin, mentionné par Masqueray, reflète cette phase de réorganisation militaire.
M. de Bosredon note que Henchir Tabrouri était le dernier grand centre de peuplement du plateau de Sebka, soulignant son rôle de noyau local pour les habitants et l’économie. Le puits, avec son design hybride (romain et local), illustre l’interaction entre les techniques romaines et les pratiques indigènes, un trait commun dans l’Aurès, comme à Aquae Flavianae (Hammam Essalihine).
Importance du site

Stratégique : Sa position sur une voie romaine et près des montagnes Tafraout et Chetaïa en faisait un point de surveillance idéal, notamment pour protéger les ressources en eau et agricoles.
Culturelle : Les inscriptions et sarcophages révèlent une fusion des cultures romaine et locale (numide/amazighe), les inscriptions pouvant mentionner des noms romains ou locaux intégrés à l’administration impériale.
Hydraulique : Le puits, comme décrit par Birebent, est un exemple de l’expertise romaine en gestion de l’eau, essentielle dans une région semi-aride comme l’Aurès.

Manque d’études et perspectives futures
Malgré son importance, Henchir Tabrouri n’a pas bénéficié de fouilles archéologiques exhaustives, à l’instar de nombreux sites secondaires en Algérie, éclipsés par des centres comme Timgad ou Djemila. À l’époque coloniale, des chercheurs comme Bosredon et Masqueray ont documenté certains éléments, mais les études modernes restent rares. Les points suivants émergent :

La réhabilitation du puits a révélé des artefacts précieux, mais leur documentation reste incomplète.
Le fort byzantin et la nécropole pourraient receler d’autres vestiges, comme des murs ou des outils, attendant des fouilles.
Des techniques modernes, telles que la photographie aérienne ou la géophysique, pourraient dévoiler des structures enfouies, comme des entrepôts ou des habitations.

Éléments enrichis
Pour approfondir la compréhension de Henchir Tabrouri, voici des ajouts basés sur le contexte archéologique :

Réseau routier romain : Henchir Tabrouri s’intégrait dans un réseau routier plus large reliant Lambaesis à Theveste via Timgad et Mascula, comme mentionné dans des sources comme l’Itinerarium Antonini. Ces voies étaient vitales pour le transport des troupes et des marchandises.
Influence numide : Avant l’arrivée des Romains, l’Aurès était un bastion numide. La nécropole pourrait contenir des éléments funéraires numides, comparables à ceux du mausolée de Medracen (Batna), suggérant une continuité culturelle.
Environnement naturel : Le plateau de Sebka, avec sa fertilité relative, soutenait l’agriculture et l’élevage, faisant de Henchir Tabrouri un petit centre économique. Les montagnes Tafraout et Chetaïa offraient une protection naturelle et des ressources comme la pierre.
Comparaison avec d’autres sites : Henchir Tabrouri ressemble à d’autres sites secondaires de l’Aurès, comme Henchir el-Ksar ou Henchir Ghoufi, qui combinent forts et infrastructures hydrauliques. Une comparaison avec Aquae Flavianae (Hammam Essalihine) révèle des similitudes dans la gestion de l’eau.

Pourquoi visiter Henchir Tabrouri ?
Henchir Tabrouri est une destination idéale pour les amateurs d’histoire et d’archéologie en quête de sites moins connus. Ses vestiges, du fort byzantin au puits romain en passant par les inscriptions funéraires, offrent un aperçu de la vie dans l’Aurès antique. Le cadre naturel, avec les montagnes Tafraout et Chetaïa, ajoute une dimension pittoresque à l’expérience. Une visite au printemps ou en automne, accompagnée d’un guide local, permet d’apprécier pleinement le contexte historique du site.
Efforts de préservation
Comme d’autres sites secondaires en Algérie, Henchir Tabrouri est vulnérable à l’érosion, à la négligence, et au manque de financement. À l’époque coloniale, ses vestiges étaient encore bien visibles, mais leur état actuel pourrait être préoccupant. Les programmes nationaux de préservation, gérés par la Direction de la Culture ou l’Institut National du Patrimoine, pourraient protéger le site. Un classement comme patrimoine national ou mondial attirerait l’attention sur Henchir Tabrouri et encouragerait des fouilles et un tourisme durable.
Conclusion
Le site archéologique de Henchir Tabrouri, dans la commune d’El Mahmal, est un témoin silencieux de l’histoire de l’Aurès, où se mêlent l’ingéniosité romaine en matière d’hydraulique et d’urbanisme, et l’héritage byzantin des fortifications. Du puits romain orné aux ruines du fort et aux inscriptions funéraires, le site raconte une histoire d’interaction entre les civilisations romaine, byzantine, et locale. Malgré le manque d’études approfondies, Henchir Tabrouri offre un potentiel immense comme destination archéologique et touristique. Avec des efforts accrus de préservation et de recherche, ce site mérite une place de choix dans le patrimoine algérien, offrant aux visiteurs une fenêtre sur un passé riche et complexe.


Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)