
La nécropole mégalithique de Roknia, située dans la wilaya de Guelma, au nord-est de l'Algérie, est l'un des sites archéologiques les plus remarquables d'Afrique du Nord. Considérée comme la plus grande et l'une des plus anciennes nécropoles mégalithiques du continent, elle offre un aperçu fascinant des pratiques funéraires et des croyances des sociétés préhistoriques. Ce site, classé patrimoine culturel algérien, abrite plus de 3 000 tombes mégalithiques, principalement des dolmens, et environ 300 tombes en forme de « hawanits » (petites boutiques ou cavités). Cet article explore l'emplacement, l'histoire, les caractéristiques architecturales, les découvertes archéologiques, et l'importance culturelle de ce site exceptionnel.
La nécropole de Roknia se trouve à environ 35 km au nord-ouest de la ville de Guelma, près de la commune de Roknia. Elle est également située à 12 km au nord de Hammam Debagh (anciennement connu sous le nom de Hammam Meskhoutine), une localité réputée pour ses sources thermales. Une autre voie d'accès relie la nécropole à Aïn Zabaa, à une distance de 45 km. Le site s'étend dans une région montagneuse et rocailleuse, offrant un cadre naturel qui a probablement influencé le choix de cet emplacement pour les sépultures. La proximité de ressources naturelles, comme les pierres utilisées pour la construction des dolmens, a facilité l'édification de ces structures massives.
Classée officiellement en 1900 selon le Journal Officiel n°7 du 23 janvier 1968, la nécropole de Roknia est reconnue comme un site d'importance nationale en Algérie. Ce classement reflète son statut de témoin clé de l'histoire préhistorique de la région. Les premières fouilles archéologiques, menées dès 1868, ont révélé des vestiges significatifs, notamment des ossements humains, des coquillages, des poteries et des bijoux rudimentaires, qui témoignent des pratiques funéraires de l'époque.
Les datations du site font l'objet de débats parmi les chercheurs. Selon l'archéologue Bourguiba, les tombes remonteraient à environ 2200 avant notre ère, ce qui les situerait à la fin du Néolithique ou au début de l'âge du bronze. En revanche, le chercheur Broca propose une datation plus récente, autour du XIVe siècle avant notre ère. Ces divergences reflètent la complexité de l'étude des sites mégalithiques, où les méthodes de datation reposent souvent sur des analyses contextuelles et des artefacts limités.
La nécropole de Roknia se distingue par la diversité de ses structures funéraires, qui se répartissent en deux grandes catégories :
Les Dolmens : Ce sont les structures les plus nombreuses, avec plus de 3 000 tombes recensées. Les dolmens, ou « tombes en tables », sont des monuments funéraires constitués de grandes dalles de pierre verticales supportant une dalle horizontale formant un toit. Ces structures varient en taille et en style, allant de formes simples à des constructions plus complexes, reflétant probablement des différences sociales ou des évolutions techniques au sein des communautés qui les ont construites.
Les Hawanits : Environ 300 tombes en forme de « hawanits » (petites cavités ou boutiques creusées dans la roche) complètent la nécropole. Ces structures, moins imposantes que les dolmens, pourraient avoir servi à des sépultures individuelles ou à des offrandes funéraires spécifiques.
Ces deux types de tombes témoignent d'une maîtrise technique impressionnante pour l'époque, notamment dans le transport et l'assemblage de blocs de pierre massifs sans outils métalliques avancés. La disposition des tombes suggère également une organisation réfléchie, possiblement alignée sur des considérations astronomiques ou rituelles, bien que cela reste sujet à des recherches approfondies.
La nécropole de Roknia est un site clé pour comprendre l'évolution des sociétés préhistoriques en Afrique du Nord. Elle reflète le passage des communautés de chasseurs-cueilleurs à des sociétés agricoles plus organisées, où les pratiques funéraires complexes indiquent une structuration sociale et des croyances spirituelles développées. Les dolmens, en particulier, suggèrent un effort collectif important, impliquant une main-d'œuvre organisée et des connaissances techniques avancées.
Les fouilles de 1868 ont permis de découvrir des artefacts qui éclairent les rituels funéraires de l'époque. Les ossements humains, associés à des poteries, des coquillages et des bijoux, indiquent que les défunts étaient inhumés avec des objets de valeur, probablement pour les accompagner dans l'au-delà. Ces pratiques révèlent une croyance en une vie après la mort, un trait commun à de nombreuses cultures mégalithiques à travers le monde.
Le site de Roknia n'est pas isolé. Il s'inscrit dans un réseau plus large de nécropoles mégalithiques dans l'est algérien, notamment celles de Bou Nouara (3 000 à 4 000 dolmens) et de Kteffa. Ces sites, bien que moins vastes que Roknia, partagent des caractéristiques architecturales similaires, suggérant des échanges culturels et techniques entre les communautés de la région.
La nécropole de Roknia se distingue par son ampleur, avec des estimations variant entre 3 000 et 7 000 tombes selon les sources. Cette concentration exceptionnelle en fait la plus grande nécropole mégalithique d'Afrique du Nord. À titre de comparaison, des sites comme Bou Nouara, également dans la wilaya de Guelma, comptent entre 3 000 et 4 000 dolmens, mais sur une superficie plus restreinte. En Europe, des sites comme Stonehenge (Royaume-Uni) ou les dolmens de Bretagne (France) partagent des similitudes architecturales, mais diffèrent par leur contexte culturel et leur fonction, souvent plus rituelle que funéraire.
La nécropole de Roknia est aujourd'hui un site touristique majeur dans la wilaya de Guelma, attirant les amateurs d'histoire et d'archéologie. Sa proximité avec d'autres attractions, comme les thermes de Hammam Debagh ou le théâtre romain de Guelma, en fait une destination intégrée dans les circuits culturels de la région. Cependant, le site fait face à des défis de préservation, notamment en raison de l'érosion naturelle et des risques de dégradation liés à l'activité humaine. Des efforts de conservation sont nécessaires pour protéger ce patrimoine unique et assurer sa transmission aux générations futures.
La nécropole mégalithique de Roknia est bien plus qu'un simple cimetière préhistorique : elle est un témoignage vivant des premières sociétés complexes d'Afrique du Nord. Avec ses milliers de dolmens et de hawanits, elle offre une fenêtre sur les croyances, les techniques et l'organisation sociale des populations qui l'ont érigée il y a des millénaires. Classée patrimoine national, elle continue de fasciner les chercheurs et les visiteurs, tout en rappelant l'importance de préserver ces vestiges pour mieux comprendre notre passé commun. En explorant Roknia, on touche à l'essence même de l'aube de l'histoire humaine, où chaque pierre raconte une histoire de vie, de mort et de mémoire.
Cartes Patrimoine Culturel Algérien.
Tourisme Wilaya de Guelma.
Ech-Chaab.
Archiqoo.
Posté par : patrimoinealgerie
Ecrit par : Rédaction