Bouira - COMMUNES

Maison de la culture de Bouira Ras El Am ou la réconciliation



Publié le 02.04.2024 dans le Quotidien l’Expression

Ras El Am est une pièce d’une heure. Portée par la troupe de Batna, elle a été jouée mercredi, à l’occasion de la Journée mondiale du théâtre qui se célèbre le 27 mars…

Mettant en scène une famille tranquille, elle a connu un vif succès. En vérité, cette tranquillité n'est qu'apparence. La crise que traverse le foyer, et qui menace son unité, ne sera révélée qu'au cinquième tableau sur lequel tombe le rideau. Sa représentation coïncidait avec la Journée mondiale du théâtre qui se célèbre le 27 mars. L'heure choisie pour le spectacle et qui était conforme au programme spécial Ramadhan conçu par la direction de la culture: 22 heures. Le spectacle s'ouvre sur une querelle. Chérifa, l'aînée des trois filles de la famille El Ouâer (le Terrible) est surprise par sa mère, entrain de téléphoner. Cette dernière, veillant jalousement sur l'éducation de ses filles, cherche à savoir à qui et à quel sujet. La fille accepte de parler, mais met une condition à son aveu: que sa mère ait la patience d'attendre jusqu'à Ras El Am, c'est-à-dire le nouvel an. C'est raisonnable. Le Nouvel An est approche. Sauf que la mère ne l'entend pas de cette oreille. Elle veut être mise au courant sur le champ. Le ton monte vite, la mère exigeant tout tout de suite, et la fille s'en tenant à sa condition. Le père qui dort dans sa chambre est réveillé par les éclats de voix qui viennent du salon. Il arrive en courant, et voyant les deux femmes qui se disputent, comprend qu'il se passe quelque chose d'assez grave. L'air finaud, en réponse à sa femme qui se pose des questions, il répond: «Je sais tout, j'ai tout entendu.» Un instant Chérifa craint pour son secret. Heureusement, le père n'est pas assez malin pour continuer à jouer sur ce registre. Ne pensant qu'à se goinfrer, il croit que sa fille et sa mère se querellent à propos de quelque plat délicieux. La mère, saisissant la balle au bond, pousse son mari vers sa chambre en lui promettant tous les plats qu'il veut. Cependant, la mère est de plus en plus tourmentée. Elle sent que la tranquillité et la sécurité même de son foyer dépendent du secret de sa fille. Mais comment l'amener à se confesser? Le tableau 2 montre une femme au bord de la crise de nerf. Le père, lui, tout à fait rassuré, roucoule comme un pigeon autour de sa femme. Au tableau 3, on découvre que Chérifa a un galant. Il s'appelle Ahmida et veut l'épouser. Ce dernier, ayant appris que le père de Chérifa veut vendre la maison à l'insu de toute la famille, sauf de sa bien aimée, projette de se porter acquéreur afin qu'elle reste entre les mains de sa famille. Ce geste chevaleresque indique quelle sorte d'amour file les deux tourtereaux. Cette conception de l'amour est critiquée par Wissal, la deuxième fille de El Ouâer (le Terrible). Les lettres enflammées, les discours emphatiques et langoureux, lui paraissent ridicules, d'un autre temps. Ahlem, la troisième, qui est hôtesse de l'air rêve d'acheter une voiture. Mais comme elle n'a pas les moyens, elle se tourne vers son papa pour qu'il exhausse son voeu. Le hic est que ce dernier ne peut le faire qu'en vendant la maison. Wissal qui est une influenceuse et dans le secret de Chérifa, ironise devant Ahlem: «Ta voiture, tu peux l'attendre longtemps.» Allusion à l'achat de la maison paternelle par l'amoureux de leur aînée. Mais déjà l'influenceuse a lancé l'information sur son site: leur maison va être vendue. Le coup de théâtre vient au cinquième tableau. C'est Ras El Am. Le père qui veut que l'on fête l'événement avec la bûche et sa femme qui souhaite passer la fête à la campagne dans la pure tradition de ses parents s'affrontent un instant. Chérifa entre en scène et fait savoir que son père désire vendre leur maison. La mère entre dans une violente colère. On découvre alors que le père nourrissait depuis longtemps l'espoir de refaire sa vie. Sa femme ne lui donnait que des filles. Il voulait des garçons! Voilà pourquoi il voulait vendre. La mère est de nouveau au bord de la crise de nerf. C'est au milieu de cette scène déchirante qu'éclate la voix off de Ahmida. Il demande à la mère la main de Chérifa et lui apprend qu'il n'a acheté la maison que pour la mettre à son nom. Elle est désormais à elle. Le père touché par l'état où il a mis sa femme, demande pardon et le rideau tombe sur une famille de nouveau rassemblée dans le salon, et s'apprêtant à célébrer Ennayer selon la tradition. La pièce écrite par Messaoud Hdjara, mise en scène par Ali Djbara montre une famille au bord de l'éclatement. On croit que le danger vient de deux courants d'idées diamétralement opposées, les unes conservatrices, les autres progressistes: Chérifa, la romantique, Wissal, la youtubeuse, (qui l'aurait cru?) et leur mère représentant la tradition, d'un côté, et, de l'autre, le père qui rêve de fêter le Nouvel An avec bûche et tout, et Ahlem qui ambitionne de posséder une belle voiture. Mais tout cela n'est que la partie visible de l'iceberg. Le drame qui couve dans cette famille a une autre origine. Le père veut se remarier. Il veut une femme un peu plus dans le vent. Le désir d'avoir des enfants n'est qu'un prétexte. Nos remerciements vont au régisseur Younès Benhamidi et à la chargée de communication Sarah Laoufi qui nous ont aidés à comprendre tous les tenants et aboutissants de cette pièce à la fois drôle et pleines d'enseignement.
Ali DOUIDI



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