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Virée dans un site qui se perd




Virée dans un site qui se perd
Il y a 58 ans se tenait dans cette petite maison faite de pierres et de terre, nichée au flanc de la montagne, dans le village Ifri-Ouzellaguen, à une cinquantaine de kilomètres au sud-est de Béjaïa, le plus important Congrès qui a changé l'architecture et la trajectoire de la Révolution algérienne. De grands noms de moudjahidine y ont participé.Tels que Abane Ramdane, Larbi Ben M'hidi, Abderrahmane Mira, le commandant Kaci, Mohand Oulhadj et Mahiouz qui étaient soutenus par la population locale. Que reste-t-il de ce haut lieu de l'histoire, témoin d'une phase décisive de la lutte armée et politique contre le colonialisme français ' Virée au musée du Congrès de la Soummam.En cette matinée d'été, nous empruntons le chemin sinueux qui mène vers le village Ifri, qui se situe à 8 km d'Ighzer Amokrane, chef-lieu de la commune d'Ouzellaguen. La route est vide ; en dehors de ces camions de l'APC qui font le va-et-vient entre le site et la vallée. A deux jours de la commémoration du 58e anniversaire de la tenue du Congrès de la Soummam, c'est le branle-bas dans l'enceinte du musée. Des agents de nettoiement de l'APC sont à pied d'?uvre, d'autres s'affairent à installer une scène pour accueillir une soirée artistique et la visite des officiels.Pendant que les autorités s'attellent à folkloriser l'événement, des formations politique telles que le FFS, le RCD et le Forum socialiste (dissidents du FFS) préparent meetings et conférences. Une fois à l'intérieur, le visiteur est ému. Il est à la fois fier et déçu par ce qui s'offre à ces yeux. Car tout témoigne de l'état d'abandon du site. L'usure du temps, l'érosion est perceptible sur les murs, les gradins et les stèles commémoratives installées par des associations. Face à l'insouciance des décideurs, le site se perd.Les escaliers qui mènent vers la petite maison kabyle de trois pièces qui a vu défiler les congressistes sont envahis par les herbes folles qui défoncent également les dalles de marbre qui finissent par s'arracher. Les petits espaces verts qui ornent la place du musée sont défraîchis uniquement en été, à l'approche de chaque 20 août.Les bancs installés en guise de gradin faisant face à la scène sont dégradés, rouillés. «Enlevez-moi toutes ces planches et cachez-les. Il ne faut pas que les déchets soient visibles pour la délégation officielle», crie le chef des ouvriers. Un autre agent demande au directeur du musée s'il y a une source d'énergie électrique pour utiliser une tronçonneuse. «Non, il n'y en pas de ce côté-là», se désole le directeur auprès de l'agent de l'APC qui se gratte la tête.Plus loin, les deux blocs qui constituent les salles d'exposition et de conférence «ne paient pas de mine». Derrière ces murs décrépits, la direction du musée n'offre pas grand-chose aux visiteurs. Le fonds documentaire et le nombre de pièces historiques sont insignifiants, ne reflétant pas le valeureux passé de la région qui a donné 1500 chahids. «Je suis complètement choqué, je ne m'attendais pas à voir un site aussi important de notre histoire partir en ruine sans que cela ne suscite l'inquiétude des ministres et des responsables locaux qui visitent chaque année ce musée», dit Adel, qui visite pour la première fois les lieux. Ce n'est pas tout.La salle de projection (d'une capacité de 150 places) qui se trouve au sous-sol est carrément hors service. Moisissures, infiltrations d'eau, sièges détruits? son état est lamentable. Accosté à la sortie de son bureau, le directeur du musée, Yaddaden Rachid, semble n'avoir que de tristes rapports à remettre aux autorités centrales et attendre. Selon lui, la dernière opération d'entretien qui a été engagée ici date de l'année 2006 !Mais, dit-il, «la direction de la culture de Béjaïa a inscrit un projet d'aménagement qui devait démarrer cet été, mais nous avons reporté les travaux afin de changer l'intitulé du programme.» En effet, la direction du musée a proposé l'élaboration d'une étude par un bureau spécialisé et inclure dans le projet d'autres opérations, comme l'équipement des salles d'exposition. Sur un autre volet, le responsable a sollicité les pouvoirs publics dans le but de recruter un guide de métier et deux gardiens de nuit ainsi que le raccordement du musée au réseau téléphonique.«Nous sommes toujours en train de nous battre pour placer ce musée sous la tutelle directe du ministère des Moudjahidine, pour qu'il ait une source permanente de financement nécessaire à son entretien», nous déclare pour sa part le secrétaire général de l'Organisation locale des enfants de chouhada (ONEC), Ahcen Sadki. Mais, malheureusement, «au pouvoir, il y a toujours des gens qui ont été de tout temps contre le Congrès de la Soummam et ils gouvernent toujours. A mon avis, il ne faut pas attendre grand-chose de ce régime ; nous devons nous prendre en charge pour sauvegarder ce patrimoine historique», ajoute Ahcen Sadki.







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