Une salle de cinéma transformée en annexe d'un service d'état civil

A. LemiliLa transformation d'une salle de cinéma en annexe du service d'état civil dela deuxième ville par son importance toutes natures confondues, Khroub en l'occurrence, renseigne, il ne saurait mieux l'être, sur le devenir dela culture dans la wilaya de Constantine. Une wilaya qui, est-il besoin de le seriner, accueille un évènement international censé en démultiplier un orgueil perdu. Il s'agit du cinéma Massinissa, une salle tout ce qu'il y a de nostalgique pour ce qu'elle peut constituer de liens historique et culturel avec n'importe quelle petite ville ou village du bassin méditerranéen. Une sorte de cinéma Paradisio qui noierait d'émotion toutes les personnes de soixante ans et plus. Installée en plein centre-ville, adossée au bâtiment abritant le siège de la commune, la salle Massinissa avait, il y une huitaine d'années, tout de suite attiré l'attention d'un émissaire de l'Union européenne en visite en Algérie. L'émissaire en question avait pour mission de prospecter, sur informations collectées auprès d'un réseau de relations locales, et trouver des espaces qui s'inscriraient dans la culture méditerranéenne, cette culture qui fait la beauté de Naples, Marseille, Athènes, Alger... L'hôte de Constantine s'y trouvait plus pour avoir une idée plus précise sur le très classique cinéma Cirta, lequel, comble de l'ironie, va disparaître à cause ou grâce, c'est selon (pour une majorité de responsables il ne s'agit-là que d'un point de détail), de l'évènement dit «Constantine, capitale de la culture arabe 2015», au motif que l'hôtel éponyme auquel il est accoudé doit être entièrement repris pour répondre aux normes internationales. Ceci dit, entre autres salles repérées sur une bonne partie du territoire national, le cinéma Cirta intéressait les institutions européennes qui envisageaient, à titre officieux encore, d'intégrer sa sauvegarde en tant que patrimoine culturel dans un projet global de réhabilitation de salles du bassin méditerranéen. Dans le même ordre d'idées, la salle Massinissa avait également conquis l'émissaire européen, quoique cet intérêt n'était sur le moment que personnel et n'engageait en rien l'institution qu'il représentait. Toutefois, la cause pouvait être plaidée en ce sens et par conséquent tout était possible. Là, cela ne semble plus le cas.Il y a quelques mois pourtant, les représentants des pouvoirs publics, et le directeur de la culture en tête, déclaraient que toutes les salles allaient être réhabilitées. Cet engagement solennel devait être entériné avant l'ouverture la manifestation culturelle de 2015 pour que toutes les bonnes résolutions ne soient remises sine die. Autrement dit et connaissant la capacité d'action, la compétence des représentants des pouvoirs publics autant dire que le challenge ne risquait guère d'être relevé et çà a été le cas, puisqu'aucune salle parmi les six existantes dans la wilaya ne sera rouverte. La Maison de la culture et le palais du même nom, en réhabilitation depuis près d'une année serviront d'exutoire. Juste histoire de sauver la face.En réalité toutes les intentons claironnées par les pouvoirs publics affirmant la prochaine réouverture des salles de cinéma à travers le pays relèvent du plus grand ridicule, pour ne pas dire du mensonge, sachant qu'aucune wilaya n'est en mesure de les faire fonctionner en l'absence d'un réseau de distribution de films, d'abord, et pour d'autres raisons multiples, ensuite, dont la plus importante : la désaffection, pour ne pas dire désormais l'absence, d'un public eu égard à toutes les mutations sociales survenues ces trente dernières années. C'est-à-dire depuis que les salles de cinéma ontcommencé à fermer leurs portes.A. L.