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Une légende vivante au Zénith



Une légende vivante au Zénith
La fête sur scèneCe Lounis, simple et timide, a traversé sans carapace, les sentiers escarpés du chant engagé en Algérie. Hier, il était au Zénith. Pleine à craquer, la salle n'arrivait pas à contenir tout ce beau monde.C'était Lounis Aït Menguellet comme on l'aime, comme on l'admire. Lounis des grands jours. Ce Lounis, timide et simple qui a traversé, sans carapace, les sentiers escarpés du chant engagé en Algérie. Hier, il était au Zénith. Pleine à craquer, la salle n'arrivait pas à contenir ce beau monde. Ils étaient tous là, ils sont venus de partout spécialement pour honorer de leur présence les 50 années de vie artistique d'Aït Menguellet, la fierté du Djurdjura. Akli Yahiaten, Akli D., Kamel Hamadi, Mohamed Allaoua, Ali Amrane, Idir,... Nacer Ketan, des maires, des députés, des sénateurs, des opérateurs économiques, des patrons d'industrie, des étudiants, de simples citoyens résidant en France ou en Algérie, tous égaux devant Lounis, pour Lounis et avec Lounis. Toute la Kabylie était au rendez-vous. C'est un sacrilège que de rater un jour de fête, en plein Yennayer, et qui de surcroît était animé par Aït Menguellet. Il s'agit d'une double occasion les 50 ans de carrière de Lounis et le premier jour de l'An berbère. C'est dire que l'histoire s'est invitée elle-même.La billetterie étant épuisée une semaine auparavant, nombreux sont ceux qui n'ont pu se frayer un chemin pour accéder à la salle. Ils ont dû suivre le gala de l'extérieur. Les plus chanceux étaient à l'intérieur de la salle et tout près de la légende vivante. Des familles, des couples, des jeunes et surtout une certaine génération, bercée par les vers d'amour et de révolte entonnés en choeur...Les couleurs des «fotas» et des drapeaux berbères égayaient de leur vivacité des fans acquis à la cause. En rajouter, c'est prêcher des convaincus en ce printemps bien de chez nous qui fleurit en plein hiver parisien.Quand l'artiste paraîtDes salves de youyous et d'applaudissements accompagnent l'apparition d'Aït Menguellet qui fait son entrée sur scène avec un orchestre juste «sobre», aussi modeste que l'est ce grand monsieur de la chanson kabyle. Un décor tout simple: un bassiste, un percussioniste, un flûtiste, un batteur et puis celui que tout le monde attendait, Lounis, fidèle à ses couleurs rouge et noir ou noir et blanc et sa légendaire guitare.Commence alors un hommage aux anciens, les «maîtres», comme aime à les appeler Lounis. Slimane Azem et «A Mouh a Mouh», Taleb Rabeh avec Akli Yahiyaten avec «Jahegh d'amezian», Chérif Kheddam avec «Loukan mazal atsghanigh», Kamel Hamadi avec «Ma Ghaven wid i zawran» ont été ressuscités au Zénith, par la magie de la voix mélodieuse du digne fils d'Ighil Bwamas, l'espace d'une soirée. «J'ai choisi ces textes dont les auteurs sont de ma génération pour certains et d'avant moi pour d'autres, tout en saluant tous ceux que je ne pourrai reprendre l'espace de ce gala», se justifie l'artiste d'une voix timide.Mais Lounis charrie encore de son regard infini de jeunesse. Place alors aux années d'or d'Aït Menguellet avec «Anida digh», «Ourighas tavrats i woul», «Oughaled a yaghriv», «Teltiyam d'ilamriw», «Asligh iw taxi», autant de tubes ayant accompagné de leurs mélodies et textes des générations de Kabyles, hommes et femmes, tous fiers de révâsser, avec passion et nostalgie leurs folles amours. Autant de chansons reprises en choeur par le public aux anges. Comme si dans le coeur de cet artiste légendaire confit dans un succès sans fissures, il y a encore de la place pour les rêves d'adolescence. Au fond de lui-même grouille un royaume merveilleux où pour l'amour de belles filles combattent de preux chevaliers.Il faut dire que Lounis a su installer tantôt un silence de marbre et tantôt une explosion d'euphorie dans la salle. En ouvrant son terroir, le chanteur ravivait les sentiments les plus enfouis et pansait les blessures les plus passionnelles.C'est en cela que c'était aussi un rendez-vous avec ses fans de tout âge. Une chance pour eux que d'avoir à écouter Aït Menguellet déclamer en vers ses sentiments les plus nobles en ces temps où l'amour était tu et les passions réprimées.«Quand j'écoute Lounis, je pars à la rencontre de ma jeunesse», nous répond Na Fadhma, svelte et élégante, la soixantaine tout juste entamée. On allait s'excuser de l'avoir importunée, quand elle esquisse des pas de danse kabyle, en lançant des youyous. Difficile de se frayer un chemin parmi la foule en fête et relever l'ambiance et les impressions des fans en pleine extase. «Asligh iw taxi» a fait régner sur la salle un silence religieux, faisant planer un air de nostalgie plein de regret.50 ans à versifierC'est à un voyage dans le souvenir de leurs amours mortes qu'ont été invités à prendre place les fans de Lounis. Aït Menguellet, le maquisard de la chanson, avait aussi un rendez-vous avec ses engagements politiques et idéologiques. «Ma nanak yougad yarwel, inas yelha d yimanis», a été chantée en choeur par le public, comme pour lui signifier que nous sommes avec toi et nous savons que tu ne rendras jamais les armes. Une chanson dans laquelle se reconnaissent tous les militants qui ont donné de leur vie pour que vive leur idéal de justice et de liberté. La Kabylie tient à tous ses enfants et à tous ses symboles qui en sont la fierté. Et c'est tout logiquement que Lounis répond par «Aylam aqlit, ghourem ad'as tavroud yebbas» (Reconnais tes siens et ne les lâche jamais), comme pour répondre au public et clore cette fête sur un air de joie et de danse. Un gâteau d'anniversaire, aux couleurs de la Kabylie si chère à Lounis, marqué de ses 50 ans, a été ramené sur scène pour être partagé dans «l'intimité» festive et militante de la grande famille enfin réunie.Eternellement zen, imperturbable, Aït Menguellet a poursuivi son chemin et observé de ses yeux naïfs, étonnés, le monde féroce où les humains se lâchent et se déchirent. Chez Lounis, la poésie est une sorte de troisième poumon essentiel à son existence, il versifie d'ailleurs depuis 50 ans... Joyeux anniversaire Aït!



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