Algérie

Un paradoxe !



Le discours dominant institue la jeunesse comme un atout majeur pour le pays. Mais il y a une distance entre les paroles et les actes. Il est difficile, pour cette jeunesse sublimée par les mots, d?accéder à une réelle prise de responsabilité, surtout en matière de travail. Le premier emploi constitue à cet égard un écueil pratiquement insurmontable car il est subordonné à une exigence d?expérience professionnelle fixée à cinq ans. C?est une contradiction dont le caractère surréaliste parle de lui-même car comment justifier d?une expérience professionnelle de cinq ans lorsqu?on est frais émoulu d?une grande école, de l?université, des filières de l?apprentissage ou, pire encore, si on n?a jamais travaillé ? C?est donc une richesse humaine qui se trouve mise sous le boisseau, voire dilapidée. L?aberration est de voir des cadres potentiels bifurquer vers les petits métiers aléatoires et s?inscrire dans une économie de la débrouille en attendant des jours meilleurs sous d?autres cieux peut-être. Ceci alors que l?économie du pays a besoin de toutes les compétences dûment formées pour matérialiser les stratégies d?émigration choisie en Europe et en Amérique du Nord. Le critère d?expérience est manifestement une barrière que nombre de jeunes candidats au travail tentent de surmonter en s?inscrivant dans un processus de préemploi qui les oriente vers des métiers pour lesquels ils n?ont pas été formés. Cela ne peut constituer qu?une étape transitoire, car il s?agit d?investir dans des emplois productifs qui ponctuent une dynamique économique. Le travail n?est pas une vertu informelle ou symbolique, mais une action concrète et positive qui permet aux jeunes de se construire en envisageant d?accéder au logement, de fonder une famille et de s?accomplir socialement. Il se trouve que les besoins colossaux induits par les impératifs de développement économique ne sont pas en phase avec le potentiel humain en déperdition. La nature, dans un tel contexte, a horreur du vide, et il n?est pas normal que des jeunes formés dans les disciplines les plus diverses basculent dans un statut peu gratifiant de chômeurs au long cours. Un pas considérable serait déjà fait si les procédures de recrutement étaient allégées et assorties de mesures incitatives pour encourager les jeunes demandeurs d?emploi à exercer là où leurs compétences sont requises, au nord ou au sud du pays. Le critère d?expérience ne peut se justifier en fait que pour des charges éminentes dans des institutions étatiques stratégiques. Que faire alors des milliers de licenciés, des promotions de la formation professionnelle qui, de toute évidence, n?en sont qu?à vouloir faire leurs preuves dans la vie active ? Le résultat le plus patent est que tous ces jeunes ne sont pas éligibles au travail puisque, selon les dispositions réglementaires, ils n?ont pas d?expérience, et que par ailleurs ils ne pourront faire valoir aucune expérience puisqu?ils n?ont jamais travaillé. C?est au c?ur de ce paradoxe que naissent le désespoir et quelques tragédies de l?émigration clandestine qui font aujourd?hui l?actualité.



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