Algérie

Tlemcen, La zaouïa, une âme de résistance




C’est aux environs de 13 h que le 2e colloque sur le rôle des zaouïas pendant la guerre de libération a pris fin dimanche dernier. Organisée conjointement par le ministère des Moudjahidine et la wilaya de Tlemcen, cette rencontre a drainé un nombre impressionnant de zaouïas et une grande foule composée essentiellement d’étudiants, de professeurs et de responsables locaux.

«Nous avons déjà organisé un premier colloque sur ce sujet en 2005. Nous avons voulu cette année préciser notre champ de recherche sur cette problématique. Nos séances ont été consacrées aux formes d’intervention des chercheurs et professeurs d’université», a souligné Mohamed Taïbi, professeur à l’université d’Oran. Longtemps marginalisées et méprisées, on peut dire que les confréries (au nombre de 35 actuellement) prennent aujourd’hui leur revanche. «Les zaouïas algériennes ont dû, au cours de la longue histoire de notre pays, s’impliquer dans la défense et l’expansion de l’islam ainsi que dans le combat pour la libération et l’indépendance de l’Algérie», a ajouté M. Taïbi. En effet, depuis pratiquement le début de l’occupation coloniale en 1830 et jusqu’en 1847, l’Emir Abdelkader, un adepte de la zaouïa, mena une lutte souvent victorieuse contre le colonialisme français). Le professeur Nasredine Bendaoud a, au cours de sa communication, retracé succinctement la Tarika Qadiriya, ainsi que l’itinéraire de l’Emir Abdelkader, cette grande figure emblématique du soufisme en Algérie qui, dès l’invasion française, a aussitôt organisé la résistance au colonialisme. La zaouïa qui montra le plus de ténacité et de bravoure dans la résistance à l’occupant fut celle d’Ech-Cheikhia, qui fut fondée par Sidi Abdelkader, dit Sidi Cheikh (1533-1616). En 1864, éclate la révolte des Ouled Cheikh, dans le Sud oranais, qui, sous la direction de leur zaouïa, mettra en danger la présence française en Algérie. En 1871, une insurrection sous la direction d’El-Mokrani est déclenchée, dont l’inspirateur et l’âme seront le cheikh El-Haddad et la confrérie Rahmaniya. En 1882, ce sont encore les Ouled Sidi Cheikh qui se révoltèrent, avec à leur tête Bouamama.

Il y eut bien d’autres luttes armées de moindre importance. Le soulèvement du Dahra s’étendit sur plus de deux cents kilomètres entre Tenès et Mostaganem, auquel fut lié le nom de Boumaza; le soulèvement de Zaatcha dans l’Est algérien, lié au nom de Bouziane, celui de Marguerite, près de Miliana, de Flatters dans le Sahara, les soulèvements des Aurès et des environs de Tlemcen en 1914. Le conférencier Mohamed Arezki, professeur d’histoire en retraite, a axé son intervention sur le rôle des zaouïas de la Kabylie dans la lutte contre le colonialisme, où les troupes coloniales durent lutter de 1849 à 1852 pour parvenir à occuper la petite Kabylie. Mais ce n’est qu’en 1853 que la France put y asseoir son autorité. En marge de ce colloque, M. Boumediène Bouzid a tenu à signaler que l’écriture de l’histoire de l’Algérie ne fait que commencer. Un premier seuil a été franchi en reconnaissant le rôle des zaouïas. Selon M. Boumediène Bouzid, depuis l’élection du président Abdelaziz Bouteflika, les choses ont changé. «L’Algérie, c’est aujourd’hui une vingtaine de millions de jeunes qui ont besoin de valeurs, de repères et de balises pour affronter l’avenir, forts de leur personnalité historique. L’histoire algérienne n’est-elle pas riche de batailles héroïques, de légendes, de faits douloureux et de sacrifices ?». Il y a toutefois encore beaucoup à faire pour améliorer la connaissance du rôle des zaouïas pendant la guerre de libération et avant.

Les participants du colloque de Tlemcen ont proposé de concevoir des ouvrages historiques de vulgarisation et de recherche en vue de l’écriture des manuels d’histoire. Pour rappel, le 14 juin 2000, le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, prononça en français un important discours devant l’Assemblée nationale française. En s’adressant à son hôte Jacques Chirac dans son discours, il s’attacha à lui suggérer, en des termes soigneusement pesés, l’idée d’une déclaration de repentance de la France pour ses méfaits passés en Algérie. Reconnaissant que «la colonisation, au siècle dernier, nous a ouverts à la modernité», il ajouta aussitôt que «c’était une modernité par effraction, une modernité imposée qui a engendré le doute et la frustration, tant il est vrai que la modernité se discrédite quand elle prend le visage grimaçant de l’oppression et du rejet de l’autre».


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