Algérie - A la une

Tinalkoum, le village oublié


Tinalkoum, le village oublié
Le calme assourdissant qui règne à Tinalkoum, la vétusté des équipements et les nombreuses ruines abandonnées laissent penser que les lieux ont été désertés depuis des lustres. Pourtant, une population y vit et son nombre augmente en dépit des espoirs de voir venir le développement qui se sont effondrés, depuis que ce village est devenu une annexe communale de Djanet. « La ville est bien sécurisée, mais il n'y a rien d'autre », résument les habitants. Tinalkoum a son école primaire qui n'est, à ce jour, pas encore baptisée. Pourtant, ce ne sont pas les noms de chouhada ou de moudjahidine qui manquent. Les ruines des casernes et les casemates des combattants algériens sont le meilleur témoin et la preuve tangible du passé révolutionnaire de la région.Pas de classe au-delà de la 5e année primaire« Cela fait 5 ans qu'il n'y a pas eu de professeur de langue française », affirment les habitants. L'année scolaire dans ce petit village commence en retard et se termine très tôt. Faute de moyens de transport, les enseignants ramenés de Djanet et d'Adrar souffrent le martyr pour rejoindre leurs postes de travail. La déperdition scolaire fait des ravages puisque la majorité des enfants de ce village quitte l'école à la fin du cycle primaire. « Il n'y a pas de CEM à Tinalkoum. Après la 5e année, les élèves doivent se déplacer vers Djanet, soit plus de 250 km à franchir quotidiennement. Comme il n'y a pas d'internat à Djanet, les élèves n'ont pas où passer la nuit et ne peuvent pas faire ce trajet faute de moyens de transport. Seuls les enfants qui ont de la famille à Djanet peuvent poursuivre leurs études », racontent amèrement des parents d'élèves. La situation les révolte car c'est à partir de là que commence la destruction de l'avenir de leurs petits qui perdent toute chance d'acquérir du savoir pour bien évoluer. La première conséquence de cette situation est visible. Les jeunes de la région ne travaillent pas. Seul le chauffeur de l'ambulance et les gardiens de l'annexe communale reçoivent des salaires de l'Etat. La poste, où les services sont vraiment très limités, fonctionne encore grâce à son directeur qui est aussi l'agent du comptoir et... le gardien des lieux. Quant aux structures opérationnelles comme Sonelgaz et le centre de télédiffusion, ils emploient des gens des autres wilayas.5.000 DA pour aller à Djanet en « clandestin »Le manque de transport collectif aggrave la souffrance des habitants. « Pour aller à Djanet, il faut trouver un clandestin qu'on paye 5.000 DA la course ». La défaillance du réseau téléphonique et de l'internet est fortement décriée par la population. « En plus de l'isolement, nous ne pouvons pas effectuer des communications téléphoniques avec nos proches en raison du mauvais état du réseau téléphonique. A la fête de l'Aïd, nous n'avons pas pu transmettre nos v?ux à nos proches lointains pendant une semaine. C'était décevant », se désole un groupe de citoyens.Décès de deux femmes enceintesLe secteur de la santé n'est pas en reste. Ayant coûté une enveloppe de 2, 7 milliards de centimes, le centre des maladies épidémiologiques est fermé en pleine période de lutte contre la maladie d'Ebola. L'établissement emploie un seul infirmier chargé de faire des injections aux malades. Les habitants sont contraints de se déplacer à Djanet pour se faire soigner. Un autre calvaire. Et pour cause, une seule ambulance appartenant à l'ANP est disponible. « S'il y a une urgence pendant qu'un autre malade civil ou militaire est évacué, ce serait la catastrophe », disent les habitants. Deux femmes enceintes sont décédées l'année passée faute d'une évacuation rapide à l'hôpital. En outre, la région est classée comme zone où les piqûres de scorpions sont mortelles. Le siège de l'annexe de l'APC est constamment fermé. Il faut se déplacer jusqu'à Djanet pour se faire délivrer un extrait de naissance ou légaliser un papier. Les jeunes de Tinalkoum n'ont pas de loisirs. La seule structure réalisée et équipée qui leur est dédiée est fermée depuis l'achèvement des travaux de réalisation. Les élèves n'ont pas bénéficié de colonies de vacances, n'ont pas de piscine, ni d'aire de jeux. Le stade, transformé en centre de réfugiés, est dans un état lamentable. En dépit de son importance, cette région connaît des problèmes d'alimentation électrique. Ainsi, le projet de la centrale électrique qui devrait alimenter le tronçon Tinelkoum-Erekine (50 km) est inscrit au niveau de la wilaya mais la procédure de son lancement n'a pas encore été entamée. La région compte aussi beaucoup de nomades toujours en quête de verdure pour nourrir leur bétail. Leurs conditions de vie n'ont jamais changé. Ils sollicitent l'aide de l'Etat pour avoir deux tentes par an et des forages afin de trouver plus facilement de l'eau. Les exploitations agricoles distribuées par l'Etat aux familles de Tinelkoum n'ont pas vraiment réussi, justement faute de forages. Pourtant, la région, où sont plantés des arbres, compte une eau souterraine suffisante pour faire aboutir ce genre de projet. Ces populations vivent encore des aides annuelles attribuées par le ministère de l'Intérieur et des Collectivités locales qui leur octroient des dons en denrées alimentaires afin d'atténuer, un tant soit peu, leurs souffrances.Le fort italien, un témoin de l'histoireTinelkoum est aussi un endroit où on peut approcher et vivre la préhistoire et l'histoire de la révolution de novembre contre le colonialisme français. Le fort italien est un monument historique vivant qui témoigne, à ce jour, de la présence de l'armée italienne sur le territoire algérien pendant la colonisation française. Selon les témoins sur place, ce fort a été réalisé par l'armée italienne qui a pénétré en Algérie par la Libye. L'imposante structure a été édifiée en pierres et en argile locale. Sitôt achevée, les soldats italiens avaient entamé des opérations de contrôle du territoire. Ces nouveaux colons ont été chassés par des combattants algériens, lors d'une virulente attaque. Le fort est complètement délaissé et abandonné à son triste sort. Suprême outrage, il est envahi par les ordures. Aucune plaque fournissant des informations sur ce site riche en histoire n'est visible ni encore moins une clôture de protection pour signifier la préservation de ce monument. Il en est de même pour la caserne des moudjahidine située sur une colline au centre du village. Là aussi l'abandon est total.




Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)