SOS Libye

L'incertitude plane sur l'avenir de la Libye et, avec elle, le risque de déstabilisation de toute la région sahélo-saharienne. Péniblement, le gouvernement d'union de M. El Sarraj s'est installé à Tripoli et, signe d'inquiétude, il est réfugié dans une base navale et non dans les sièges officiels des institutions.Plus grave encore, ce gouvernement, soutenu pourtant par les Nations unies, ne fait pas l'unanimité. Toutes les villes à l'ouest de la capitale lui sont hostiles et aucun parti démocratique ne lui apporte son soutien. Marqués par le tribalisme, les Libyens ne sont pas conscients des menaces d'éclatement qui pèsent sur leur pays. La dictature de Mouammar El Gueddafi a laissé des traces et des comportements difficiles à effacer. Il a empêché le développement de la culture de l'Etat, régnant comme seul maître à bord et exacerbant le tribalisme. Les conséquences d'une telle politique sont là. Daech contrôle totalement la ville de Syrte, avec l'appui de la tribu des Gueddafi, et contrôle en partie des villes de l'Ouest, y compris Benghazi. Et c'est là où réside le grand danger. La Russie a réussi à chasser Daech de Palmyre et a réduit son influence sur la partie de la Syrie qu'il occupe.Les Américains voudraient ne pas être en reste. Il faut qu'ils obtiennent, eux aussi, un succès militaire sur l'organisation terroriste pour ne pas laisser l'initiative à leur ennemi héréditaire. Ils doivent donc courir derrière une victoire et la ville irakienne de Mossoul (2 millions d'habitants sous la férule de Daech) est une cible tout indiquée qui pourrait être libérée dans les tout prochains mois. Or, en cas de déroute en Syrie et en Irak, l'organisation d'Aboubakr El Baghdadi a un seul pays de repli : la Libye, qu'elle a commencé à coloniser depuis plusieurs mois. Selon les informations de presse, les «daechistes» présents actuellement sur le territoire libyen ? ils seraient 6000 ? sont en majorité des étrangers. Dès que le vent a commencé à tourner en Syrie, ils ont fui pour s'installer à Syrte surtout. En cas de déroute totale ailleurs, la Libye est tout indiquée pour être leur nouvelle base de départ.Ce sera alors toute l'Afrique du Nord et subsaharienne qui deviendra le théâtre des opérations de Daech. Même l'Europe aura alors sa part. Il lui sera alors plus facile d'établir une jonction avec Boko Haram et les shebab somaliens. C'est pourquoi il est urgent, aujourd'hui, d'aider la Libye à retrouver son unité et sa stabilité. Les autorités en place n'ont pas les moyens militaires ni politiques pour surmonter à elles seules les défis. La communauté internationale doit intervenir plus intensément pour écarter le danger terroriste. La menace vaut aussi pour tous les peuples du Bassin méditerranéen.