Algérie

Sauvegarde du patrimoine : Sidi Djeliss ou la mémoire menacée



Les habitants du vieux quartier de Sidi Djeliss lancent un cri de détresse pour sauver les bâtisses qui sont toujours debout, en dépit des aléas du temps et de la négligence des hommes.

A l’embouchure de la place légendaire de Rahbet Essouf (ex-place des Galettes), le quartier de Sidi Djeliss, retiré à l’extrémité nord de la vieille médina, a de tout temps préservé ses particularités de lieu calme et non encombré. Une situation qui ne lui épargnera pas aussi de sombrer dans l’anonymat depuis plus de deux décennies. Bien que le site se trouve à quelques encablures seulement de la rue Tatache Belkacem, premier accès vers Bab El Kantara, et juste au-dessus du lieudit Rabaïne Cherif, qui surplombe la rue Larbi Ben M’hidi. Abordé de tous les côtés, Sidi Djeliss offre aux visiteurs le décor désolant des décharges sauvages, nées sur les décombres de ces vieilles maisons « tombées » dans l’indifférence totale. Avant même que le périmètre de la vieille médina ne soit classé patrimoine national par décret paru au mois de juin 2005, le site avait perdu une bonne partie de son propre patrimoine. Aujourd’hui, les nostalgiques constantinois ne reconnaissent plus la rue Droudj Erremah (devenue une poubelle), la petite placette Sidi Djeliss El Fougani, l’impasse Rabier et les maisons qui entouraient l’ex-école Jules Ferry (aujourd’hui CEM Ould Ali). L’établissement connu pour abriter le tombeau du saint qui a donné son nom au quartier et qui fait face à la fameuse place de Sidi Djeliss, où une fontaine défie toujours le temps, renferme à lui seul de longues pages de l’histoire de la ville. L’école située sur l’ancienne rue des Abyssins est la première institution de l’éducation française implantée au cœur de la vieille ville de Constantine. Un lieu indissociable de l’histoire politique et intellectuelle de la ville pour avoir permis l’émergence des nouvelles élites. Tout autour, le quartier de Sidi Djeliss a perdu tellement de repères qu’il risque de disparaître complètement. Pour les connaisseurs des lieux, beaucoup de maisons de grande valeur architecturale se sont effacées de la carte, à l’image de Dar Benmoussa, Dar Cheikh Zouaoui, Dar Benouattaf, Dar Benayad, Dar Benaggoun, Dar Benseguni et Dar Belamri, pour ne citer que celles-là, car la liste est longue. Il suffit de marquer une pause à la rue Rabier, où les dellalate, ces fameuses marchandes de bijoux et de fripe ne sont plus nombreuses à se manifester près de Dar Benguettache, pour mesurer l’ampleur des dégâts. Les quelques maisons qui restent encore, semblent interpeller la conscience collective pour une action de sauvegarde. Alors que le discours officiel avance ces milliards consacrés pour la réhabilitation de la vieille ville, le temps semble être plus impitoyable. L’exemple est venu au mois de janvier dernier, suite à l’effondrement de deux maisons à l’impasse de Sidi Djeliss, donnant vers la place de la fontaine. L’indifférence et la légèreté avec lesquelles les services de la commune de Constantine ont fait face à cette situation, risquent encore gros pour les habitants des deux maisons situées à proximité d’une ruelle toujours obstruée. A Dar Bouhadjra et Dar Boumaza, des familles craignent le pire, alors qu’un peu plus loin d’autres bâtisses risquent de connaître le même sort si les responsables de la ville ne réagissent pas en urgence, car c’est un pan de l’histoire de la ville qui risque de se perdre à jamais.
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