Algérie - A la une


Sacrée fébrilité
Une ambiance au ralenti marque encore ces dernières heures, au bon vouloir des commerçants qui ne commencent leur journée qu'en fin de matinée. Les lève-tôt n'ont plus qu'à retourner dans leurs logis pour attendre enfin cette ouverture de rideau et vaquer enfin à leurs achats. Ce sont plutôt des précautions de prises par les ménagères et les pères de famille. Qui à trois jours de la fin du mois sacré pensent déjà aux jours d'après. Ainsi en est-il avec ces marchands de fruits et légumes qui ont déjà averti leurs clients de la cité où ils ont improvisé un étalage de circonstance que c'est leur dernier week-end à Alger. Parce que, eux aussi vont passer l'Aïd en famille dans les banlieues de la capitale ou carrément dans les villes limitrophes souvent de l'ouest du pays. Et d'inviter les consommateurs habituels, quand ils ne le font pas de leur propre chef, à passer commande. C'est alors une longue liste qui est énumérée pour s'approvisionner en pomme de terre, la denrée la plus nécessaire, voire vitale, l'oignon et le reste des légumes avec le nombre de kilogrammes voulus. On n'oublie pas les bouquets garnis en coriandre, persil, céleri, menthe et basilique pour parfumer les derniers jours du jeûne et même prévoir les six jours d'abstinence Essabrine qui suivent l'Aïd, puisque beaucoup préfèrent s'en acquitter juste après les fêtes. Les revendeurs enregistrent et le jour J honorent leurs commandes à la grande satisfaction des consommateurs qui ont ainsi paré aux surprises des jours fériés. Il faut toujours se mettre à l'abri. La même précaution est prise avec le boulanger du quartier, quitte à congeler le pain pour le sortir sans angoisse d'une table sans. Quant au boucher, il y a une semaine qu'il a dressé sa liste, même si au demeurant, les abats comme le foie seront réservés au client fidèle, écoulés sans témoin ou sous le comptoir. La viande est ramenée de Kabylie où il a été fait le sacrifice des b'ufs, fraîcheur garantie.« Prudence est mère de sûreté »Sa pénitence assurée pour l'Aïd, on va faire le tour des boutiques de vêtements et de chaussures pour tenter de glaner peut-être un petit rabais, les commerçants s'empressant d'écouler la marchandise importée pour cette occasion et difficilement écoulée après coup. Les plus avertis auront fait leurs emplettes dès la première semaine de Ramadhan pour éviter bousculades, grimpette des prix et manque de choix. Ceux-là ont même joint l'habillement de la rentrée scolaire. On n'est jamais assez prudents. Même les magasins spécialisés en articles de sport de grandes marques connues ont connu une razzia de ce côté-là. Tous les produits destinés aux enfants ont été vendus et sans aucune solde. La course est maintenant terminée. Tant pis pour les retardataires. Et puis cette façon d'agir en temps opportun permet de se consacrer à la confection des gâteaux, même si de plus en plus de chaînes d'attente sont observées le jour de la nuit du Doute chez les pâtissiers habituels pour se faire plaisir sans se fatiguer. Même les hommes s'y mettent aujourd'hui. En dépenses, cela revient au même, en plus la chaleur du four est évitée. Acheter les ingrédients qu'il faut, entre amandes, sucre, huile, colorants alimentaires, farine et semoule, en plus de la consommation du gaz et le temps passé devant le four est aisément remplacé par un budget qui est consacré à cette nouvelle lubie.Les traditions, vaille que vailleD'autres par contre tiennent mordicus à ces odeurs parfumées qui dégagent leurs relents dans la maisonnée donnant au moins un sens à la fête de l'Aïd. Car il n'est plus cette époque de la cuisson des gâteaux chez les boulangers du coin. Ces longues processions de garçonnets et fillettes qui se croisent dans le quartier pour aller déposer le plateau recouvert d'un morceau d'étoffe pour éviter les poussières et cacher aux regards le contenu. A chacun son tour et son heure de récupération du plateau déposé contre un ticket. C'était aussi le temps des gâteaux traditionnels que l'on retrouve aujourd'hui paradoxalement dans les cérémonies de célébration de mariage servis avec le café en salle des fêtes mais pas en ces occasions des fêtes de l'Aïd. Rares sont les ménages qui confectionnent charaq meskar, aâryan, ghribia, halouet tabaâ qui se conservent longtemps et qui accompagnent des semaines après le petit déjeuner... Aujourd'hui, la concurrence est celle des gâteaux dits améliorés, orientaux, fantaisistes. A qui se met à la dernière mode et met le plus d'ingrédients, les plus chers s'entend. Plus beaux que bons. D'autres encore lus prévoyants encore sont passés à la banque ou à la poste grignoter sur leurs économies. Pour devancer toute panne d'ordinateurs ou manque de liquidité. Et ce sont les retraités qui bon an mal an sont mis devant le fait accompli et se retrouvent avant l'ouverture des guichets pour retirer vers la dernière semaine du mois leur pension. Patience et nerfs sont mis à rude épreuve. Mais qu'à cela ne tienne. On persiste pour signer sur ce bout de papier qu'est le chèque pour prétendre à son dû. La zakat pointe du nez et on peut s'y prendre quelques jours avant le jour J de l'Aïd El Fitr. Ce sont 100 DA par personne à pourvoir. Ce don va vers les plus démunis et les premiers à en bénéficier ce sont les membres de la famille. Sinon le voisinage, si ce n'est celui qui frappe à nos portes. Aujourd'hui, il est dans les nouvelles m'urs que les gens la réclament de plus en plus. Dans d'autres foyers, il est un autre rituel qu'on n'oublie pas : le henné. Dans les commerces, si l'on ne s'y prend pas à temps, le produit déserte les étalages en un clin d''il. Alors on s'y prend à temps pour ne pas manquer de s'enduire les mains, signe ostentatoire de l'Aïd Esghir. Et les mêmes foyers se mettent à l'heure du nettoyage. Un mois après le premier toilettage, on remet ça. Rideaux et couverts sont lavés et changés et la maisonnée est parée pour la circonstance. La dernière soirée, qui coïncide avec la nuit du doute, est consacrée à la confection des makrouts, sans lequel une table des fêtes de l'Aïd El Fitr serait dégarnie. Et on n'attend plus que l'Aïd et sa baraka ! Que Dieu la propage dans toutes les chaumières !


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