Algerie - Judéo-arabe

Robert Castel - Adjini Adjini




La musique judéo-arabe algérienne désigne le riche répertoire musical développé par la communauté juive d'Algérie, profondément influencé par la tradition arabo-andalouse. Héritée de l'exil des Juifs d'Espagne en 1492 après la Reconquista, cette musique s'est enracinée au Maghreb, où elle s'est adaptée aux contextes locaux tout en préservant une identité culturelle juive exprimée à travers des thèmes arabes. Elle n'est pas une 'langue judéo-arabe' distincte, mais un 'koinè' langagier et artistique mêlant arabe dialectal algérien, hébreu et influences séfarades, servant de vecteur d'expression pour l'amour, la nostalgie et l'exil. Histoire et contexte Origines : Introduite au XIIIe siècle via l'Andalousie musulmane, elle s'épanouit en Algérie dans les centres urbains comme Alger (sanaa), Constantine (malouf) et Tlemcen (gharnati). Les Juifs, gardiens zélés de ce patrimoine, l'ont transmis oralement dans les synagogues, mariages et cafés-chantants. Évolution : Au XIXe-XXe siècles, sous la colonisation française, elle se popularise via le théâtre arabe (comme El-Moutribia) et la radio. Les années 1930-1950 voient l'essor de la chanson judéo-arabe, mêlant arabe, français et 'francarabe'. L'indépendance (1962) et l'exode juif vers Israël et la France marquent un tournant : beaucoup d'artistes émigrent, diffusant le genre à Paris (ex. : cabarets juifs). Aujourd'hui : Revitalisée par des anthologies (ex. : compilations Buda Musique) et festivals, elle survit dans les communautés diasporiques et inspire la musique maghrébine contemporaine, symbolisant un pont culturel entre Juifs et Arabes. Caractéristiques musicales Genres principaux : Nouba andalouse : Suite instrumentale et vocale en cinq mouvements, sur modes (maqams) arabes. Chaâbi : Chansons populaires urbaines, rythmées, pour la danse (mahdjouz). Hawzi : Poétique et mélancolique, souvent pour voix féminines. Mawwâl : Improvisations vocales élégiaques. Instruments : Oud (luth), qanun (cithare), violon, derbouka (percussion), mandoline ; influences du jazz et du flamenco via l'exil andalou. Thèmes : Amour non réciproque, exil diasporique (ex. : 'Qassat Bensoussan' de Cheikh Zouzou), spiritualité juive dans un cadre arabe, avec une sensualité raffinée. Artistes emblématiques Hommes : Cheikh Raymond Leyris (Constantine, maître du malouf), Lili Labassi (chaâbi algérois), Salim Halali (chansons cosmopolites), Blond-Blond (variété oranaise), Edmond Yafil (compositeur andalou), Cheikh Zouzou. Femmes : Reinette l'Oranaise (hawzi émouvant), Marie Soussan (pionnière théâtrale, 1920s), Line Monty, Alice Fitoussi, Raymonde. Ces figures, souvent oubliées, ont popularisé le genre via disques 78 tours et scènes parisiennes. Cette musique incarne l'hybridité culturelle algérienne : un trésor partagé, menacé par l'oubli mais préservé par la diaspora et les enregistrements numériques. Pour une plongée audio, écoutez des compilations comme La Musique Judéo-Arabe, Vol.1 (Algérie/Maroc).
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