Algérie

Retournement inédit dans le déroulement du procès d’Oran



La BCIA se constitue partie civile Les plaidoiries de la partie civile ont commencé hier et la première intervention a été celle du bâtonnier Benblal Abdallah qui commencera par expliquer que la personnalité des mis en cause diffère du banquier au commerçant… D’autre part, il reviendra sur ceux qui ont eu plus ou moins le courage de reconnaître certains de leurs faits, tel M. Fouatih. Il déclarera aussi que l’opération de dilapidation a été bien calculée, les avances sur titre de même que les chèques sans provision certifiés ayant été utilisés par les prévenus pour détourner le plus facilement du monde ces fonds. «Mais, ajoutera-t-il, il n’y a pas de crime parfait. Les différents contrôles et inspections ont été ce grain de sable qui a bloqué cette horlogerie supposée fonctionner de manière fiable». «Je ne pourrais, expliquera-t-il, passer sous silence le dur travail d’inspection qu’a élaboré M. Baghdadi qui, plus d’une fois, a eu à signaler les dépassements de l’agence de la BEA. Il a fallu qu’apparaisse l’incident du paiement de ces traites pour que cette affaire éclate au grand jour. Pourtant, la BCIA, cette banque qui avalisait les traites une année après son agrément, a vu son patron écarté pour avoir délivré des bons de caisse de 48 milliards de dinars sans garantie.» Le deuxième défenseur de la partie civile s’alignera sur la même ligne de défense. Me Sassi dira qu’on a assisté à une pièce théâtrale où chacun devait tenir un rôle bien défini. «On a rencontré des vendeurs qui faisaient semblant de vendre et des acheteurs qui se sont contentés d’accepter un achat virtuel. Mais, voilà, ces mêmes vendeurs réclament la marchandise qu’ils déclarent ne pas avoir reçue. Et, dans tout cela, c’était la BCIA qui tenait le rôle d’avaliseur pour plus de liquidités». En outre, il reviendra sur «une opération pour le moins impensable: le directeur de la BEA qui délivre des chèques à un client après avoir reçu des bons de caisse de la BCIA. Le directeur de cette dernière dira que ce même client a bénéficié de bons de caisse après lui avoir remis des chèques». La question posée sera alors: «Lesquels des deux ont été délivrés en premier: les chèques ou les bons de caisse?» Le projet de création d’une société de transport aérien, «Rym Airlines» sera également exposé. En effet, le groupe Kharoubi a voulu mettre ce projet à exécution, signalera le troisième avocat de la partie civile qui ajoutera que, «pour le mener à terme, trois millions de dollars ont quitté les caisses pour servir à l’acquisition d’aéronefs supposés pouvant voler». L’après-midi, l’intervention du bâtonnier Sellini, défenseur lui aussi de la partie civile, devait clore les interventions du groupe d’avocats de la BEA. Il s’étonnera que la somme de 196 millions de dinars ait pu être escomptée et encaissée le même jour, de même que celle de 21 bons de caisse estimés globalement à 4,6 milliards de dinars. Il reviendra sur les agissements du directeur de la BEA 74 et sur les fausses statistiques qu’il établissait. Disant que ce dernier «agissait à sa guise du moment que sa signature, pensait-t-il, le lui permettait». «Un tel comportement, rappellera Me Sellini, a fait que des milliards de dinars se sont envolés vers l’étranger. Cette perte de confiance dans nos banques a poussé les citoyens à recourir aux banques étrangères, telles la BNP, la Société générale et autres. Un tel comportement a fait de nous la risée de nos voisins, proches et d’Outre-mer». Mais, coup de théâtre, après cette plaidoirie, la BCIA, par la voix de son liquidateur, M. Djarad Djamel désigné par le comité de la monnaie et du crédit, s’est présenté à la cour, disant qu’il représente la BCIA et que cette dernière se constitue partie civile. Ce sera alors un tollé de protestations de la part tant des avocats de la partie civile que de ceux des mis en cause, qui feront part de leur étonnement devant cette intervention inattendue et pour le moins choquante, qui intervient juste après la fin des plaidoiries de la partie civile. «Surtout, lorsqu’on sait que le patron de la BCIA et l’un de ses fils se trouvent actuellement en fuite». Devant cette situation inédite, l’audience sera suspendue. A la reprise, la parole a été donnée à l’avocat représentant le liquidateur, qui devait expliquer cette intervention. «La majorité des prévenus, mis en cause d’avoir occasionné un préjudice à la BEA, avancera celui-ci, doivent à la BCIA des montants faramineux». Et de citer, à titre d’exemple, la société Sotraplas qui devrait l’équivalent de 443 millions de dinars, le mis en cause Chérif Hadria devant à cette même banque 10 millions de dinars, alors que Ahmed Fouatih, avec plusieurs sociétés dont il est bénéficiaire, devrait, quant à lui, plus de 600 millions de dinars. «M. le juge, dira Me Arab Mokhtar, le crédit de la BCIA ne s’élevait à la date de sa liquidation, le 30 avril 2004, qu’à 916 millions de dinars. Ces clients que nous citons, ainsi que d’autres, ont bénéficié de crédits qu’ils n’ont pas honorés. Nous saisissons la cour pour exposer nos doléances». Le juge décidera de lever l’audience, soulignant toutefois qu’ils pourront exposer leurs demandes à la fin du procès. Hors de l’audience, Me Aït Larbi Mokrane, avocat d’un des accusés, se dira choqué par ce qu’il appellera des irrégularités constatées tout au long du procès. Ainsi, «la constitution d’un avocat pour un accusé qui se trouve en fuite, c’est du jamais vu !», s’étonnera-t-il. «Et de surcroît, avec l’avis favorable de la cour». Il reviendra une fois de plus sur cette affaire qui, expliquera-t-il, a été scindée en deux. Comme il soulèvera le problème du liquidateur qui se présente en tant que représentant de la partie civile. Rappelons que le préjudice causé par les trois fils Kharoubi est à lui seul, et pour chacun d’eux, de 9.910.410.980 dinars. Par ailleurs, selon les déclarations de Me Yssad Abdelkader, représentant de la BEA de Sig, «un procès analogue à celui qui se tient au niveau de la cour d’Oran s’ouvrira au début du mois de mars à la cour de Mascara, où 80% des mis en cause présents au cours du procès d’Oran devront répondre des mêmes griefs. Deux prévenus, en l’occurrence Krid Med et Benaharret Aziz, tous deux employés à la BEA de Sig et non inculpés dans l’affaire en cours, seront présents lors de ce deuxième procès». Le réquisitoire du représentant du ministère public débutera aujourd’hui.   Hasna Yellès
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