Algérie


Embarquement raté! Durant les 48h précédant l’émission, un spot est passé en boucle pour rappeler aux auditeurs le rendez-vous: «Ne ratez pas le grand reportage sur les harraga, mardi 9 janvier à 20h. Un témoignage saisissant. Une terrible tragédie vécue par nos jeunes dans leur chair...» L’heure «H» arriva enfin. Curieusement, on démarre comme pour une heure de variétés: Une chanson de Mami, «Bladi». Elle ira jusqu’au bout, au lieu de servir de simple fond sonore. Le ton est donc donné. Nous sommes avertis: le reportage va s’inscrire dans la plus pure tradition nationaliste version radio algérienne, comme si rien ne s’était passé entre le 5 juillet 62 et ce 9 janvier 2007! Retour vers le futur? Non, on reprend les mêmes et on recommence. C’est tout. Ibtissem déboule enfin dans l’émission avec dans la voix un léger écho, sans doute une idée du réalisateur histoire de lui donner une petite dimension céleste et transcendante comme dans les films arabes de cape et d’épée quand on fait lire quelque chose de sacré. Ibtissem aura fait l’effort de ne pas prononcer une seule phrase en arabe dialectal. Tout dans un arabe littéraire parfait, à telle enseigne qu’il était parfois difficile de la comprendre. Si les témoignages, très réussis quant à eux, avaient un accent de vérité et percutaient par leur franc-parler, tout ce que les rédacteurs ont pu rédiger autour était d’une lourdeur et d’une platitude saumâtres. Tout n’était que morale et reproches: Qu’est-ce qu’ils ont à vouloir partir, au risque d’y perdre la vie, ces jeunes qui croient que le Paradis les attend sur l’autre rive? Même un officier supérieur de la marine nationale s’est laissé piéger par ce ton paternaliste qui n’avait aucune place dans un tel reportage. Plus surprenant encore, la psychologue de service s’est cru obliger de conclure: «Il ne fait aucun doute que ce phénomène de l’émigration illégale est exclusivement le fait de réseaux bien organisés qui vendent du voyage à des jeunes inconscients...» Intéressant. Allez donc leur expliquer madame, à ces jeunes et moins jeunes, que la planète Terre s’arrête à Bomo plage! Facile de ronronner quand, de son côté, la vie est injuste au point de pousser au suicide. Dommage pour El Bahia. Il y avait de quoi faire un bon boulot.
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