Algérie

Réformes du système et systèmes de réforme... Premier pas



Le plan d'ajustement structurel appliqué à l'Algérie-à sa demande-préconisait, entre autres mesures, la libéralisation du commerce extérieur, « les banques et l'administration des douanes directement concernées », la gestion drastique et la modernisation des finances publiques, « les banques et le Trésor Public directement concernés », donner plus d'importance aux nouveaux instruments de la politique monétaire, « les banques et la Banque d'Algérie directement concernées », la libéralisation du taux de change et la modernisation de sa gestion, « les banques et la Banque d'Algérie encore une fois directement concernées », l'instauration de nouvelles techniques de financement des investissements par le biais des marchés, « les banques, la Banque d'Algérie, le Trésor Public, les Investisseurs Institutionnels directement concernés », et si on s'amuse à citer les domaines des réformes que l'Algérie avait engagées, on se rendra compte que les banques y sont liées de près, voire de très près !!!! A travers la loi du 19 août 1986, et comme toutes les Entreprise Publiques Economiques E.P.E., les banques algériennes ont eu une - apparente - autonomie de gestion, après de longues années de gestion centralisée. Elles ont eu une relative liberté - même illusoire - de choix de leurs marchés, de choix de leurs clientèles et de choix de leur stratégie. Après de longues années de spécialisation imposée, de clientèles administrativement choisies, et de stratégie inspirée des plans socialistes périodiques, cette loi est venue bousculer légèrement cette inertie. Reconnaissons à cette première tentative le mérite d'être le premier cadre légal touchant la sphère financière et bancaire. Elle avait tenté, sans trop de succès - car incomplète et peu suivie - de définir un nouveau cadre régissant l'exercice de la fonction bancaire et financière, de donner les directives et les grands vecteurs du rôle de ce même système dans la politique économique du pays. Elle a essayé de séparer et de distinguer la banque centrale, les banques et les établissements de crédits spécialisés. Cette loi a institué de nouvelles expressions, de nouvelles visions, de nouvelles fonctions et de nouvelles activités au système bancaire et financier. On peut notamment citer entre autres, la définition du rôle de la banque centrale comme institution de régulation de la distribution du crédit et comme un instrument de politique monétaire, l'attribution « même là, aussi, illusoire », de la liberté aux banques de financer des projets suivant leurs risques et l'obligation de suivre ces même crédits, comme elle a introduit, pour la première fois, les opérations sur les valeurs mobilières et les produits financiers, ce qui était déjà en avance, et laisser présager d'autres actions dans le sens de la véritable réforme. Les deux années qui suivirent cette loi ont été également significatives dans le sens de la réforme du système bancaire et financier, car ayant connu un autre évènement y afférent, à savoir le retrait du Trésor Public du processus de financement des investissements des EPE de façon partielle, « ne concernant plus que les investissements légers et d'extension ». Si on observe ces trois actions : l'autonomie financière des entreprises, la loi relative au régime des banques, et le retrait partiel du Trésor Public du financement des investissements des EPE », on se rend compte que l'intention des pouvoirs publics était, sans nul doute, vers la réforme irréversible de toute l'économie algérienne et du rétablissement des rôles de chacun des opérateurs économiques. Ceci étant, la démocratisation de notre société, après les événements du 05 octobre 1988, a accentué la tendance à l'auto-réforme, poussée par les exigences de tout le peuple algérien qui aspirait à une vraie liberté !!! D'autres mesures ont été prises par les pouvoirs publics de l'époque. La plus frappante et la plus osée était sans nul doute, la promulgation de la loi 90/10 du 14 avril 1990 relative à la monnaie et au crédit. Dans ses grandes lignes, cette loi a défini les premières règles de marché et de la libre concurrence. Elle a également défini les responsabilités de chacun des intervenants dans la sphère bancaire et financière. Appuyée par la réforme du code de commerce « 1993 » et par la politique de financement des dépenses publiques, cette loi a donné de bons résultats, même si les événements qui avaient suivi à l'époque ne l'avaient pas favorisée. En effet, elle permit : - L'indépendance de la Banque Centrale d'Algérie, devenue Banque d'Algérie, et la fixation de ses prérogatives et de ses fonctions; - La limitation de l'influence du Trésor Public sur les flux financiers de l'Algérie, c'est-à-dire la minimisation du recours au financement par la planche à billets; - La modernisation des instruments de politique monétaire « encadrement du crédit, réserves obligatoires, intervention sur le marché monétaire » et le contrôle des dépenses publiques « limiter les avances consenties par la Banque d'Algérie à l'Etat »; - L'ouverture de tous les secteurs économiques à toutes les banques sans exception ni exclusion ni spécialisation « capitaux publics et capitaux privés, de nationalité algérienne ou étrangère, banques islamiques,... etc. »; - L'installation de plusieurs banques privées, nationales, mixtes et étrangères, et leur mise à égalité avec les banques nationales publiques; - Création du cadre nécessaire à l'installation et la création des établissements financiers spécialisés; - Création et instauration d'instruments de contrôle de l'exercice de l'activité bancaire, de garantie et protection de l'épargne publique et privée; - Responsabilisation des cadres des banques quant à leurs décisions en matière de gestion des banques et établissements financiers; - Initiation à plus de souplesse quant aux règles d'octroi de crédit « critères d'éligibilité, garanties exigées, application règles prudentielles,... etc. ». Après les quelques premières années d'activité, relativement transparente « 1988-1992 », l'Algérie a de nouveau sombré dans une spirale de problèmes, qui avaient entraîné un quasi-retour au point de départ. Le terrorisme d'un côté, le contre-choc pétrolier d'un autre, et les effets négatifs et immédiats des réformes « accord stand-by et PAS » d'un troisième côté, ont créé une sorte d'anarchie économique et ont encouragé indirectement le phénomène « d'impunité » dans tous les domaines. Comme les banques sont au centre de l'économie, elles n'ont pas échappé à ce phénomène. Au contraire elles étaient les premiers acteurs économiques subissant, pour certains observateurs, et créant, pour d'autres, l'anarchie, sinon l'inertie et la passivité. Après le choc pétrolier, le retour progressif de la paix et de la stabilité en Algérie et la promulgation d'une série de textes législatifs et réglementaires, la situation devenait de plus en plus claire et les réformes se sont accélérées dans tous les secteurs d'activité, exception faite des banques et établissements financiers. Cependant, il y a lieu de voir de près les réformes et les démarches suivies par nos responsables de l'époque, leurs effets et conséquences sur les deux plans macro et microéconomiques. L'image de l'Algérie, ternie par les évènements politiques du début à la moitié des années 90, a entraîné une rareté flagrante des capitaux, une baisse vertigineuse des recettes d'exportation, une croissance exponentielle des dépenses publiques, des pertes énormes d'infrastructures de base, « vétusté de plus en plus avérée, sabotage répétitif et généralisé, endettement lourd et insupportable ». Ceci a poussé nos gouvernants à réagir afin de desserrer l'étau imposé à tout un peuple, en ayant recours aux recettes amères des institutions financières internationales, notamment celles du fameux FMI. Les premières démarches avec ces institutions étaient d'une difficulté extrême, vu l'introduction de critères non financiers dans les négociations avec les autorités algériennes, « Bonne gouvernance, démocratie, transparence, désengagement étatique, etc. ». Mais elles ont conduit à un accord plus ou moins pratique, même avec des coûts sociaux énormes et des conséquences néfastes sur l'emploi. L'accord en question prévoyait une série de mesures de stabilisation économique, afin d'éviter la cessation de paiement et de rassurer les créanciers et ainsi permettre un retour plus au moins accepté de l'Algérie sur le marché international des capitaux. Ensuite, suivit un plan d'ajustement structurel, visant non seulement la relance économique et le retour à la normale du pays, mais également l'abandon définitif du système socialiste de gestion économique. Sur le plan macroéconomique, les mesures préconisées par le FMI visaient une politique commerciale libérale, une politique monétaire moderne et efficace, une politique budgétaire drastique et rigoureuse, une politique fiscale juste et progressivement allégée, une politique sociale orientée vers les couches les plus défavorisées. Sur le plan microéconomique, les mesures édictées étaient dans le sens de la fermeture de toutes les entreprises déficitaires et la privatisation de celles qui sont équilibrées, la libéralisation des prix des produits subventionnés et le retour aux prix réels, l'encouragement des investissements privés, l'encadrement du crédit avec des instruments modernes, la limitation des dépenses publiques, l'adoption d'un taux de change réel, et bien d'autres mesures. Pendant ces deux phases, on ne cessait de parler de réforme du système bancaire et financier algérien pour l'adapter aux nouvelles donnes économiques, pour lui permettre de jouer son rôle de moteur et de vecteur stimulant la croissance, pour le doter d'instruments juridiques et techniques lui permettant de sortir de l'emprise bureaucratique et administrative d'avant. Le plan stand-by « 1993-1995 » et le Plan d'Ajustement Structurelle « 1995-1998 » préconisés à l'Algérie, étaient en fait des formules toutes faites dans les laboratoires d'experts économiques connaissant mal la situation. Une formule ayant déjà démontré ses limites avec le Mexique juste avant « crise de 1994 ». Mais la position de notre pays n'était pas confortable pour contester ou poser des conditions de quelque nature que ce soit. Cependant, ce qui nous intéresse le plus, ce sont les réformes touchant le système bancaire et financier algérien. Alors quelles sont les nouveautés introduites pendant cette période ? Quels sont les aspects de la réforme bancaire ayant trouvé leur chemin vers la concrétisation et l'application ? Quelles sont les contraintes à la fois théoriques et pratiques à une réforme efficace et rapide dans ce contexte ? D'abord, la politique monétaire, elle, concerne non seulement la Banque Centrale d'Algérie devenue entre-temps Banque d'Algérie, mais également le Trésor Public, les banques commerciales, les établissements financiers, et de très près l'administration des douanes. Ensuite, la politique commerciale ne concerne pas uniquement le ministère du Commerce ou celui de l'Energie ou de l'Industrie, mais concerne également les banques et les établissements financiers, « financement de la production et de la commercialisation, financement des importations et des exportations », la banque centrale, « domiciliation des transactions commerciales internationales, leur apurement et leur suivi» et enfin et là aussi l'administration fiscale douanière, « tarification fiscale et douanière, célérité dans le traitement des transactions internationales ». Pour ce qui est de la politique fiscale, il y a lieu de remarquer que l'acteur concerné n'est autre que « le Trésor ». De même pour la réforme des finances publiques, et de la politique budgétaire, la Banque d'Algérie, le Trésor public, les banques et les établissements financiers ainsi que les investisseurs institutionnels y sont liés directement. Enfin et en dernier lieu, la réforme du système social ne peut en aucun cas se faire loin des caisses de sécurité sociale « CNAS, CASNOS, CNR, CNAC » et là également un système bancaire et financier efficace serait la clé de la réussite. Donc, eu égard à ces réformes, le système bancaire et financier est au coeur de la problématique des réformes et est le moteur de toute l'économie. Vouloir la rendre une économie d'endettement après plus d'un quart de siècle d'économie d'épargne n'est pas une tâche aisée.



Je remercies vivement l'auteur de cet article pour sa précision, son objectiité et surtout sa neutralité. Un article que je recommande aux entreprises et aux personnes intéressées par la réalité du système bancaire en Algérie. Enfin, j'espère que l'auteur arrosera notre soif en continuant à présenter un point de vue d'un praticien à la fois et d'un théoricien. Merci encore une deuxième fois et bon continuation.
LUCIO GUERATTO - Diplômate - Alger
17/12/2007 - 697

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