Algérie - A la une


Qui a tué qui '
Certaines semaines interpellent, leurs jours s'égrènent sur le fil du doute méthodique qui doit pousser la vérité à émerger. Ce sont les semaines des questions, ce qu'a été celle qui vient de s'écouler.«Qui a tué qui '» C'est la question qui turlupine Me Patrick Baudouin, ancien président de la Fidh et qui avait pas mal donné de la voix sur l'Algérie pendant la décennie noire et même au-delà. Ce n'est un secret pour personne, l'avocat s'était clairement positionné au côté des promoteurs de la thèse du «Qui tue qui» ' Enracinée comme du chiendent dans sa tête, l'idée a ressurgi avec force à la faveur de la venue en Algérie d'une mission de juges et d'experts français conduite par le juge antiterroriste Trevidic. Chargée d'enquêter sur les circonstances de l'assassinat des sept moines de Tibhirine en mai 1996, la mission - du moins son chef- s'est plainte d'entraves des autorités algériennes. Patrick Baudouin, avocat des familles des victimes, porte une grave accusation, celle de «dissimulation de preuves». Pour lui et le juge Trévidic, il n'est pas question que les échantillons d'ADN prélevés sur les cranes des moines décapités par le GIA soient analysés en Algérie, faute de «compétences suffisantes», selon eux. On appréciera au passage ce beau témoignage de reconnaissance pour le pays qui a «écrasé» son amour propre en accédant à une vieille requête des autorités judiciaires françaises. Le Quai d'Orsay a vite rectifié le tir, mais cela ne suffira pas à dévier «Baudouin et Cie» de la trajectoire prise en 1996 déjà, et même avant. Ils savent très bien que les analyses ADN, de nos jours, n'ont rien de sorcier. C'est une simple question de moyens et de compétences, autrement dit des machines performantes et de spécialistes en biologie et informatique bien formés. L'Algérie ne manque ni des unes ni des autres. D'ailleurs, ces dernières années, la police et la gendarmerie recourent souvent aux tests ADN pour élucider des affaires criminelles. Et la presse s'en fait régulièrement l'écho.En fait, Me Baudouin n'a fait que changer son fusil d'épaule, ainsi que le temps de son invariable conjugaison. Après le présent de l'indicatif du pernicieux «Qui tue qui '», le passé (re)composé du nostalgique et ressuscité «Qui a tué qui '» Bientôt, refusant définitivement de quitter ses ornières, il défendra le délirant «Qui tuera qui '» Les droits de l'Homme mènent à tout, y compris au refus de laisser reposer en paix des hommes de religion qui ont vécu leur foi dans ce pays sans jamais avoir cultivé la haine. C'est bien dommage pour une si noble mission qui aurait gagné à marquer avec plus de netteté une ligne de démarcation infranchissable avec les engagements passionnels -et donc discutables- de parti pris politiques.La porte du doute étant ouverte et rouverte par l'avocat, elle mérité de ne pas être refermée trop vite. D'autant plus que l'incrédulité de l'avocat français ne repose pas sur des convictions en rapport direct avec la défense des droits de l'Homme. Son fondement est au contraire politique et il trouve son explication dans le vieux postulat des années 90 défendu à cor et à cri partout dans les enceintes internationales. Ce postulat consistait à expliquer les affrontements qui ensanglantaient l'Algérie par une «guerre civile au cours de laquelle l'armée algérienne et ses services de sécurité se sont rendus coupables de massacres collectifs de civils et d'exécutions extra-judiciaires». En arrière-fond, bien évidemment, l'arrêt du processus électoral de décembre 1991 qui a «privé les islamistes du FIS de leur victoire électorale».Le monde entier, y compris la France, a fini par se rendre à l'évidence d'un terrorisme islamiste qui a failli emporter l'Algérie. Mieux, toutes les capitales occidentales qui, dans les années 90, accordaient quelque crédit à la thèse du «Qui tue qui '» soutiennent aujourd'hui l'Algérie et l'aident et l'encouragent dans ses efforts d'éradication du même terrorisme islamiste. Pourquoi, alors, le défenseur des droits de l'Homme, Patrick Baudouin, reste-t-il figé sur ses positions de la décennie 90 ' Parce qu'il ne se résout pas à la défaite de ses protégés d'hier et d'aujourd'hui. C'est pourquoi aussi, dès le départ, il a man?uvré pour donner une tournure politique à la mission des juges français, alors qu'elle a lieu dans un cadre de coopération judiciaire entre les deux pays.A. S.




Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)