Algérie - 04- La présidence de Chadli Bendjedid

Que faut-il retenir de la rencontre de Londres entre Ait Ahmed et Ben Bella ?



Que faut-il retenir de la rencontre de Londres entre Ait Ahmed et Ben Bella ?
Depuis 27 ans, l’initiative pour l’instauration de la démocratie en Algérie, engagée par les deux chefs historiques, Hocine Ait Ahmed et Ahmed Ben Bella, est présentée, par le régime et ses acolytes, comme un acte de félonie. De plus, exploitant malhonnêtement cette rencontre, les adversaires d’Ait Ahmed colportent des rumeurs selon lesquelles le président du FFS, en rencontrant celui qui l’avait emprisonné en 1964, s’est allié à son bourreau. D’ailleurs, ces spécialistes de la manipulation oublient carrément de critiquer Ben Bella, concentrant ainsi leurs attaques contre Ait Ahmed. Cela dit, quoi qu’on puisse reprocher à Ben Bella, dans le début des années 1980, il fut réellement un opposant au régime d’Alger.

De toute évidence, après un séjour en prison, qui a duré quinze ans, Ben Bella n’est plus –et c’est le moins que l’on puisse dire –un élément du système. Créant son parti en exil, le MDA (Mouvement pour la démocratie en Algérie) en l’occurrence, le fils de Maghnia s’engage résolument dans un mouvement d’opposition au régime en place. Néanmoins, le fait-il par esprit rancunier ou par conviction ? A présent, il est difficile d’en juger, d’autant plus que le concerné n’est plus de ce monde pour en témoigner.

Quoi qu’il en soit, en décembre 1985, la déclaration de Londres s’inscrit fermement dans un mouvement d’opposition. Toutefois, avant de préconiser la voie à suivre, les deux anciens chefs nationaux de l’OS ont dressé un tableau exhaustif des 23 ans d’indépendance. En effet, bien que Hocine Ait Ahmed ait joué un rôle prépondérant, hors caméra bien entendu, au sein du mouvement national, force est de reconnaitre que l’engagement des deux militants a contribué amplement au recouvrement de l’indépendance. En fait, le parti nationaliste, le PPA-MTLD, auquel appartenaient les deux chefs historiques, avait pour objectif de juguler la fin du système colonial, un système déniant tous les droits aux Algériens. Et à mesure que les autorités coloniales serraient la bride, l’éveil du peuple algérien se manifestait par la même occasion. Rappelant la devise du parti nationaliste, les deux chefs historiques insistent sur l’exigence du peuple algérien : « Contre tout statut : la parole au peuple. Contre toute charte : élection d’une Assemblée algérienne constituante. »

Cependant, « la proclamation pour l’instauration de la démocratie en Algérie » distingue le fossé séparant le peuple algérien de ceux qui les gouvernent. D’après les deux chefs historiques, les dirigeants algériens ont confisqué, dès le recouvrement de l’indépendance, le droit aux Algériens d’être citoyens à part entière. « Le peuple algérien est dépossédé de sa souveraineté, les libertés démocratiques qui en sont les supports crédibles ayant été confisquées. Imposé par la force ainsi que par les trucages électoraux, le système politique veut se prévaloir de la légitimité démocratique », écrivent-ils.

Ainsi, bien que Ben Bella ait présidé, pendant trois ans, aux destinées de l’Algérie, le document signé à Londres juge sévèrement la gestion, par l’emploi systématique de la force, des affaires publiques. Cela dit, ce qui est mis en exergue est indubitablement la déliquescence de l’État. « 23 ans après la libération, l’Algérie a perdu la maitrise de son destin. Tout se passe comme si elle, son peuple, sa mémoire historique, les richesses de son sol et son sous-sol et jusqu’au souvenir des martyrs étaient la propriété exclusive de la caste au pouvoir soutenant et soutenue par les clans d’affairistes », constatent-ils. Et bien que la situation aille en s’empirant, les deux chefs historiques ne revendiquent aucun monopole, mais ils décident de conjuguer leurs efforts en vue d’infléchir « le pouvoir militaro-policier d’Alger ».

En somme, pour que le peuple algérien redevienne libre, les présidents du FFS et du MDA n’y vont pas par mille chemins. Les chefs historiques estiment que si l’Algérie veut s’en sortir, elle devra amorcer un véritable processus démocratique. À cet effet, dix propositions sont avancées. Du respect des droits de l’homme à la séparation des pouvoirs [législatif, exécutif, judiciaire] en passant par la liberté de constituer des partis politiques, les deux chefs historiques ne négligent aucun détail. Et pour résumer les propositions contenues dans le document, tout le pouvoir, d’après eux, doit reposer sur le peuple algérien.

Par ailleurs, pour que la démocratie naissante puisse s’épanouir, les présidents du FFS et du MDA proposent « l’élection au suffrage universel d’une Assemblée nationale constituante ». Cela dit, bien que Ben Bella, lorsqu’il a pris le pouvoir en 1962 grâce au coup de force militaire, ait fait voter une constitution en 1963, en 1985, grâce surement aux arguments persuasifs d’Ait Ahmed, il reconnait que la constitution doit être l’émanation d’une Assemblée nationale choisie librement par les Algériens. Et c’est sur cette base que les deux hommes ont décidé d’œuvrer ensemble. Pour toutes ces raisons, seuls les malhonnêtes pourront dire qu’Ait Ahmed a renié quoi que ce soit de ses convictions.

Par Ait Benali Boubekeur



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