Algérie - Etude et consulting


Brown Roots and Condor, BRC, la joint venture de réalisation en hydrocarbures, attend une décision « politique » pour sceller son sort. Voilà un autre épisode ébouriffant du management des entreprises en Algérie qui fait un sinistre écho au procès Khalifa à Blida.

Quel est l’enjeu ? BRC est une entreprise qui allie dans son capital principalement Sonatrach et KBR une filiale britannique du géant américain Halliburton. Son but ? Consolider un pôle d’ingénierie dans les process de séparation du gaz, dans les équipements de son transport (stations de compression) et dans la construction des infrastructures pétrolières (plateforme, base vie…). BRC est considérée comme le lieu d’un transfert de technologie au profit de Sonatrach dans ces filières. Une démarche qui plairait beaucoup à la nouvelle stratégie industrielle de Hamid Temmar. Mais voilà qu’il y a un mois environ, une instruction provenant de la présidence de la République ordonne la dissolution de BRC. Ni plus ni moins. Pourquoi ? BRC est impliquée dans ce qu’il faut appeler le scandale des surfacturations. La joint venture a bénéficié de manière inexplicable d’une série de contrats de gré à gré. Cette « facilité » a ouvert la voie à des facturations fantaisistes — largement rapportées par la presse — au préjudice essentiellement de Sonatrach mais aussi du ministère la Défense nationale. Une enquête judiciaire est en cours pour établir les conditions qui ont amené de tels contrats. Elle devra notamment éclairer l’opinion sur le recours aussi systématique au gré à gré dans un secteur, l’énergie et les mines, où le ministre, Chakib Khelil, s’est fait le champion de la transparence en instaurant le recours obligatoire à l’appel d’offres concurrentiel pour toutes les transactions qui dépassent un montant de 200 000 DA. L’instruction est ouverte, l’ancien DG de BRC est sous contrôle judiciaire et ses clients sont auditionnés. Mais entre temps quel destin pour BRC ? L’entreprise est financièrement viable, ce n’est pas elle qui a subi des préjudices. Elle emploie 1900 travailleurs, détient des créances importantes et a accumulé une expertise réelle dans certains travaux de réalisations, même si cette dernière est menacée de s’envoler très vite dans la situation de flou qui entoure son avenir. Tout cela est condamné à disparaître par le simple fait d’une décision « politique » intempestive. L’actionnaire principale de BRC, Sonatrach, n’a même pas eu le temps de délibérer au sujet de l’avenir de son engagement dans BRC. Dans cette affaire, un autre contre-modèle de gouvernance économique, l’instance politique continue de prendre le pas sur le management des entreprises. Résultat, la mise en liquidation rampante de BRC — interdit administrativement de soumissionner pour de nouveaux contrats — rencontre de vraies résistances dans le secteur de l’énergie. Comme dans le cas de la loi sur les hydrocarbures, des cadres du secteur, le mieux doté du pays en ressources humaines, ont une autre vision de l’intérêt de Sonatrach et de son développement, que celui de se séparer de tout moyen de réalisation spécifique à la filière. L’instruction pour la liquidation va-t-elle dans ce cas aller à son terme ? Elle deviendrait alors suspecte au point de ressembler à une destruction délibérée de pièces à conviction dans l’enquête judiciaire en cours. Un reproche entendu plus d’une fois au procès Khalifa de Blida.


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