Algerie - Associations environnementales

Planète (Nouvelle-Zélande/Océanie) - «Rainbow Warrior»: il y a 40 ans, le sabotage du navire déclenchait un scandale d’État


Planète (Nouvelle-Zélande/Océanie) - «Rainbow Warrior»: il y a 40 ans, le sabotage du navire déclenchait un scandale d’État
Alors qu’il se préparait à partir en campagne contre les essais nucléaires français dans le Pacifique, le «Rainbow Warrior», navire de Greenpeace, explosait dans un port de Nouvelle-Zélande dans la nuit du 10 juillet 1985. Quarante ans plus tard, retour sur ce drame ayant viré au scandale d’État.

D’un simple fait divers à un scandale d’État. Dans la nuit du 10 juillet 1985, deux explosions percent la coque du Rainbow Warrior, le navire de Greenpeace au mouillage dans la baie d’Auckland, en Nouvelle-Zélande, alors qu’il s’apprêtait à partir perturber les essais nucléaires menés en Polynésie française. Ce naufrage a tué un sympathisant de l’association, le photographe portugais Fernando Pereira, et provoqué un séisme dans ce pays qui n’avait jamais connu d’attaque sur son sol.

Au départ, le drame n’a pas suscité de réactions particulières dans l’Hexagone, jusqu’à ce que des journalistes prouvent l’implication des services secrets français. Quarante ans plus tard, retour sur cette affaire qui a considérablement refroidi les relations entre Paris et Wellington.

Tout commence au début des années 1960. La France commence des essais nucléaires dans le désert du Sahara, au sud de l’Algérie. La signature des accords d’Evian, en mars 1962, contraint les autorités à trouver un autre lieu pour mener ces opérations. Excentrée mais bénéficiant d’un climat favorable, la Polynésie française apparaît comme une bonne solution de repli. Le site d’expérimentations nucléaires du Pacifique (CEP) voit le jour quatre ans plus tard autour de l’atoll de Mururoa.

Localement, ces opérations sont la cible de critiques. Mais la contestation ne commence à inquiéter les autorités françaises que des années plus tard. En mars 1985, le directeur du CEP informe le ministère de la défense que Greenpeace prépare une action aux abords du site. Le cabinet de Charles Hernu demande alors à la Direction générale des services extérieurs (DGSE) d’empêcher cette campagne.

- Responsabilité de la DGSE

Une agente infiltre l’association pour connaître la date d’arrivée du Rainbow Warrior au port d’Auckland. Les services secrets prévoient d’y neutraliser le navire en déclenchant deux explosions, l’une pour pousser l’équipage à évacuer, l’autre pour le couler. Mais le 10 juillet 1985, tout ne se passe pas comme prévu: après la première détonation, le photographe Fernando Pereira retourne dans sa cabine pour récupérer son matériel. Il meurt avec l’explosion de la seconde charge.

La police interpelle le lendemain les époux Turenge, un couple de touristes soupçonné d’avoir participé à l’opération. Au début du mois d’août, des médias néo-zélandais commencent à pointer la responsabilité des services secrets français dans ce drame.

Quand les autorités néo-zélandaises découvrent aussi l’existence de l’Ouvéa, le voilier ayant permis d’acheminer les explosifs vers Auckland, leurs accusations se font de plus en plus insistantes. En face, Paris nie en bloc. «Il serait bon que les griefs accumulés et que les accusations infondées dont la France est l’objet soient évités», écrit le président socialiste François Mitterrand au premier ministre de l’archipel.

- Excuses tardives et rapatriements anticipés

Le travail d’Edwy Plenel et Bernard Le Gendre, deux journalistes du Monde, va s’avérer déterminant pour faire la lumière sur cette affaire. Le 17 septembre, ils révèlent l’existence d’une troisième équipe des services secrets, composée de deux nageurs de combat et chargée de poser les bombes sur la coque du Rainbow Warrior.

Trois jours plus tard, le ministre Charles Hernu démissionne, et le patron de la DGSE, l’amiral Pierre Lacoste, est limogé dans la foulée. Le premier ministre Laurent Fabius reconnaît enfin la responsabilité des renseignements extérieurs français dans le naufrage.

Paris finira par présenter des excuses officielles à Wellington, et versera des millions de francs de dommages et intérêts. La justice néo-zélandaise condamne les faux époux Turenge – c’est-à-dire le colonel Alain Mafart et le commandant Dominique Prieur, membres de la DGSE – à dix ans de prison.

Des accords leur permettent ensuite de purger leur peine sur l’île d’Hao, en Polynésie française, à condition de ne pas revenir en métropole pendant trois ans. Mais le premier ministre Jacques Chirac organise le rapatriement du colonel Mafart dès décembre 1987 pour raisons médicales. Le capitaine Dominique Prieur, enceinte après la mutation de son mari sur l’île, suivra quelques mois plus tard. De quoi raviver les tensions entre la France et la Nouvelle-Zélande pendant quelques années supplémentaires.

Photo: Ce 10 juillet 2025, cela fait exactement quarante ans que le «Rainbow Warrior», le navire de Greenpeace, a été coulé par les services secrets français dans la baie d’Auckland, en Nouvelle-Zélande. PATRICK RIVIERE/AFP / AFP

Par Juliette Vienot de Vaublanc
Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)