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Planète - L’Asie meurtrie par des inondations historiques


Planète - L’Asie meurtrie par des inondations historiques
Le bilan des inondations historiques s’alourdit en Indonésie, Thaïlande, Malaisie et au Sri Lanka. À l’origine du phénomène notamment, des moussons exacerbées par la crise climatique.

Les recensements de victimes ne cessent de s’alourdir. Depuis le 26 novembre, de fortes inondations frappent l’Indonésie, la Thaïlande, la Malaisie et le Sri Lanka. Au moins un millier de personnes ont été tuées, et des centaines d’autres demeurent portées disparues, dans ce que la presse internationale classe déjà parmi les pires catastrophes météorologiques des dernières années.

Immortalisant les scènes de désolation, des clichés de photojournalistes affluent des quatre pays. La mosquée de la province indonésienne d’Aceh — au nord de Sumatra — y apparaît trônant seule autour des ruines de bâtiments engloutis par les eaux brunâtres. Pas 1 cm d’herbe ne perce le jour sur ce sol désormais couvert d’une boue épaisse. Un peu plus loin, un grand pont d’apparence solide a tout bonnement été coupé en deux par la force du courant.

. Un pont endommagé par des crues soudaines dans la province d’Aceh en Indonésie, le 28 novembre 2025. © Chaideer Mahyuddin / AFP (Voir photo sur site ci-dessous)

À 2.000 km à l’ouest, le quotidien sri-lankais Daily News affiche en première page de son journal du 1er décembre l’image d’une femme portant sur son visage les stigmates d’une vieillesse chahutée par la crise climatique. Un homme la porte jusqu’à un rafiot, trop étroit pour accueillir tous les habitants coincés par cette montée soudaine des rivières. De cette province de Colombo arrive une autre photographie: celle de deux chats apeurés par cet océan éphémère, réfugiés dans les bras de leurs compagnons humains au milieu d’une eau leur grimpant jusqu’à la taille.

À Hat Tai, quatrième ville de la Thaïlande à l’extrême sud du pays, les stades et les gymnases se sont métamorphosés en abris pour les réfugiés. Et puis, il y a ces femmes et ces hommes qui n’ont pas survécu. Le 28 novembre, le photojournaliste Sirachai Arunrugstichai — plus habitué à documenter la dégradation des récifs coralliens — a immortalisé avec son appareil les corps sans vie manipulés par des secouristes aux mains gantées, dans cette même métropole.

- Des cyclones exacerbent la mousson

Au moins 176 morts ont été enregistrés en Thaïlande. Le décompte évolue de jour en jour, et cet épisode s’érige comme l’un des plus meurtriers qu’ait connu le pays suite à des inondations depuis dix ans. Les habitants dénoncent une gestion calamiteuse de la catastrophe par les autorités, et deux responsables locaux ont d’ores et déjà été suspendus pour des manquements présumés d’après l’AFP.

En Indonésie aussi, on cherche les responsables. D’après le Jakarta Globe, le bureau du procureur général aurait ouvert une enquête pour déterminer le rôle de l’exploitation forestière illégale à grande échelle dans les glissements de terrain. Pour le pays aux 17.000 îles, cette catastrophe météorologique est la plus meurtrière depuis le tremblement de terre et le tsunami ayant tué plus de 2.000 personnes aux Célèbes en 2018.

Au-delà des activités forestières dénoncées se pose la question de l’attribution ou non de ces inondations à la crise climatique. Certes, celles-ci interviennent au cœur de la saison de la mousson, mais des tempêtes tropicales exceptionnelles ont exacerbé ce phénomène météorologique. Dans le détroit de Malacca, séparant Sumatra de la Malaisie, le cyclone Senyar a renforcé les rafales et produit des trombes d’eau plus abondantes. Au Sri Lanka, c’est le cyclone Ditwah qui a plongé l’État insulaire dans l’abîme. En affectant la durée et l’intensité des tempêtes, le changement climatique participe ainsi bel et bien à aggraver ces épisodes.

- «Je ne sais pas où aller»

Et leurs répercussions tombent tels des dominos. D’après le Daily Mirror, quotidien édité au Sri Lanka, des centaines de routes demeurent impraticables, et les maisons détruites par les flots se comptent par milliers. À ces épreuves s’ajoutent celles des coupures d’électricité et de réseaux mobiles.

Dans les hôpitaux — eux aussi envahis par les eaux —, les victimes arrivent par dizaines et les patients les plus critiques doivent être évacués par avion loin des zones sinistrées. Les maladies vectorielles, décuplées en situation de crise, pourraient bientôt finir de plonger les services hospitaliers dans le chaos. Sans compter l’eau potable tardant à être acheminée, et la menace d’une crise alimentaire devant les terres agricoles submergées.

«Ma maison est totalement inondée, dit à l’AFP Selvi, habitante de Colombo, capitale économique du Sri Lanka, quatre sacs sous le bras. Je ne sais pas où aller, mais j’espère trouver un abri sûr où emmener ma famille.»

Face aux 833.000 déplacés, les autorités du pays s’activent. Le 30 novembre, à la tombée de la nuit, un hélicoptère œuvrant à délivrer des personnes piégées par les eaux s’est écrasé. Un appel à l’aide internationale a été lancé et des camions commencent déjà à acheminer des vivres. Jamais le Sri Lanka n’a affronté de telles pertes et dégâts depuis le tsunami historique de 2004, ayant tué plus de 250.000 personnes à travers l’océan Indien.

Photo: Des habitants traversent une route inondée après de fortes pluies à Wellampitiya, au Sri Lanka, le 29 novembre 2025. - © Ishara S. Kodikara / AFP

Par Emmanuel Clévenot

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