Algerie - Météo, Climatologie et phénomènes naturels

Planète (Amérique du Nord) - Le Canada peine à endiguer les immenses feux de forêt


Planète (Amérique du Nord) - Le Canada peine à endiguer les immenses feux de forêt
Plus de 230 incendies de forêt sont actifs au Canada. Face à des feux plus vastes et imprévisibles, la stratégie nationale pour les combattre évolue, mais le défi reste immense.

Montréal (Canada), correspondance

L’été n’a pas encore officiellement débuté que déjà 3,5 millions d’hectares de forêt ont brûlé cette année au Canada (soit plus que la superficie de la Belgique). Un chiffre extrêmement haut même s’il n’atteint pas le record de 2023 — plus de 5 millions d’hectares à la même période, et 18 millions d’hectares en tout.

«On est vraiment dans une saison exceptionnelle, les surfaces brûlées grandissent de façon très rapide depuis le début du mois de mai», constate Yan Boulanger, chercheur en écologie forestière au Service canadien des forêts. Ce qui frappe, ce n’est pas tant le nombre de feux, mais leur superficie: « Le feu qui est à cheval entre la Saskatchewan et le Manitoba [des provinces de l’ouest canadien] fait plus de 500.000 hectares. Un autre fait plus de 600.000 hectares. Ils sont exceptionnellement grands», observe le chercheur.

Sécheresse, températures record et vents forts nourrissent ces feux précoces et persistants, qui ont déjà forcé l’évacuation de plus de 30.000 personnes.

- Des mesures à «moyen et long terme»

L’été qui se dessine n’est pas une surprise: les changements climatiques ont rendu sept fois plus probables les conditions météo extrêmes survenues en 2023, d’après les chercheurs du World Weather Attribution. Face au risque de revivre une telle saison infernale, la réponse canadienne a évolué depuis deux ans. «Il y a une hausse des investissements dans la recherche sur les feux de forêt depuis. Et surtout, on observe des municipalités qui sont plus proactives, il y a eu une grande prise de conscience du danger, depuis cet été-là», estime Jonathan Boucher, chercheur spécialiste de la prévention des feux de forêt à Ressources naturelles Canada.

Le pays s’est doté d’une stratégie nationale et le programme Intelli Feu, créé en 1993 et qui souffre depuis longtemps d’un sous-financement chronique, a vu son enveloppe grossir dernièrement. Il vise à augmenter la résilience des quartiers face aux feux de forêts. Les brûlages dirigés (des petits incendies déclenchés pour en éviter des plus gros) ou la plantation de végétaux plus résistants aux incendies figurent parmi les armes du programme. «Ce sont des mesures qui sont prises à moyen et à long terme pour réduire le combustible [la végétation] et faire en sorte que si jamais il y a des feux, ils soient moins sévères» détaille Yan Boulanger.

«Des progrès dans la détection précoce et la gestion du risque»

La technologie s’est aussi améliorée depuis deux ans. Grâce à l’intelligence artificielle, dont l’usage s’étend, il devient possible de croiser en temps réel les indices de sécheresse, les historiques d’incendies et les cartes de végétation pour mieux anticiper l’évolution des feux. «Depuis 2023, il y a eu une accélération des progrès dans la détection précoce et la gestion du risque », assure Jonathan Boucher. Autre avancée, qui reste cependant à être concrétisée : le satellite Gardefeu, attendu pour 2029, devrait être capable de détecter les départs de feu en quelques minutes, même dans les régions les plus isolées, sur l’ensemble du territoire canadien.

- Manque de pompiers volontaires

Malgré ces progrès, le Canada fait face à des obstacles démesurés pour combattre efficacement les flammes sur son territoire. Le premier est une criante pénurie de pompiers volontaires. En 2024, ils étaient près de 40.000 de moins qu’en 2016 — il y avait alors 126.000 pompiers volontaires. Beaucoup moins qu’en France, un pays quinze fois plus petit. [1] Face à ce vide, en juin 2023, 1.500 pompiers venus d’Europe, d’Australie et d’Amérique du Sud étaient venus prêter main-forte au plus fort des feux au Canada, qui compte encore beaucoup sur cette aide étrangère.

Le pays doit aussi composer avec son statut d’État fédéral: ce sont les provinces et territoires qui sont les principaux responsables de la lutte contre les incendies de forêt, et il n’est pas toujours aisé de coordonner celle-ci à l’échelle du pays. Chacun doit donc s’entendre pour, par exemple, éviter de construire des maisons dans les zones où le risque d’incendie est élevé et encourager les coupe-feux verts, des bandes de végétation avec des plantes sélectionnées pour être moins inflammables.

. Le 8 juin, le feu appelé Red Lake 12 menacait la Première Nation de Sandy Lake. Facebook / Destiny CRae (Voir photo sur site ci-dessous)

L’équipement reste aussi inégal, surtout dans les communautés autochtones: beaucoup ne disposent pas de camions-citernes adaptés. Ce manque de moyens augmente leur vulnérabilité et elles demandent régulièrement des comptes à ce sujet à Ottawa.

L’industrie forestière doit aussi collaborer, car des forêts en monoculture d’essences de bois très inflammables — comme le pin tordu, l’épinette et le cèdre — peuvent mettre des régions à risque, tout comme une trop grande récolte d’arbres. Reste aussi à agir sur une évidence: pour que la probabilité des feux diminue, il faut freiner le dérèglement climatique. Or, le Canada reste bien loin des objectifs qu’il s’est fixé: une baisse de 40 à 45 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030 par rapport à 2005. Pour l’instant, elles n’ont chuté que de 8,5 %.

Notes

[1] Au 31 décembre 2023, on dénombrait 256 400 sapeurs-pompiers en France, dont : 43 400 sapeurs-pompiers professionnels (17 %) 200 000 sapeurs-pompiers volontaires (78 %).

Photo: Le feu connu sous le nom de Red Lake 12, le 15 juin 2025 dans le nord de l'Ontario, au Canada. - © Ontario Ministry of Natural Resources / AFP

Pour voir la photo ci-dessus: https://reporterre.net/Intelligence-artificielle-et-brulages-diriges-le-Canada-face-aux-feux-de-forets

Par Théo Bellemare

Il fait un peu chaud, non?

De nombreux départements sont déjà en vigilance canicule.

Les nuits tropicales s’enchaînent.

Et la fête de la musique s’annonce comme la plus chaude jamais enregistrée.

Oui, il fait chaud.

Mais l’écologie, ce n’est pas qu’une question de climat.

C’est aussi:

→ les mégabassines qui menacent notre accès à l’eau potable pendant les sécheresses

→ le bétonnage des terres agricoles qui rend l’alimentation plus chère et dépendante des importations

→ le démantèlement du droit environnemental qui fragilise notre santé et notre avenir collectif

Et face à tout ça, il faut plus que des thermomètres et des ventilateurs: il faut agir.

Et pour agir, il faut savoir.

Chaque mois, plus de 2 millions de personnes lisent nos articles sur l’écologie, en accès libre et sans publicité.

Des millions consultent nos publications sur les réseaux sociaux.

Plus de 220.000 personnes reçoivent nos lettres d’info par e-mail.

À Reporterre, média à but non lucratif, nous n’avons ni actionnaire, ni propriétaire milliardaire — seulement une équipe de 26 journalistes, déterminée à mettre l’écologie au coeur du débat public.

Ce modèle ne tient que grâce à vous.

Alors si vous le pouvez, faites un don.

Dès 1€, c’est un geste de soutien fort pour l’écologie et l’indépendance de la presse.

(Et ça prend moins de temps que la lecture de ce texte.)

Je soutiens Reporterre

Si vous en avez les moyens, choisissez un soutien mensuel. Merci.
Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)