Algerie - Ornithologie

Planète (Afrique) - L'instant + : en Tunisie, des amoureux de la nature ramènent des rapaces à la vie sauvage


Vétérinaires, naturalistes ou simples amateurs de nature, ils sont une quarantaine de jeunes tunisiens passionnés à consacrer leur temps libre au programme "ResQ". Lancé, il y a deux ans, par l'Association tunisienne de la vie sauvage, il a pour but notamment de secourir des animaux sauvages blessés et de sensibiliser l'opinion publique.

Retourner dans son milieu naturel. Il y a quelques mois encore, l'aigle royal était incapable de voler, cloué au sol avec ses ailes coupées, probablement par des braconniers. Il s'est élancé le 23 février dans un vol majestueux au-dessus d'un pic rocheux, dans un rare relâcher attendu avec impatience par des bénévoles tunisiens.

Ridha Ouni, président de l'Association d'ornithologie tunisienne, a choyé l'aigle royal depuis sa confiscation chez un particulier en juillet 2024 à Gabès, dans le sud du pays.

Cet expert en biodiversité a monté un centre de réhabilitation avec les moyens du bord dans sa ferme de Sidi Thabet, à l'ouest de Tunis.

À côté de ses poules qui caquettent, une dizaine de faucons, de busards ou de milans se pressent les uns contre les autres dans une volière, en attendant que leurs ailes - coupées pour les empêcher de voler - se régénèrent. La majorité des animaux présents, parfois des fennecs ou des loups, proviennent de confiscations de la Direction générale des forêts.

Le quatrième grand rapace relâché en deux ans
L'aigle royal "Aquila" a été secouru par l'ATVS, il s'est envolé dans la nature à Sidi Zid, en Tunisie, le 23 février 2025.
L'aigle royal "Aquila" a été secouru par l'ATVS, il s'est envolé dans la nature à Sidi Zid, en Tunisie, le 23 février 2025. © Fethi Belaid, AFP
L'aigle libéré ce dimanche-là au mont Sidi Zid, à 50 kilomètres de Tunis, était prêt pour le grand départ car "Aquila" préparait déjà un nid, explique Ridha Ouni, notant qu'il a été relâché dans une zone idéale pour trouver proies et femelles. En plus, "c'est la période de migration de l'Afrique centrale vers l'Europe, la meilleure période. S'il trouve une partenaire, l'an prochain, on le reverra peut-être ici avec ses aiglons", s'enthousiasme cet autodidacte de 60 ans.

La directrice de l'ATVS, quant à elle, déborde d'émotion : "réhabiliter un animal sauvage puis le rendre à la nature, c'est exceptionnel" témoigne Jamila Bouayed, âgée de 32 ans.

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Pour Maha Clostio, une Tuniso-Américaine de 27 ans en dernière année d'études vétérinaires, voir "Aquila" retrouver la liberté a une saveur particulière. "J'ai fait partie de l'équipe de vétérinaires de l'ATVS qui l'a sauvé quand nous étions dans le sud pour relâcher un fennec. Ça a été un long parcours pour qu'il redevienne fort et en bonne santé", sourit-elle, se souvenant d'un oiseau déshydraté, ailes coupées, serres blessées.

"Aquila" est seulement le quatrième grand rapace relâché en deux ans par "ResQ", après un autre aigle royal et deux vautours. Mais sur cette même période, le centre de Ridha Ouni a "accueilli plus de 200 individus" repartis dans la nature.

L'aigle royal sur liste rouge des espèces en danger
L'aigle royal "Aquila" retrouve la nature à Sidi Zid, en Tunisie, le 23 février 2025.
L'aigle royal "Aquila" retrouve la nature à Sidi Zid, en Tunisie, le 23 février 2025. © Fethi Belaid, AFP
L'objectif d'un tel relâcher est de stabiliser la population d'aigles royaux dans le pays "qui ne compte que 50 couples, un chiffre choquant" pour Ridha Ouni.

En Tunisie, en raison de la dégradation de son habitat naturel, mais aussi du braconnage et de la chasse, l'aigle royal est sur la liste rouge de l'Union internationale pour la conservation de la nature des espèces en danger.

Habib Rekik, un informaticien responsable de "ResQ", filme toutes les opérations avec sa GoPro pour sensibiliser le public : "peu de gens ici savent que ces animaux sont protégés par la loi, qu'ils doivent rester dans la nature, pas dans des cages ou des jardins. Il y a un grand parcours à faire".

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Il s'inquiète aussi de voir tous les week-ends des touristes se faire photographier avec des faucons à Sidi Bou Saïd, près de Tunis.

"Si vous voulez voir un rapace, regardez des documentaires ou allez dans la nature avec des jumelles", s'énerve Habib Rekik, en appelant à boycotter les braconniers alimentant le commerce illégal.

L'aigle royal "Aquila" sort de sa cage avant de s'élancer dans la nature, dans les montagnes de la région de Sidi Zid, en Tunisie, le 23 février 2025.
L'aigle royal "Aquila" sort de sa cage avant de s'élancer dans la nature, dans les montagnes de la région de Sidi Zid, en Tunisie, le 23 février 2025. © Fethi Belaid, AFP
Avoir autant de jeunes dans l'ATVS est un atout pour populariser ses actions, qui ont un coût car "un aigle royal, ça consomme 500 grammes de viande par jour et la viande est très chère en Tunisie", souligne Ridha Ouni.

À l'initiative de ses jeunes membres, l'ATVS, qui dépend entièrement de dons privés, s'est lancée sur Instagram et sur des plateformes de financement participatif.

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Prochains objectifs : rénover les volières de Ridha Ouni et créer un espace à des fins d'éducation environnementale.

Avec AFP
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